C’est la fin de la procédure judiciaire française dans l’affaire du Joola, ce ferry sénégalais qui chaviré au large de la Gambie en 2002, tuant près de 2 000 personnes dont une vingtaine de Français.
Ce mardi, la Cour de cassation à Paris a prononcé un non-lieu définitif. Une instruction avait été ouverte en France, il y a plus de quinze ans, suite à la plainte des familles de victimes françaises. C’est donc le dénouement d’une longue bataille judiciaire.
Un dénouement auquel les familles de victimes s’attendaient. C’est en octobre 2014 que les juges en charge de l’enquête, ouverte pour homicide involontaire et non-assistance à personne en danger, avaient rendu une ordonnance de non-lieu. Les magistrats avaient alors estimé que « des dispositions internationales applicables » à ce naufrage les empêchaient d’engager des poursuites en France pour des faits intervenus au Sénégal.
Ce non-lieu a ensuite été confirmé deux ans plus tard par la Cour d’appel et hier par la plus haute juridiction française. Une décision difficile à comprendre pour Alain Verschatse, le président de l’association des familles de victimes françaises : « Vous irez raconter aux familles des victimes que leur enfant, leur proche a été tué à cause d’un représentant de l’Etat étranger, mais qu’on ne peut l’attaquer en raison de son immunité diplomatique. Je peux vous assurer que l’on a du mal à le comprendre. Et là, on ne parle pas d’une victime ou de deux, on parle de 2 000 victimes. On ne peut pas accepter de laisser partir une personne comme ça alors qu’elle a mis 2 000 personnes à la mort. Il faut que la France arrête de réfléchir de cette façon-là, que la justice arrête de se plier à la diplomatie française et que les relations étrangères, en l’occurrence les relations franco-sénégalaises, ne soient pas plus fortes qu’une justice qui devrait être indépendante. On a ici une justice qui n’est pas indépendante en France ».
Pourtant l’enquête avait connu quelques avancées significatives. Notamment en 2008 quand le juge de l’instruction de l’époque décide d’émettre des mandats d’arrêt à l’encontre de neuf personnalités sénégalaises, parmi elles on retrouve l’ancien Premier ministre au moment du naufrage, Mame Madior Boye et l’ancien ministre des Forces armées Youba Sambou. Mais ces mandats ont été farouchement combattus du côté du Sénégal et finalement annulés.
Les recours possibles pour les familles de victimes sont faibles. Il n’y en a plus dans le système judiciaire français ni du côté du Sénégal puisque l’affaire a été classée en 2003. La justice sénégalaise mettant l’entière responsabilité des événements sur le dos du capitaine du navire. Pour autant, les familles de victimes françaises n’entendent pas en rester là. Elles pourraient notamment porter l’affaire devant la Cour européenne des droits de l’homme.
RFI