Fringante et affable femme de média au Canada, adulée par les associations féminines du monde, Michaëlle Jean enfilant son écharpe de
Gouverneur général du Canada, avait été élue face à d’autres candidats, à la tête de l’organisation internationale de la Francophonie le 5 janvier 2015. À trois mois de la fin de son premier mandat, désarçonné et lézardé par la candidature de la Rwandaise, plébiscitée par les Chefs d’État de l’Union africaine, au sommet de Nouakchott, une seule et ultime épreuve s’impose à elle pour sauver l’honneur: jeter l’éponge avant l’humiliation en terre arménienne. Dessous des soubresauts d’une estocade.
Cri de joie à Kigali et dans plusieurs chancelleries rwandaises disséminées dans le monde. Le Sommet des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine, tenu à Nouakchott (capitale mauritanienne), a entériné la candidature de la ministre rwandaise des Affaires Étrangères. En quelques minutes, la messe était dite à l’image d’une procession du clergé avec la consigne de soutenir la candidature de la Rwandaise au poste prestigieux de Secrétaire Général de l’OIF (Organisation internationale de la francophonie) à la tête duquel se trouve la canadienne d’origine haïtienne, Michaëlle Jean, depuis le 5 mars 2015.
Deby, Kagamé, Moussa Faki et Ould Abdel Aziz enrôlent l’union africaine pour la candidature rwandaise
À trois mois de la fin de son premier mandat, Michaëlle Jean n’a jamais été si désarçonnée perdant du terrain et voyant les chances de sa reconduction à la tête de l’OIF, s’évaporer à grosses cheminées sur le toit des chapiteaux du sommet des Chefs d’État de l’union africaine. Après avoir soutenu avec succès la candidature de l’Éthiopien, M. Tedros, à la tête de l’Organisation mondiale de la santé, le Président de la Commission de l’UA, le Tchadien Moussa Faki Mahamat, s’est remis au velours. Pour lui, le temps de l’Afrique a sonné et il va falloir mettre le pied sur l’accélérateur pour imposer et soutenir les compétences et les candidatures africaines aux postes internationaux à pourvoir face aux autres régions de la planète. Il n’y a jamais un sans deux. L’union africaine a désigné et appuie la candidature de la ministre Rwandaise des Affaires Étrangères. Sans réserve. Avec vigueur et posture homogène à l’intérieur de l’organisation. Le tête-à-tête Kagamé- Michaëlle Jean le 22 avril 2018 à Genève (Suisse), n’a pas arrangé les choses. Selon des confidences parvenues à Confidentiel Afrique, l’homme fort de Kigali, recevant Michaëlle Jean, tenait entre ses mains les bonnes cartes. La candidature de son ministre des Affaires Étrangères était déjà dans la boite et devait être présentée aux Chefs d’État de l’UA à Nouakchott pour simple formalité d’usage. » Michaëlle Jean a de l’estime pour Moussa Faki et Paul Kagamé » reconnait notre source. En dépit de cette bérézina dans le dos, avalisée à l’unanimité par les Chefs d’État africains, Michaëlle Jean voit ses chances ainsi s’évaporer au fil des minutes, même si le Premier ministre canadien, Justin Trudeau minimise la position de l’Union africaine. Coup dur aussi pour le Canada qui contribue à hauteur de 25% au budget de l’organisation. Derrière la France dont le Président Emmanuel Macron, est en phase avec la position consensuelle de l’union africaine qui soutient la candidature de la Rwandaise au poste de Secrétaire Général de l’OIF.
