CONTRIBUTION
Depuis mercredi, les enseignants ont commencé à puiser dans leur arsenal d’armes de destruction massive, notamment le boycott des compositions et examens. Après plusieurs mois de grèves et de manifestations, pas un seul franc ne leur est réellement acquis. Rien que des promesses déjà vieilles de quelques années. La perception de mépris qui en découle attise le feu de la contestation scolaire qu’alimentent aussi les épithètes répétées par les porte-parole du pouvoir : irresponsables, maîtres-chanteurs, etc.
«Les chiens aboient, la caravane passe !». Telle est en ce moment, selon tous les témoignages, la phrase-culte du Palais. Et, de fait, la philosophie de l’action présidentielle ne semble guère pouvoir enjamber ce dicton de trafiquant transsaharien. Il inspire son indifférence méprisante devant les appels unanimes de la société civile et des chefs religieux qui l’invitent à suspendre son projet de révision constitutionnelle pour donner une ultime chance au dialogue. Il se sublime dans l’image bien bavarde d’un président parti se «réfugier» à Paris, avec sa famille, après avoir posé partout ses bombes à retardement. Paris où est prévue le 20 avril une réunion autour de M. Macron sur un ordre du jour qui pourrait être inquiétant pour les populations ouest-africaines.
Le mépris est une pré-condition de la mystification. Car c’est manquer de respect à l’opinion nationale que d’orchestrer, autour d’un de nos Khalifes les plus estimés, la manipulation observée sur une prétendue levée du mot d’ordre de grève des enseignants. Ou de faire de l’ironie sur le «walaat» et le «genn wàllu walaat» après avoir obtenu de ses députés qu’ils tripatouillent la Constitution sans trembler. Et ordonné aux forces de l’ordre de matraquer sans retenue.
Mépriser, mystifier, matraquer, trois verbes conjuguant un style de gouvernance qui, depuis six ans, ne se préoccupe que de son propre maintien au pouvoir. L’absence de toute vision généreuse pour le pays a plongé l’Etat dans la banqueroute financière et asphyxié aussi gravement l’école que la santé.
Ce jeudi, nous avons vu à quel point les jeunes sénégalais ont appris à conjuguer à leur tour le verbe résister. Ce fut le début d’une offensive de dix mois dont la seule issue sera la victoire de la démocratie et de l’alternance. Car, dicton pour dicton, «tant va la cruche à l’eau qu’à la fin… la caravane casse» !
Mamadou Bamba NDIAYE
Ancien député
Secrétaire général du Mps/Selal