CONTRIBUTION
«Il n’est nullement question, dans la décision de la Cour de justice de la Cedeao, de l’arrêt des poursuites ou d’ordonner la libération de Khalifa», précise le ministre de la Justice, Ismaïla Madior Fall. Le ministre minimise la décision de la Cour de justice de la Cedeao en faveur du maire de Dakar, Khalifa Sall et signale que «du point de vue strictement juridique et judiciaire, elle n’a aucun impact parce que cela ne remet pas en cause substantiellement la quintessence de la décision». Quand une décision de justice supérieure, en toute connaissance de la justice préalablement rendue au Sénégal, va jusqu’à émettre une amende de 35 millions à l’Etat du Sénégal, on ne peut pas dire qu’elle ne remet pas en cause la position juridique du Sénégal sur ce dossier.
Raisonnons par contradiction et considérons la décision de justice favorable au Sénégal, alors le ministre de la Justice et ses avocats l’auraient véhément approuvée. Maintenant que la décision n’est pas en leur faveur, il la réfute.
La sentence est du Coran, Sourate 83, Al-Mutaffifune (les fraudeurs) :
«Malheur aux injustes !
Qui, lorsqu’ils font mesurer pour eux-mêmes exigent la pleine mesure.
Et qui lorsqu’eux-mêmes mesurent pour les autres, causent leur perte.»
Par cette position, le ministre de la Justice est en flagrante contradiction avec la justice. Il place ainsi le Sénégal dans une phase de hors-la-loi. C’est comme si un Sénégalais s’entourant d’une force de contrainte refuse d’accepter une décision de justice nationale. Il devient automatiquement un hors-la-loi. La justice lui permet de faire appel mais pas de la remettre en cause par la force. Un Etat respectable aurait, dans le cas de Khalifa Sall, fait appel à la décision de justice de la Cedeao. Ensuite, il aurait versé cette décision de justice de la Cedeao dans le dossier actuellement en cours d’appel du Sénégal. Ainsi le Sénégal ne serait pas obligé de libérer Khalifa Sall sans avoir préalablement consulté sa propre juridiction supérieure.
Un ministre de la Justice doit être juste et impartial. Dans le cas contraire, il devient le ministre de l’injustice. Nous comprenons ses positions contradictoires ? car «ku la abal lamagne, nga wahal ko lou ko neex». Ce proverbe sénégalais n’est cependant pas vrai pour les personnes véridiques, les sentinelles de la vérité.
Professeur Youssou GNINGUE
Mathematics and Computer Science Dep.
Laurentian University, Ontario, Canada