De nombreux automobilistes ont passé un week-end noir sur l’autoroute à péage. Ils étaient en effet des milliers de conducteurs à devoir supporter les énormes bouchons sur les guichets de cet axe routier. De la gare de Thiaroye à Pikine, des voitures en files s’étendant presque sur 2 kilomètres roulaient à pas de tortue pour passer à la caisse. Et avec le trafic supplémentaire qui va être déversé sur l’ouvrage par la revue des prix, cette «Autoroute de l’Avenir» va redevenir une Route nationale bis et nous ramener à «l’Autoroute du passé».
Ça bouchonne grave sur le péage. Et les ralentissements sur les tarifs réclamés par l’Etat au concessionnaire poussent certains usagers à se demander si cela ne provoquerait pas une perte de vitesse sur cet axe routier. Ce qui ferait que la baisse exigée va se révéler un couteau à double tranchant pour des usagers de «l’Autoroute de l’Avenir» qui cherchent à gagner du temps et un confort de conduite pour vaquer tranquillement à leurs occupations. Car, même si l’autoroute est pavée d’or massif pour la Société d’exploitation de la nouvelle autoroute concédée (Senac), c’est une grosse inquiétude qui habite certains usagers habitués de l’infrastructure lorsqu’ils commencent à constater des difficultés aux gares de péage au moment de sortir de Dakar.
Aujourd’hui, avec la hausse exponentielle du trafic, consécutive au déplacement de l’aéroport de Dakar à Diass, des automobilistes perdent beaucoup trop de temps dans les gares de péage de Pikine, Thiaroye ou Rufisque. Des embouteillages aux guichets de paiement que risque d’accentuer la baisse des tarifs avec le surplus de trafic qui va rejoindre ce tronçon. Ainsi, aux yeux de certains, cette baisse à venir risque de provoquer plus de problèmes aux usagers de l’autoroute qu’elle ne les soulagerait. Nombre d’entre eux qui doivent voyager, comme ceux qui se rendent aux lieux saints de l’Islam, pourraient en faire les frais. Mais, cette baisse pourrait bien faire les affaires des politiciens aux affaires, qui pourront se vanter de l’avoir au moins arraché à Gérard Senac, Pdg de Eiffage dont le concessionnaire est la filiale.
Seulement du côté des usagers, cette baisse exigée par les autorités au concessionnaire est très loin d’être impertinente. Joint par téléphone, Bachir Fofana, porte-parole du Collectif des usagers de l’autorité à péage, pense que c’est une interrogation légitime mais que c’est un «faux débat» pour leur structure que ne devrait certainement pas manquer d’applaudir un puissant patron des Btp hostile à cette firme macronienne qu’il n’a cessé de dézinguer récemment dans ses médias. «On ne peut pas maintenir les tarifs parce qu’il y a seulement des embouteillages sur le péage. Ces embouteillages ne concernent que la partie où les gens paient au comptant pour passer. Ceux qui utilisent leurs cartes Rapido n’ont pas ce problème. Il faut juste que le concessionnaire prenne ses dispositions pour sensibiliser les usagers et rendre fluide le trafic», dit-il. Non sans accuser Senac de faire du dilatoire pour ne pas procéder à cette baisse. «Le concessionnaire n’a qu’à prendre ses dispositions en mettant des balises ou sanctionner lourdement ceux qui se faufilent entre les files. Si on améliore le système de paiement, il n’y aura pas d’embouteillage. Et ça, c’est de la responsabilité du concessionnaire. Nous estimons que les tarifs doivent baisser, au moins de moitié sur chaque tronçon de péage, conformément aux revenus des Sénégalais», dit-il. Non sans indiquer qu’on ne peut pas continuer d’accepter qu’on crée deux catégories de Sénégalais : ceux qui sont riches pour emprunter l’autoroute de l’Avenir et la grande masse qui doit se consoler avec la Route nationale.
Seyni DIOP