Malgré des évolutions nationales inhabituellement contrastées et une légère amélioration de son indice régional, la zone Europe de l’Est et Asie centrale conserve, année après année son avant-dernière place dans le Classement. C’est dans cette région que l’indicateur qui évalue la qualité du cadre légal est le plus dégradé. Plus de la moitié des pays de la zone pointent toujours autour ou derrière la 150e place. Les deux poids lourds de la région, la Russie et la Turquie (157e), persistent à réprimer la presse indépendante. Plus grande prison pour les professionnels des médias, la Turquie est le seul pays au monde à avoir poursuivi une journaliste pour ses enquêtes sur les “Paradise Papers”. Dans cette partie du monde où tout est largement figé, les hausses sont rares et méritent d’être signalées. L’Ouzbékistan (160e, + 5), qui a libéré les derniers journalistes emprisonnés sous la dictature de feu Islam Karimov, quitte la zone “noire”, qui indique les situations le plus critiques. L’Arménie (61e, +19) dont la “révolution de velours” a permis de desserrer l’emprise du pouvoir sur l’audiovisuel, fait de son côté un bond d’autant plus important qu’elle est située dans la zone volatile du Classement.
Propagande totalitaire, censure et intimidations, violences physiques et cyberharcèlement : l’Asie-Pacifique concentre tous les maux qui entravent l’exercice du journalisme et affiche cette année un indice régional stable qui la maintient dans les plus mauvaises places. Le nombre de journalistes assassinés a été particulièrement élevé en Afghanistan (121e), en Inde et au Pakistan (142e, -3). La désinformation devient aussi un véritable fléau régional. En Birmanie, l’instrumentalisation des réseaux sociaux a contribué à banaliser les messages de haine anti-rohingyas et à normaliser le fait que deux journalistes de Reuters se retrouvent condamnés à sept de prison pour avoir tenté d’enquêter sur le génocide dont est victime cette communauté. Sous l’influence croissante de la Chine, la censure se répand à Singapour (151e) ou au Cambodge (143e, -1). Dans cet environnement difficile, les 22 places gagnées par la Malaisie (123e) et les Maldives (98e) illustrent à quel point les alternances politiques peuvent radicalement changer l’environnement de travail des journalistes et de quelle façon l’écosystème politique d’un État influence directement la situation de la liberté de la presse.
Avec RSF