La consommation de drogues injectables gagne du terrain au Sénégal. Mais, le procédé utilisé à l’hôpital de Fann pour prévenir d’autres maladies liées à la drogue est peu commun. Là-dessus, les aveux sont glaçants.
Récupérer les anciennes seringues pour les remplacer par de nouvelles qui sont distribuées aux usagers de drogues injectables. Si le procédé vise à lutter contre la transmission d’autres maladies jugées plus graves, il sonne comme un encouragement. Et c’est pourtant ce que fait le Centre de prise en charge intégré des addictions de Dakar (Cepia) logé à l’hôpital de Fann. Une structure où 1 324 patients sont traités, en plus des 200 usagers qui le fréquentent au quotidien. «Il y a un programme dédié à la distribution des seringues. Il y a une équipe mobile qui se rend sur le terrain tous les jours, matin et soir, et deux fois par semaine, pour rencontrer les consommateurs de drogue sur le terrain, leur donner de nouvelles seringues et récupérer les anciennes. Ce, pour qu’ils puissent s’injecter avec des seringues neuves afin d’éviter la transmission des infections comme le VIH/Sida et l’hépatite», reconnaît Pr Mamadou Habib Thiam, chef du service de psychiatrie et de psychologie médicale de l’hôpital Fann. «Evidemment, c’est une activité qui n’est pas du tout normale et qui ne rentre pas dans la logique. Mais, nous sommes en train de discuter avec le ministère de la Justice pour pouvoir trouver des solutions», ajoute-t-il. Avant de justifier : «Si nous donnons aux gens des seringues pour qu’ils s’injectent, c’est comme si nous les encouragions à consommer la drogue. Alors, l’intention c’est d’éviter une maladie beaucoup plus grave qui est le Sida.»
Selon le chef de service, l’addiction constitue un problème de santé publique qui mérite une attention particulière des autorités publiques et des populations. Justement, la journée portes ouvertes vise à sensibiliser les populations sur la problématique liée à la consommation de drogue.
Dr Fatou Nar Mbaye, représentante du Conseil national de lutte contre le Sida (Cnls) affirme que les usagers de drogue constituent une population exposée aux infections comme le VIH /Sida. A l’en croire, les infections sont très fréquentes au sein des consommateurs de drogues injectables avec 5,2 % de prévalence contre 2,5 % chez les hépatites et 18 % chez les non injecteurs. Ce constat, dit-elle, rappelle la nécessite de renforcer la politique de prévention, de protection de la santé publique et inviter populations, pouvoirs publics et associations à s’engager résolument dans une politique de réduction des risques liés à l’usage de la drogue.
Samba BARRY