La direction du Commerce intérieur sonne l’alerte. Dans une lettre circulaire, les services du ministère du Commerce renseignent que des produits anti-moustiques hautement toxiques et cancérigènes circulent dans les marchés de Dakar.
Prises en otage actuellement par des moustiques qui piquent nuit et jour, les populations de Dakar qui font recours à certains produits anti-moustiques risquent d’avoir une mauvaise surprise. Et pour cause, parmi ces produits proposés pour le combat contre les moustiques, il y en a qui contiennent du chlordécone, une matière hautement toxique et pouvant même causer le cancer. Il s’agit de «Sandal Wood», «Happy Family», «Palace Incence King». D’ailleurs, dans une lettre-circulaire, la direction du Commerce intérieur a tenu à sonner l’alerte tout en exigeant le retrait immédiat et sans délais de ces produits qui inondent les marchés. «Il m’est revenu la présence sur le marché de produits anti-moustiques dénommé «Sandal Wood», «Happy Family», «Palace Incence King», contenant du Chlordécone, un produit hautement toxique et cancérigène», fait constater le directeur du Commerce intérieur, Ousmane Mbaye. Qui indique que, selon l’avis de la Commission nationale de gestion des produits chimiques, la circulation et l’utilisation de formulations de pesticides contenant du chlordécone, sous quelques formes que ce soit, doivent être interdites sur le territoire national. En conséquence, Ousmane Mbaye demande à tous les services de la direction du commerce intérieur de procéder, sans délai, au retrait de ce produit du marché. «J’attache du prix à l’exécution diligente de la présente», lance-t-il.
Un tour dans certains marchés de Dakar permet de constater que ces produits sont bel et bien commercialisés sous forme de bâtonnets qu’on allume et qui se consument en dégageant une fumée censée repousser les moustiques. «Palace Incence King» comme les «Happy Family» et «Sandal Wood» sont visibles sur beaucoup d’étals établis le long des trottoirs des marchés et dans les boutiques de cosmétique. Pis, certains marchands font du porte-à-porte pour les proposer aux habitants.
Au marché de Grand-Yoff, à la tombée de la nuit, ces produits s’arrachent comme de petits pains. Les populations qui, pour le moment, ignorent les dangers de ces répulsifs anti-moustiques n’hésitent pas à s’en procurer pour se protéger contre les petites bestioles.
Rencontrée à quelques mètres de la Paroisse Saint-Paul de Grand Yoff, Anne-Marie Gomis affirme qu’elle utilise bien «Palace Incence King» pour se protéger contre les piqûres des moustiques. La dame dit ignorer les vertus cancérigènes du produit. «J’avoue que c’est vous qui venez de me l’apprendre. J’utilise ce produit chaque jour pour chasser les moustiques de mon appartement. Il est très efficace. Depuis que j’ai commencé à l’utiliser, j’ai retrouvé le sommeil. La nuit, je dors bien. Mais, franchement, je ne savais pas qu’il contenait des substances dangereuses», lance Anne Marie Mané qui n’en revenait pas.
Chez certains commerçants, aussi c’est la grande surprise. Détenteur d’une boutique cosmétique, Modou Sène soutient que, à l’image des tubes éclaircissants, il vend ces produits anti-moustiques mais n’a jamais su qu’ils sont dangereux.
En revanche, ce professeur de français dans un lycée privé de la place semble déjà flairer le danger de ces produits anti-moustiques. Moussa Ndiaye, la cinquantaine, habillé en chemise de couleur gris assortie d’un pantalon «super 100» et un livre à la main droite confie qu’il n’utilise plus ces produits. Parce qu’ils ont failli lui coûter la vie. Il raconte sa mésaventure. «Au début, j’utilisais ces produits. Mais j’avais fait le constat que, à chaque fois que j’allume un bâtonnet dans ma chambre, le lendemain, au réveil, j’avais du mal à respirer correctement et mes crachats prenaient une teinte noirâtre. Après une consultation à l’hôpital, le médecin m’a conseillé de les abandonner en utilisant la moustiquaire, parce qu’ils dégagent des substances nocives», narre-t-il.
Samba BARRY