CONTRIBUTION
«Assez bien», c’est l’appréciation voisine de la médiocrité que le ministre du Budget porte désormais sur l’état de la trésorerie du gouvernement. On en loin des phrases dithyrambiques de la semaine dernière vantant une «surliquidité» de l’Etat. Il est vrai que les précisions de l’ancien Premier ministre Loum ne laissent guère de place aux faux-semblants habituels. Il y a dans cet aveu un effort intéressant de conformité avec la triste vérité. Mais il reste très insuffisant. Que les caisses soient sèches, tout le monde le sait et d’abord les populations rurales confrontées à la mévente des arachides, au risque de famine des hommes et du bétail, … et aux menaces d’exactions proférées par les sous-préfets, un peu partout dans le pays, pour imposer le paiement de la taxe rurale. Mais aussi les bénéficiaires des bourses familiales qui accusent un retard de deux, voire trois trimestres ou les moniteurs des daara qui réclament sept mois de salaires impayés.
Il est paradoxal que cette sécheresse financière n’inspire pas au pouvoir marron une révision de ses stratégies électoralistes. A moins qu’obnubilé, privé de toute réactivité devant le désastre, il n’ait pas d’autre option que de persévérer dans sa routine. La question se pose au vu de la propagande effrénée entourant les 30 milliards de l’«entreprenariat rapide» que gère la DER. Ce programme apparaît comme le principal outil de l’action sur le terrain des responsables de l’Apr, que l’on observe en train de récolter des signatures sur des fiches et de récupérer des Cni et des certificats de résidence. Certains pensent à tort qu’ils s’occupent du parrainage. En fait, renseignements pris, il s’agit d’une tentative de fidéliser des groupes de dix jeunes ou femmes, en leur faisant miroiter une perspective de recevoir des prêts (et non des dons, mais le leur précise-t-on ?) compris entre 100 et 500 000 francs.
Le scandale de la confiscation partisane d’un programme normalement destiné à tous n’indigne personne, ce qui est tout à fait normal tellement le fait est devenu prévisible et banal, après l’expérience de la politisation des bourses familiales et de la Cmu. L’indignation risque cependant d’être au rendez-vous quand il faudra décaisser effectivement ces milliards, ce qui aurait dû intervenir depuis le mois d’avril, selon le plan annoncé. Les éventuels bénéficiaires vivront-ils les affres de ces groupements féminins auxquels ont été remis, devant les télévisions, des chèques «bel et bien provisionnés mais payables ultérieurement, on vous appellera le moment venu» ? Des chèques pas en bois, mais en caoutchouc, symboles de l’épuisement de la cavalerie électoraliste qui a fini d’éreinter les finances nationales.
Mamadou Bamba NDIAYE
Ancien député
Secrétaire général du Mps/Selal