Les premiers jalons d’un jugement de Yaya Jammeh sont posés, à travers le lancement, par Human rights Watch, de la «Campagne pour amener Yaya Jammeh et ses complices à la justice».
Mais aussi par la prestation de serment, hier à Banjul, des membres de la Commission vérité, réconciliation et réparations. Sa mission : enquêter, recommander des poursuites et réparer le préjudice des victimes.
Comme indiqué dans notre édition n°7966 du vendredi 12 octobre 2018, dans un dossier intitulé : «Justice internationale : ces chefs d’Etat dans le viseur de la Cpi», Yaya Jammeh est un potentiel client de la Cour pénale internationale (Cpi). Ce, à l’instar d’une dizaine de dirigeants du vieux continent. Les choses se précisent et tout laisse croire qu’elles vont dans le sens d’une traduction en justice de l’ex-homme fort de Banjul, en exil en Guinée-Equatoriale depuis sa chute en 2016. En effet, Human Rights Watch et des groupes gambiens et internationaux lancent la «Campagne pour amener Yaya Jammeh et ses complices à la justice», afin de faire pression pour que Jammeh et ceux qui portent la plus grande responsabilité pour les crimes de son gouvernement comparaissent devant un tribunal. Mais l’organisation internationale des droits de l’homme veut qu’ils soient tous jugés avec toutes les garanties de procédure.
En mai 2018, à la suite d’un rapport de Human Rights Watch et de Trial International, il a été révélé qu’en 2005, environ 44 migrants ghanéens ainsi que 12 autres ressortissants ouest-africains (du Nigéria, du Sénégal, du Togo et de Côte d’Ivoire) avaient été assassinés par le «Junglers», un escadron de la mort se rapportant à Jammeh, après avoir été arrêtés par les plus proches députés de Jammeh dans l’Armée, la marine et la police. Aujourd’hui, des Ong ghanéennes, l’unique survivant et les familles des victimes appellent le Ghana à demander l’extradition du natif de Kanilaï, pour qu’il soit jugé au Ghana.
Mais un autre acte traduit l’imminence d’un procès de Jammeh, à savoir le lancement de la Commission vérité, réconciliation et réparations. Ladite commission a pour but de «faire la lumière sur les violations des droits de l’homme commises sous son régime». Ses onze membres ont prêté serment hier, en présence du ministre gambien de la Justice, Abubacarr Tambadou. Qui a confié à la presse gambienne que les auditions vont commencer rapidement. «Les audiences publiques de la commission commenceront rapidement après la cérémonie», a assuré le ministre. Lancée en 2017 par le président Adama Barrow, la Commission vérité, réconciliation et réparations est présidée par un ancien diplomate auprès des Nations-unies, Lamin Sise. Elle comprend quatre femmes dont la vice-présidente Adelaide Sosseh qui représente l’ensemble des communautés ethniques et religieuses du pays. Instituée par une loi adoptée en décembre 2017, ladite commission dispose de pouvoirs d’enquête et pourra, au terme de ses travaux, recommander des poursuites ou des réparations pour les victimes.
Les défenseurs des droits de l’homme accusent le régime de Jammeh «d’actes systématiques de torture contre des opposants et des journalistes», «d’exécutions extrajudiciaires», de «détentions arbitraires» et de «disparitions forcées».
Pape NDIAYE