Wade et Macky abattent leurs cartes en direction de la présidentielle. Dans une sorte de poker à distance, chacun des deux pousse les pions dont il dispose.
L’élection présidentielle, c’est dans dix mois. Mais, comme on le dit dans la plupart de nos langues nationales, le dîner se mange la nuit mais se prépare pendant la journée. Pour l’avoir compris, chaque camp affûte ses armes et préfère surprendre plutôt que d’être surpris. Et là, toutes les combinaisons culinaires, même les plus improbables il y a quelques années, sont dans les recettes. Récemment, c’est Idrissa Seck qui a révélé avoir pris langue avec Karim Wade qui lui aurait dit travailler à des retrouvailles avec son père. Plus véloces que Lucky Luke et Usain Bolt, certains analystes en sont à en déduire que le Président de Rewmi serait le plan B du Pds, sans s’intéresser au côté verso de cette conjecture. L’un derrière l’autre, l’un avec l’autre ou l’un sans l’autre, ce qui est clair, c’est que l’axe Doha-Thiès va désormais au-delà d’une simple gageure. Reste à savoir comment l’appareil qui avait voté par acclamation la candidature de Karim Wade va avaler cette couleuvre. D’autant que les plus radicaux dans l’ancienne galaxie Wade ont toujours défendu que Karim ne sera pas candidat à la présidentielle. Pis, beaucoup parmi eux ne pardonneront jamais à Idrissa Seck d’avoir ouvert le premier front contre une troisième candidature de leur mentor. Mais, ça, c’était en 2012. Entre temps, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts.
De l’autre côté de la barrière, on ne s’en laisse pas compter. Jeudi, c’est Serigne Mbacké Ndiaye qui a rendu public le contenu d’une discussion informelle avec Samuel Sarr. L’ancien porte-parole de Wade qui a pris ses distances de ce dernier depuis belle lurette pour se rapprocher de Macky a révélé que l’ex-ministre de l’Energie sera candidat à la prochaine élection présidentielle. Comme Ndiaye, Sarr a aussi pris une longueur de retrait par rapport à son ancienne famille. Le «Wadiste éternel», homme d’affaires multicartes, est désormais réputé proche du couple présidentiel. Donc, sa candidature devrait relever d’une entente tacite avec ledit couple, pour dire le moins. Même si, ailleurs, on semble croire qu’il s’agit d’un pion de Wade. Pour simplement dire qu’en politique, toutes les hypothèses sont permises.
Seulement, il n’est pas saugrenu de se demander à qui profite la candidature de Samuel Sarr. Nous pensons qu’elle profite d’abord au pouvoir en place. Ce, pour deux raisons principales. D’abord, il faut se rappeler que sa main a été vue derrière beaucoup de listes de diversion lors des dernières législatives et dont on disait qu’elles étaient financées par le palais. Lui-même avait reconnu, dans nos colonnes, avoir «aidé» quelques amis qui en avaient fait la demande. Et ces «amis» se recrutaient, pour l’essentiel, dans les travées du pouvoir. Ensuite, la conquête de Touba est et demeure une lubie pour l’actuel régime qui, malgré ponts, châteaux d’eau et autoroutes, peine à s’installer dans le cœur des talibés mourides. Samuel Sarr, hormis sa casquette «Wadiste éternel», s’est toujours réclamé de Serigne Saliou Mbacké, défunt khalife. Alors, Samuel Sarr missi dominici de Macky pour la conquête de Touba ? Demain, il fera jour.
Ibrahima ANNE