Les services de communication Over-The-Top (Ott), continuent de cannibaliser les revenus «voix et Sms» des opérateurs de téléphonie mobile. Au Sénégal, le Groupe Sonatel en a lourdement fait les frais. Rien qu’en 2018, la filiale sénégalaise de France Télécoms a perdu 20 milliards à cause de Viber, Skype, Whatsapp…. Cela, sans compter 5 milliards pour la fraude sur les Sim-box.
Dopés par l’évolution technologique, les Over-The-Top (Ott), Viber, Skype, Whatsapp, commencent à grignoter des parts de marchés aux opérateurs de télécommunications, plus particulièrement à la poule aux œufs d’or, Sonatel. Consommateurs de bande passante, ces fournisseurs de services ont enlevé 20 milliards de francs Cfa en 2018 à l’opérateur Orange, au Sénégal. C’est ce qu’a révélé, hier, le Directeur général du Groupe Sonatel, Sékou Dramé, lors d’une rencontre avec des journalistes et médias spécialisés en Tic. «Avec l’international entrant qui était une ligne de business assez forte, qui dégageait une rentabilité assez élevé, notre chiffre d’affaires a reculé de 25 milliards de francs Cfa cette année, si nous prenons les résultats au Sénégal. Et on estime que sur ces 25 milliards, cinq milliards sont dus à la fraude avec les Sim-box, les 20 autres milliards sont causés par les Ott», a détaillé M. Dramé. Non sans confié qu’une partie de ce magot est perdue pour l’Etat du Sénégal en terme de taxes. Car, pas moins de 30 % de ce montant devraient rentrer dans les comptes du Trésor public. Ce qui n’est pas négligeable pour un pays pauvre comme le Sénégal.
Pour Sékou Dramé, le trafic d’appels entrants une ligne de business sur laquelle Sonatel avait une rentabilité beaucoup plus forte que celle qu’elle a sur les nouveaux services, lancés par l’entreprises, notamment Orange Money et la Data (les données). Ce qui confirme la lutte acharnée que la filiale sénégalaise de France Télécoms a mené en 2011 lorsque le régime du Président Abdoulaye Wade voulait lui ôter le contrôle de ces appels au profit de Global voice group (Gvg). «On a une belle croissance sur Orange Money avec 36 % mais sa rentabilité ne compense pas ce que l’on a perdu sur l’international entrant. Si on regarde bien le chiffre sur notre réseau, Sonatel n’a que 27 % du trafic de minutes d’appels internationaux qui entrent au Sénégal. Près de 2/3 des appels internationaux reçus au Sénégal se font via ces Ott. Ce qui montre l’impact assez dévastateur sur l’écosystème», ajoute le patron de l’opérateur historique du Sénégal. Non sans signaler que ce modèle, qui contribue pour zéro franc aux performances du réseau des opérateurs, n’est pas viable.
D’autre part, le top management de Sonatel, qui a dialogué avec les journalistes, leur a expliqué les raisons de la stagnation du bénéfice du groupe, malgré l’évolution conséquente de son chiffre d’affaires sur la dernière décennie et qui a atteint 1 022 milliards de francs Cfa au cours de l’exercice écoulé.
Selon Ousmane Boly Traoré, Directeur financier et comptable dudit groupe, cela s’explique par le fait que les nouvelles acquisitions qui contribuent à augmenter le chiffre d’affaires de Sonatel peuvent ne pas tout de suite générer des résultats. «Il faut de petits pas pour avoir un retour sur investissement. On a eu le même phénomène quand on est entré en République de Guinée. Les premières années, Orange Guinée a contribué au chiffre d’affaires du groupe Sonatel mais pendant 4 à 5 ans, cette filiale n’avait pas encore commencé à contribuer sur les résultats. Et c’est le même phénomène qui se reproduit en Sierra Léone où on est entré il y a 2 ou 3 ans. Cette filiale contribue aujourd’hui assez fortement sur le chiffre d’affaires mais il lui faudra un peu de temps pour rentrer dans les résultats», a-t-il expliqué.
Seyni DIOP