800 cas de viol recensés annuellement en Tunisie. 800, soit près de 2 cas par jour. Le chiffre est inquiétant.
Dévoilées par l’unité d’urgence médico-légale de l’hôpital Charles Nicolle à l’hebdomadaire “Al Sabbah Al ousboui” dans son édition de ce lundi 7 janvier 2019, et confirmées au HuffPost Tunisie par le ministère de la Justice, les statistiques révèlent que la majorité des cas de viol sont commis sur des mineurs de moins de 18 ans. “65% des victimes sont des enfants” précise le journal en ajoutant que 80% d’entre eux concernent des mineures de sexe féminin.
Ces chiffres avancés ne seraient en réalité que la partie visible de l’iceberg puisque la grande majorité des victimes préfèrent rester dans l’ombre.
Le viol, ce phénomène tabou, est en train de prendre de l’ampleur notamment après la révolution de 2011, estime le sociologue Moncef Wannes à “Al Sabbah Al ousboui”. Un constat, qui selon ce dernier, est expliqué par l’instauration d’un climat d’insécurité quasi permanent durant la période post-révolutionnaire. Le sentiment d’insécurité et d’impunité qui règne dans le pays depuis 2011 a, en effet, permis aux agresseurs de pulluler. Pourtant, la loi sur les crimes sexuelles va jusqu’à la peine de mort.
D’après le sociologue, le climat social, les dysfonctionnements judiciaires et les préjugés culturels font prospérer cette culture du viol en Tunisie et poussent certains à commettre l’irréparable.
Selon lui, le divorce et le retardement de l’âge du mariage en Tunisie qui varie de 40 à 45 ans chez l’homme et 35 à 40 ans chez la femme pourraient être des motifs récurrents motivant les déviations sexuelles.
De plus, la nature de la société tunisienne qui malgré les apparences demeure conservatrice ne permet pas à certains à s’épanouir et satisfaire leurs besoins sexuels.
Une étude qualitative du CREDIF sur “Les représentations sociales de la violences faites aux femmes chez les hommes, jeunes et adultes”, publiée en juin 2018, a montré le degré d’enchevêtrement entre les représentations de la femme et la violence chez les hommes.
La violence est expliquée par les hommes interrogés par des facteurs plus récents, comme le mode de vie jugé “trop moderne”, la vitesse des changements sociaux en faveur des femmes. Ceux issus des milieux ruraux et pré-urbains pointent du doigt un style de vie “incompatible avec les mœurs et les valeurs de la société, provocateur et suscitant inévitablement des ‘réactions’”, souligne l’étude.
En Tunisie, en moyenne 3000 plaintes sont déposées, chaque mois, par des femmes victimes de violences dans les postes de polices, a révélé Imen Zahouni, la directrice générale des affaires de la femme et de la famille au sein de ministère de la Femme, de la Famille et de l’Enfance, en juillet 2018; au HuffPost Tunisie.
Certaines de ces plaintes peuvent être retirées par les victimes concernées, mises sous pression, mais le chiffre reste important, souligne-t-elle.
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