(Correspondance) – «La Ld invite l’Etat qui a le monopole de la violence légitime à ne ménager aucun effort pour la tenue de l’élection présidentielle à date échue en toute transparence et quiétude».
Venant d’un parti politique autre que ceux de la gauche, cette invite aurait pu être considérée d’irresponsable. Surtout en ces moments où la tension va crescendo dans l’espace politique sénégalais et où tous lèvent les yeux au ciel pour prier que ce pays traverse les prochaines échéances électorales en toute sérénité et dans la paix la plus absolue. Mais venant d’un parti de gauche, un tel discours peut, dans une certaine mesure, se comprendre quand on en juge par l’idéologie de ces formations politiques gauchistes qui tourne essentiellement autour d’une politique de brimade de l’expression de la masse par une minorité dirigeante. Car nul besoin d’être un expert linguistique pour déchiffrer le message. L’invite à la violence est on ne peut plus claire. Quand on demande de ne ménager aucun effort et d’user de son monopole de la violence légitime, c’est tout simplement un appel à la coercition. Pour dire, selon le docteur en sociologie, Abdou Khadre Sanokho, l’usage de la contrainte par la violence légalisée de l’Etat qui n’est autre qu’une violence instrumentale. Laquelle contrainte n’a non seulement pas sa pertinence dans le contexte actuel mais ne devrait pas se heurter à une violence passionnelle émanant du peuple souverain.
Surtout que, selon toujours le sociologue, cette violence passionnelle dont on parle n’étend pas encore ses tentacules parce qu’elle n’attire pas, du moins jusqu’à ce jour, l’adhésion du peuple. «Nous sommes toujours dans ce jeu d’intimidation aussi bien de la part de l’opposition que du pouvoir. Mais il ne devrait pas y avoir une occasion d’expression de cette violence dite légitime ou instrumentale. Car ce qui est et restera constant c’est qu’aucune puissance ne peut résister à la volonté de son peuple», souligne le sociologue. Et de poursuivre pour estimer que tant que cette violence est exprimée par l’opposition, elle reste disproportionnée par rapport à celle du pouvoir qui est beaucoup plus véhémente. Les forces ne sont même pas les mêmes. Etant toutefois entendu que malgré cette force coercitive des pouvoirs étatiques, si le peuple venait à cautionner et adhérer à cette violence de l’opposition, un Etat lucide et responsable sera contraint de reculer. Et à ce titre les événements du 23 Juin sont assez édifiants. «Quand on entreprend quelque chose et qu’on se rend compte que le peuple n’est pas d’accord, ce n’est pas une honte de reculer. Mais aujourd’hui, on a comme l’impression que le pouvoir s’entête. Un Etat qui s’entête par rapport aux revendications de l’opposition, çà ne gène pas puisque c’est un jeu politique et un rapport de force et dans ce jeu là, quand on gagne le combat de l’intimidation, c’est de bonne guerre», analyse-t-il.
Mais quant à utiliser cette force coercitive contre la volonté populaire comme en invite la Ld, c’est simplement machiavélique pour ne pas dire irresponsable. Car user du monopole de la violence légitime, ne ménager aucun effort pour avoir une élection en toute transparence et en toute quiétude, c’est comme la politique du bâton et de la carotte pour ne pas dire une invite au système de dressage en cours dans les zoos où il faut mater les fauves pour les tenir à la laisse et assurer la quiétude dans le parc. Pour simplement dire le caractère antidémocratique de cette invite à l’expression de la violence légitime de l’Etat. Comme le dit si bien le docteur Sanokho, la démocratie c’est l’affaire des grands seigneurs. «Même s’il est vrai que l’Etat a le monopole de la violence légitime, il n’en demeure pas moins que la minorité a aussi ses droits. Et quand le peuple a l’impression que cette minorité est victime d’injustice et cautionne son combat c’est le pouvoir qui risque d’y laisser beaucoup de plumes», explique le sociologue. Aussi le discours auquel tous s’attendaient était non pas d’inviter à la violence mais plutôt d’appeler à la sérénité pour dire que maintenant que le Conseil constitutionnel a décidé de la liste des présidentiables, que tous ceux qui sont recalés taisent leurs frustrations et aillent soutenir le candidat de leur choix en toute responsabilité afin que ce pays qui est le nôtre puisse traverser ces joutes présidentielles en toute quiétude.
Sidy DIENG