Recep Tayyip Erdogan a été réélu dimanche à la tête de la Turquie pour un mandat de cinq ans, le premier du nouveau régime présidentiel turc, qui accorde au chef de l’État des pouvoirs sensiblement renforcés.
Les autorités électorales turques ont confirmé lundi matin la victoire de M. Erdogan à l’élection présidentielle, dès le premier tour, malgré une campagne électorale marquée par la pugnacité de l’opposition.
Au grand dam de ses adversaires, l’actuel chef de l’État, qui règne sur la Turquie depuis quinze ans, n’avait pas attendu la confirmation officielle pour revendiquer la victoire : “Notre nation m’a confié la responsabilité de président de la République et le pouvoir exécutif”, a-t-il déclaré depuis Istanbul dans la soirée de dimanche, selon des propos repris par l’agence étatique turque Anadolu.
Selon l’agence, M. Erdogan aurait remporté 52,5 % des voix, suivi par son principal opposant, Muharrem Ince (30,7 %). Le candidat du parti prokurde, Selahattin Demirtas, a recueilli près de 8 % des voix en faisant campagne depuis sa cellule : accusé d’activités “terroristes”, il est emprisonné depuis 2016.
M. Erdogan a également remporté les élections législatives, avec l’alliance de son parti, l’AKP, et du parti nationaliste MHP, qui rassemblent près de 54 % des suffrages.
Il aborde donc son nouveau mandat en position de force, légitimé par une “participation massive, qui a dépassé les 87 %”, souligne Al-Jazeera. La chaîne arabe rappelle que les élections “ont été avancées de dix-huit mois par le Parlement” en avril dernier, M. Erdogan étant impatient d’étrenner un nouveau régime présidentiel taillé à sa mesure.
“Poursuite de l’omnipotence”
“Les élections de juin 2018 marquent le début d’une nouvelle ère dans le système turc, avec le basculement dans un régime présidentiel”, remarque Hürriyet Daily News. Une révolution décidée par M. Erdogan et adoptée par référendum en 2017, mais dénoncée par l’opposition, qui craint les dérives possibles d’un “superprésident”.
Le journal Cumhuriyet, qui raille dans ses colonnes la “poursuite de l’omnipotence” de M. Erdogan, souligne qu’avec la suppression du poste de Premier ministre, le président pourra notamment “former les gouvernements en nommant les ministres, gouverner par décret, décider de la politique sécuritaire et dissoudre le Parlement”.
Hürriyet Daily News observe également que ce changement fondamental dans le système politique turc survient alors que le chef de l’État “fait l’objet de critiques dans le reste du monde, pour avoir remis en cause plusieurs avancées démocratique, et pour ses divergences avec ses alliés occidentaux en matière de politique étrangère”.
Dimanche, alors qu’il glissait son bulletin dans l’urne à Istanbul, M. Erdogan a balayé les critiques et fait l’éloge du nouveau régime.
“La Turquie est en route vers une révolution démocratique”, a-t-il déclaré, selon des propos repris par le site de RFE–RL. “Avec le système présidentiel, la Turquie met la barre très haut, et se place au-dessus du niveau des civilisations contemporaines.”