CONTRIBUTION
Le premier gouvernement de l’acte 2 de l’ère Sall est en place. Sont nombreux les enseignants qui se réjouissent de la migration de M. Serigne Mbaye Thiam hors du territoire éducatif. Ce qui est compréhensible, vu les multiples épisodes de confrontation qui les ont opposés. Le ministre n’a cédé à aucune pression. Borné, opiniâtre, tenace ? Les avis sont partagés. Et toutes les mesures prises contre/pour les enseignants ces dernières années peuvent également être mises à son compte, même si certains les mettent sur le dos du président de la République qui définit les politiques éducatives.
Faudrait-il se réjouir du départ de Serigne Mbaye Thiam ? Oui, cela contribue à pacifier un tant soit peu l’espace socio-éducatif. Oui, parce que la confiance avec les acteurs que sont les enseignants n’était plus solide. Oui parce que l’on ne peut gérer des enseignants comme des malfrats. Cependant, penser que les conditions des enseignants vont s’améliorer parce qu’un ministre a changé, relève de la naïveté. Son remplaçant Mamadou Talla pourra-t-il être plus royaliste que le Roi ? Pourra-t-il s’engager plus que la population elle-même ? Car là se situe le nœud de l’histoire.
En effet, toute la problématique de la question enseignante réside dans le fait qu’elle est transversale et se meut dans un écosystème de responsabilités indépendantes les unes des autres, mais contrôlé au centre par le président de la République dont les choix et la vision orientent la marche du tout. Aussi remplacer un pneu crevé pour continuer à rouler sur une route cahoteuse et parsemée d’écueils, est une aberration. C’est de voie qu’il faut changer, la déblayer et reconstruire le cas échéant. Les réformes attendues dans l’Education ne passeront que par une forte volonté politique du président de la République, impulsée et imposée par une prise de conscience des populations sur l’état actuel de ce secteur.
En effet, l’ignorance de la majeure partie de la population de la déliquescence du système éducatif est révoltante. Exemple : Comment expliquer qu’un pays qui injecte 40 % de son budget dans l’éducation puisse laisser une bonne partie de son école aux mains des privées sans contrôle ? Tant que les populations ne s’approprieront pas les problèmes de l’école, tant qu’elles ne se rendront pas compte de l’inadéquation de ce système, aucune forme de changement ne saura être efficiente, car l’Education est et demeure l’affaire de tous.
Par conséquent, la bataille de tout enseignant devrait être la sensibilisation sur l’état actuel du système éducatif, les horizons noirs vers lesquels l’école sénégalaise vogue. La situation incongrue des enseignants est une conséquence de l’inconséquence de l’école sénégalaise. Sa résolution est fondamentalement liée au sort de cette dernière, mais en sur-priorité. Donc le changement de paradigme dans la conception même de l’école est le tréfonds de la politique éducative, avant les améliorations indispensables des conditions de travail et de vie des différents acteurs : nous enseignants en particulier. Tous pour la refondation de l’Ecole sénégalaise !
Oumar Sow DIAGNE
Enseignant
Auteur/Ecrivain