CONTRIBUTION
Pourquoi les décisions concernant la gestion de l’eau ne se prennent pas au plus près du terrain en s’appuyant sur un partenariat avec l’Etat, les élus locaux, les citoyens, les associations, les usagers industriels, agricoles et touristiques ? L’heure est venue pour le Sénégal de pratiquer une gestion partagée et participative, fondée sur la recherche de solutions adéquates pour rendre efficient l’approvisionnement en eau de Dakar. Il est vrai que la législation sur l’eau au Sénégal ne prévoit rien concernant la coordination dudit secteur. Mais la tutelle doit, d’une part, occuper le terrain dans les zones sensibles plongées dans les affres de la pénurie d’eau pour y installer un contexte de communication entre les acteurs, de partage de connaissances et d’échanges itératifs et, d’autre part, s’atteler à réunir tous les acteurs de l’eau, leur donner la parole, leur déléguer une certaine responsabilité décisionnelle ; c’est la base même d’un système de gestion intégrée.
Nous sommes conscients que les installations de distribution et d’assainissement de l’eau coûtent cher en immobilisations, en entretien et en exploitation. Les usagers assument l’essentiel des dépenses liées aux investissements et au fonctionnement des équipements nécessaires à la gestion de l’eau. Cette imposition fait habituellement partie de la taxe foncière générale versée à la municipalité, rarement par une tarification spécifique. Or dans une perspective de développement durable, le paiement de l’eau revient en équité aux utilisateurs et aux pollueurs. Il serait souhaitable que la facture de l’eau soit distinguée pour une meilleure visibilité des coûts. Les pollueurs ne paient pas, comme ils devraient le faire, l’ensemble du coût de la pollution. L’intérêt public exigerait que les coûts sociaux et environnementaux de protection de l’eau soient compris dans le prix des produits et des services. L’information sur ces coûts devrait être entièrement accessible, afin que les consommateurs soient sensibilisés au paiement du juste prix pour l’utilisation du précieux capital naturel qu’est l’eau. Le principe pollueur-payeur amène à imposer des redevances qui devraient être calculées non seulement pour financer les programmes d’assainissement, mais aussi en fonction de la charge polluante produite par une activité.
La mise en œuvre progressive d’une fiscalité écologique encouragerait les pollueurs à supprimer ou à réduire leurs rejets dans l’eau. Ainsi, une taxe affectée à la pollution serait une façon équitable d’appliquer réellement le principe du pollueur-payeur. Les ressources dégagées ne devraient pas uniquement servir à réparer les dommages occasionnés par les activités polluantes, mais à les éviter. Pour être équitable, le régime des redevances doit s’appliquer à l’ensemble des formes de pollution rejetées, y compris les pollutions agricoles et les pollutions urbaines générées par les services municipaux d’assainissement.
La façon de gérer l’eau qui s’articule autour de composantes et d’usages séparés où chaque gestionnaire poursuit individuellement ses objectifs de développement, sans interaction, est complètement dépassée et obsolète, car elle ne permet pas de tenir compte des impacts cumulatifs des actions des uns et des autres. Mais cette situation n’est pas détectable par la tutelle puisque l’utilisation des outils de l’intelligence économique n’est pas de rigueur dans les instances de décisions. L’utilisation des outils de l’intelligence économique dans le secteur de l’eau aurait pu ressortir une gestion morcelée caractérisée par une absence de participation du public dans la planification des projets en eau et dans la prise de décision. Mieux vaut proposer une gestion intégrée dynamique.
Mika Ilou LY
Consultant en IE