Ils seront au cœur de la présidentielle de février 2019. Ces retraités de la Cour suprême, du Conseil constitutionnel et de la Cena vont contrôler le scrutin en amont et en aval par la volonté du président Macky Sall qui a décidé de les maintenir, alors qu’ils devraient faire place nette. Ce qui risque de créer des suspicions au lendemain de ce scrutin crucial.
Certains d’entre eux ont fait valoir leurs droits à la retraite, d’autres ont vu leur mandat arriver à expiration depuis des mois. Mais, le président de la République en a décidé autrement. Il a décidé de les maintenir au cœur du système électoral, alors que l’opposition doute de leur neutralité à tort ou à raison. A preuve, Babacar Gaye, porte-parole du Parti démocratique sénégalais (Pds) croit savoir que le président Macky Sall a prorogé indûment de trois ans le mandat du président de la Cour suprême, Badio Camara, pour des raisons politiques, alors qu’il devait partir à la retraite. L’opposant soupçonne un «deal» entre les deux hommes et s’en explique : «On devine aisément les termes du marché à la fois honteux et frustratoire pendant que de brillants et jeunes magistrats, mieux formés et honnêtes, piaffent et attendent d’occuper les postes supérieurs, mais Macky n’ayant absolument pas confiance en eux, les tient à distance». «Je tiens à bien faire comprendre que M. Badio Camara est au cœur du dispositif mis en place par Macky Sall pour instrumentaliser la justice contre ses opposants politiques, a écrit Karim Wade, le candidat déclaré Pds dans une lettre ouverte. Il est l’un des principaux exécutants du complot politico-judiciaire dont je suis victime depuis 6 ans. En sa qualité de Premier Président de la Cour suprême, il porte une responsabilité personnelle, directe et écrasante dans les violations de mes droits fondamentaux. Installé par Macky Sall à la tête d’un petit clan de magistrats aux ordres qui ont transformé la justice en annexe du pouvoir exécutif, M. Badio Camara a été maintenu à son poste alors qu’il devait partir à la retraite le 9 avril 2017, dans le seul but d’aider Macky Sall à se débarrasser des candidats qui font obstacle à sa tentative d’être réélu à la tête du Sénégal», a-t-il dit ajouté.
Le juge Malick Diop a prêté serment en juillet 2012, à la place de Siricondy Diallo dont le mandat de 6 ans était arrivé à terme. Par conséquent, il devait normalement quitter le Conseil constitutionnel en juillet 2018 puisque son mandat est arrivé à terme. Mais jusqu’à présent, le vice-président du Conseil constitutionnel est toujours en poste dans cette juridiction supérieure. Un maintien qui risque de semer le doute quant à la sincérité du scrutin présidentiel à venir. En effet, l’opposition va certainement faire le lien entre ce maintien et le fait que Malick Diop fut de 2003 à 2005, directeur de cabinet de Macky Sall, lorsque ce dernier était ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales (août 2003-avril 2004) puis Premier ministre. Avec l’accession au pouvoir du président Macky Sall, il conserve son poste de ministre conseiller chargé des affaires juridiques, qu’il occupait du temps du président Abdoulaye Wade.
Nommé le 24 décembre 2009 par le président Abdoulaye Wade pour un mandat de six ans non renouvelable, Doudou Ndir, magistrat à la retraite, devait céder sa place depuis 2015. «Ses 6 ans sont largement dépassés mais ce n’est pas la première fois qu’un président continue son mandat…», reconnaît même Ousmane Badiane, pourtant membre de la coalition Benno Book Yaakaar, cité par Sud Quotidien. L’ancien Monsieur élections de la LD indique même que le maintien de l’actuel président de la Cena, Doudou Ndir pourrait constituer une source de polémiques au lendemain de la présidentielle.
Charles Gaiky DIENE