Une loi d’amnistie. C’est ce dont pourraient bénéficier Khalifa Sall et Karim Wade. Mais, à une condition, la réélection de Macky Sall.
Chaque fois que ses partisans ont évoqué son éventuel retour, le pouvoir a agité le chiffon rouge. Il leur a, invariablement, opposé l’éventuelle application de la contrainte par corps. Laquelle est, selon le dictionnaire en ligne, universalis, une «mesure d’exécution légale qui consiste à appréhender de plein droit un condamné afin qu’il s’acquitte de son dû». Si elle est exécutée contre Karim Wade, cette mesure judiciaire pourrait l’amener directement en prison, lui qui a été condamné en 2015 à 6 ans d’emprisonnement ferme et à 138 milliards de Fcfa d’amende. A contrario, s’il reste au Qatar, aucune de ces mesures ne pourra lui être collée pour qui sait lire entre les lignes du discours des thuriféraires du pouvoir. Ce, jusqu’à la réélection de Macky Sall qui, s’il est remis en selle en 2019, pourrait faire voter une loi générale d’amnistie. Ce, si l’on en croit l’hebdomadaire parisien Jeune Afrique, dans son édition de cette semaine. «Le Président sénégalais envisage d’accorder une amnistie générale après la présidentielle, s’il était réélu. Elle pourrait notamment concerner Khalifa Sall. Un projet de nature à faire patienter Karim Wade», lit-on dans les «Confidentiels» de Jeune Afrique. Le magazine fondé par Béchir Ben Yahmed révèle que plusieurs chefs d’Etat de l’Afrique de l’ouest et centrale sont intervenus auprès du fils de l’ancien Président Wade pour le dissuader quant à toute velléité de retour d’autant que, argumentent-ils, «il n’est pas éligible [car] n’étant pas inscrit sur les listes électorales».
Plusieurs fois annoncé comme devant être de retour à Dakar, les partisans de Karim Wade scrutent, en vain, le ciel dans l’espoir d’y voir l’ombre de l’ancien tout puissant ministre d’Etat de son père. En vain. De sorte que certains cadres du Pds en étaient arrivés à la conclusion qu’ils n’avanceraient plus de date quant à un éventuel retour de l’enfant prodige. Mais, récemment, profitant d’un déplacement du Comité directeur du Pds à Touba, à la veille du grand Magal, le coordonnateur du Pds, Oumar Sarr, avait relancé le débat évoquant l’imminence d’un retour de Karim Wade. Lequel, à un certain moment, avait été annoncé en Guinée où il compte de solides relations avec certaines personnalités de haut rang, notamment l’actuel Premier ministre d’Alpha Condé.
Pour rappel, l’ancien ministre d’Etat, ministre des Infrastructures et de la Coopération internationale, entre autres portefeuilles, a été, sur ordre du procureur spécial de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei), arrêté en 2013, poursuivi et jugé par cette juridiction d’exception puis incarcéré en 2014 pour enrichissement illicite. Condamné en 2015 à six ans d’emprisonnement ferme et à une amende de 138 milliards, il a été gracié par le président de la République, pour la peine privative de liberté, en 2016 tout en restant condamné à payer l’amende pécuniaire. Il part alors en exil au Qatar où il vit toujours. A la veille de son jugement par la Crei, le Pds l’avait investi comme son candidat à la présidentielle. Mais, une révision du Code électoral votée entre temps, interdit son inscription sur les listes électorales qui est, du coup, rejetée. Commence alors une longue procédure devant les juridictions qui aboutit au rejet de son recours en dernier ressort devant la Cour suprême. Malgré tout, son parti maintient sa candidature pour le scrutin du 24 février 2019.
Ibrahima ANNE