CONTRIBUTION
Après avoir échappé de justesse à une année blanche au niveau des établissements scolaires, le système éducatif sénégalais se trouve confronté au niveau de ses Universités, à une nouvelle épreuve, qui confirme la grave crise, qui agite la politique éducative gouvernementale dans son ensemble. Il s’agit de la mort, dans des circonstances dramatiques, de Fallou Sène, jeune étudiant de l’Université Gaston Berger, dernier sur la longue liste des martyrs de l’École sénégalaise.
Il faut d’emblée préciser, que ce crime odieux, dont a été victime ce digne fils du Baol, ne peut nullement être expliqué voire justifié par une prétendue violence estudiantine. C’est bien le gouvernement qui abusant, toutes ces dernières années, de la violence d’État et s’inscrivant dans une démarche répressive, expose les forces de sécurité et l’ensemble du corps social à des risques insoupçonnés.
C’est parce qu’il a tardé à remettre à des milliers d’étudiants, issus pour la plupart de milieux modestes, les instruments de leur survie, à savoir leurs bourses, qu’on en est arrivé à ce drame. Il n’y a là rien d’étonnant de la part d’un gouvernement, qui bloque, depuis plusieurs mois, les salaires des contractuels de la Santé ainsi que les bourses des médecins en spécialisation, persécute les marchands ambulants, chasse les impactés du TER, réprime des élèves qui ne demandent qu’à étudier…etc.
Il ne nous reste qu’à espérer que l’enquête ouverte par le procureur de Saint-Louis permettra, une fois n’est pas coutume, d’identifier de présumés coupables de cette énième bavure – gouvernementale – pardon policière. Il n’en reste pas moins que la responsabilité politique de ce drame incombe à ceux-là, qui sont chargés de la définition et de la mise en œuvre des politiques publiques, à savoir le Chef de l’État et son gouvernement.
Ces derniers, outre leur incapacité patente et chronique d’assurer le paiement régulier des bourses estudiantines, doivent également rendre compte sur la violation des franchises universitaires et l’usage disproportionné de la violence d’État. En outre, il devient de plus en plus clair aux yeux de tous, que l’agitation sociale observée au niveau de nos établissements scolaires et universitaires, ces dernières semaines, est liée, d’une manière ou d’une autre, à des tensions de trésorerie au niveau du Ministère de l’Économie et des Finances, se traduisant par le non-respect des engagements financiers aussi bien vis-à-vis des syndicats de travailleurs qu’envers les établissements privés d’enseignements supérieur et les banques partenaires chargées de préfinancer les bourses estudiantines.
En réalité, le pouvoir est en train de payer pour ses insuffisances dans la priorisation des dépenses publiques et pour sa démarche électoraliste basée sur des infrastructures onéreuses et de prestige.
Le régime du président Macky Sall, dont les objectifs politiques ne dépassent pas l’horizon du deuxième mandat, voit sa base sociale s’effriter chaque jour un peu plus et pâtit aussi bien de l’impotence politique de son énorme coalition que de la déliquescence d’un parti présidentiel envahi par une meute de mercenaires transhumants. C’est pourquoi, il ne compte désormais plus que sur l’instrumentalisation des forces de défense et de sécurité, des pouvoirs législatif et judiciaire ainsi que sur la fraude électorale pour sa survie.
En tout cas, près d’un mois après le forcing marqué par le vote sans débat de la loi sur le parrainage, dans un contexte d’état d’urgence, les légitimes manifestations des étudiants de toutes les universités de notre pays viennent remettre les choses à l’endroit. Elles démontrent la vitalité des ressorts de l’indignation populaire et montrent les limites de la répression systématique de tous les mouvements de protestation populaire, à laquelle nous ont habitué les tenants du pouvoir.