CONTRIBUTION
Dans l’affaire Mariama Sagna, l’empressement des propagandistes marron à défendre la thèse du «crime de charretier» est une diversion qui autorise tous les soupçons. On se demande qui, de l’Apr ou de la gendarmerie, mène l’enquête. Les révélations contradictoires des quotidiens proches du Palais n’enterrent pas du tout la piste du «crime mackoute». La violence verbale qui les accompagne vise à divertir les esprits critiques, pour empêcher tout examen sérieux des faits. A son tour, le procureur a exclu la piste politique sans préciser s’il l’a explorée ou non. Le cas échéant, ce serait rassurant. Mais la vigilance s’impose devant la violence d’un pouvoir minoritaire décidé à perpétrer un coup de force électoral.
On est encore dans la diversion quand, s’exprimant, en tenue, sur une chaîne de télévision, un certain lieutenant Diop accuse les actuels dirigeants de l’opposition d’être les responsables de l’assassinat de six policiers en février 1994. Et menace : «Ku nara yaq reewmi ñu dal sa kaw» (ceux qui voudront gâcher ce pays, nous leur tomberons dessus). Il inaugurait ainsi, semble-t-il, une nouvelle fonction de «chef du bureau des relations publiques de la police par intérim». Devant ces déclarations délirantes, le ministre de l’Intérieur et la Police gardent un silence têtu. Pourquoi ? Le silence est parfois la plus parlante des diversions.
Ces faits, qui font de la sécurité un enjeu préoccupant de la présidentielle 2019, interviennent alors que toutes les ressources du pouvoir marron sont mobilisées pour contraindre les «karimistes» et les «khalifistes» à adopter un plan B. En clair, renoncer aux candidatures qui inquiètent Macky Sall, et trouver des champions moins dangereux. Du côté de l’opposition, il est amusant de remarquer que cette stratégie, soi-disant intelligente, repose uniquement sur le défaitisme de ses promoteurs. En effet, pourquoi vouloir autoproclamer, coûte que coûte, sa propre défaite en octobre alors que le combat sur la validation des candidatures est prévu en décembre ? Avec de telles dispositions mentales, un plan B n’y suffirait pas. On épuiserait toutes les lettres de l’alphabet sans jamais lutter ni jamais vaincre.
La démocratie ne peut être victorieusement défendue à l’aide d’un craintif plan B. Si les opposants d’avant-2000 en avaient cherché un, la première alternance n’aurait jamais eu lieu. La candidature de Karim Wade et Khalifa Sall est une demande des milliers de Sénégalais qui leur accordent en ce moment leurs parrainages. Cette demande populaire est plus forte que les stratagèmes de Mackyavel et ses velléités dictatoriales. L’opposition devrait s’inspirer des luttes sociales en cours. La Justice, la Santé, les Chemins de fer, sont totalement paralysés par la grève. Ces travailleurs obtiendront gain de cause, comme les enseignants ou les étudiants avant eux, précisément parce qu’ils acceptent de lutter autour de leurs revendications, au lieu de se réfugier dans la facilité trompeuse du plan B, ou plutôt du plan D.
Mamadou Bamba NDIAYE
Ancien député
Secrétaire général du Mps/Selal