Un bilan globalement positif défavorisé par la real politik
Michaëlle Jean a beaucoup visité l’Afrique. Ce continent est au cœur de son agenda. Stratégie ou calcul politique? Elle a été quasiment sur tous les fronts dans cette partie de la planète, portant la voix de la francophonie. À peine arrivée à la tête de l’OIF, Michaëlle Jean a consacré sa première visite officielle en terre africaine, plus précisément en Guinée, les 22-24 mars 2015. L’épidémie Ébola avait fini d’étaler son bilan tragique. Elle était à la chaudière. La patronne de l’OIF est allée rendre visite aux malades enlisés dans un bourbier sanitaire inextricable. À Conakry, les autorités ont tenu à la retenir pour qu’elle n’accède pas directement, en dépit de son engagement, aux patients malades. Puis cap sur la Centrafrique en 2017 où Michaëlle Jean s’est tapée un mini safari plus précisément en province ou sévit la guerre. Michaëlle Jean a apporté sa solidarité aux populations sinistrées. Cette visite avait été saluée par le pouvoir de Bangui. Après la Centrafrique, l’ex gouverneur général du Canada a multiplié les visites en foulant le sol nigérien, burkinabé, malien. Dans la même foulée, les pays insulaires africains lui ont réservé un accueil coloré. Mais la visite qui l’a marquée le plus est celle qu’elle a effectuée les 27-28 avril 2018 au siège de l’Union africaine, à Addis Abeba. Reçue par le Tchadien et Président de la Commission, Moussa Faki Mahamat, entouré de ses commissaires, son entretien avec Faki était détendu et très empreint de cordialité. Une source au parfum de cette rencontre, nous a révélé que le patron de la Commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat avait raccompagné Michaëlle Jean jusqu’à sa voiture après l’audience historique. Que s’est-il donc passé entre les deux patrons d’organisations ? En bon code, Moussa Faki Mahamat n’a fait que jouer la carte de la préférence africaine en compétition aux joutes internationales. Aussi simple que ça.
Michaëlle Jean zappe la Mauritanie, le Maroc et le Rwanda
Dans son agenda, la patronne de l’OIF à tort de ne pas s’être rendue à Nouakchott, au Maroc et à Kigali. C’est aussi révélateur de le penser, que Michaëlle Jean n’ait pas été bien conseillée par son shadow-cabinet. Le Rwanda, le Maroc et le Maroc sont devenus des puissances régionales dans des domaines respectifs. Kigali, puissance industrielle et économique émergente, Rabat, puissance diplomatique et économique au niveau de la région maghrébine et nonobstant Nouakchott s’impose comme une nouvelle puissance géopolitique sécuritaire sous-régionale incontestable. C’est justement au sommet de Nouakchott, que le sort de Michaëlle Jean a été en grande partie scellé. En clair, la patronne de l’OIF ne devra plus compter sur l’Afrique pour la reconduction de son second mandat au sommet de l’OIF à Érevan du 11-12 octobre 2018 en terre arménienne. Toutefois pour comprendre l’ampleur de cette friture diplomatique, actée à Nouakchott et qui électrocute le siège de Michaëlle Jean, il faut revenir sur le Sommet de la francophonie tenu à Dakar en 2015. La délégation mauritanienne qui voulait s’exprimer sur certains sujets s’est vue refuser la parole par l’etablishment de l’OIF. Tout simplement. Nouakchott qui n’avait pas apprécié cette façon de faire, attendait de pied ferme, prend sa revanche. Le sommet des Chefs d’Etat de l’UA qui s’est tenu sur son propre sol, offrait un cadre idéal aux autorités mauritaniennes de solder leurs comptes à l’OIF. Une sacrée gifle de Ould Abdel Aziz sur la joue de la canadienne, qui paie rubis sur ongle l’erreur ou l’oubli d’avoir zappé la Mauritanie. Idem pour le Maroc et le Rwanda, qui ont pris l’option de porter l’estocade à Michaëlle Jean. Cette dernière a manqué de réalisme diplomatique de n’avoir pas visité ces trois dernières années ces pays. Un oubli donc qu’elle paie cash. Pourtant, bon nombre d’habitués de l’auguste organisation basée en France se demandent encore comment Michaëlle Jean s’est-elle retrouvée subitement isolée par une large et grande partie d’officines diplomatiques internationales sérieuses. Un de ses illustres collaborateurs, en la personne de l’Administrateur de l’OIF, le brillant haut diplomate, le malien Adama Ouane, ancien Directeur de l’UNESCO à Hambourg (Allemagne), n’a rien vu venir. Lui, homme des dossiers délicats, que l’on présente comme un fonctionnaire discret, rigoureux et efficace. Le malien Adama Ouane, a pris fonction le 1er avril 2015. Il avait succédé au Québécois, Clément Duhamel. Avec cette candidature de la Rwandaise, plébiscitée par les Chefs d’État de l’Union africaine, au sommet de Nouakchott, une seule et ultime épreuve s’impose à l’évidence à Michaëlle Jean pour sauver son honneur: jeter l’éponge en décidant de ne plus rempiler à un second mandat ou subir l’humiliation extrême et son corolaire de supplice en terre arménienne. La balle est désormais dans son camp. Car, elle a encore du temps pour se décider.
ConfidentielAfrique