L’Assemblée nationale a adopté, hier, le code général des impôts qui impose désormais le droit d’accise sur les jus de fruits en son article 411.
Un impôt indirect perçu sur la consommation qui inquiète certains députés de la majorité et de l’opposition. Selon ces derniers, cette disposition risque d’augmenter le prix de ces boissons.
L’Etat cherche par tous les moyens à renflouer ses caisses afin de faire face aux difficultés économiques et sociales que traverse le pays. Après avoir pressuré plusieurs secteurs, il a jeté son dévolu sur les produits alimentaires, notamment les jus de fruits transformés localement ou importés dont la consommation est de plus en plus importante. En effet, en modifiant le code général des impôts, l’Etat va appliquer aux jus de fruits un droit d’accise qui ne concernait jusque-là que les boissons gazeuses non alcoolisées ou encore la cigarette.
Devant les députés, le ministre de l’Economie, des Finances et du Plan, Amadou Bâ a tenté d’assurer les députés sur la nécessité de modifier le code général des impôts. Selon lui, cette modification prévoit la révision du dispositif normatif régissant les secteurs de la santé et de l’environnement. Lequel a pour objectif d’améliorer le cadre de vie et de favoriser des habitudes alimentaires saines. Pour ce faire, il est institué un droit d’accise sur l’utilisation des sachets en plastique qui constituent une source de pollution affectant tout l’écosystème environnemental. Il s’agit, selon lui, d’assurer un meilleur cadre de vie aux populations. De plus, il est prévu d’étendre aux jus de fruits le droit d’accise sur les boissons gazeuses non alcoolisées. Dans la même optique, le ministre annonce que le taux de la taxe sur le tabac passe de 45 % à 50 %. Ce qui permettra, à son avis, au pays de se conformer à la directive n°01/2017cm/Uemoa du 22 décembre 2017 portant harmonisation des législations des Etats membres en matière d’accise applicable aux tabacs.
Selon Amadou Bâ, l’objectif de cette réforme est de corriger les externalités négatives sur la santé et de l’environnement par l’utilisation de certains bien de consommation. En outre, il est également prévu dans la nouvelle réforme d’étendre le champ de taxation des droits d’accises aux véhicules de tourisme d’une puissance fiscale égale ou supérieure à treize chevaux et à tous les véhicules de tourisme de puissance fiscale moindre afin de lutter contre les effets induits par la pollution automobile.
Cependant, plusieurs députés se sont opposés à l’application de cet impôt indirect perçu sur la consommation. Pour le député de la majorité, Abdoulaye Makhtar Diop, élargir le droit d’accise aux jus de fruits emporte la conséquence d’augmenter le prix des denrées de première nécessité. «Je ne suis pas convaincu par l’argument développé dans le rapport qui veut faire une corrélation avec une prévention du diabète. Si, cela devrait être le cas, commençons par taxer le sucre en morceaux ou en poudre. Les jus de fruits ne sont plus une boisson de luxe. Ils entrent dans la catégorie des denrées de première nécessité», prévient-il. A l’en croire, il vaut mieux pour l’Etat d’augmenter le droit d’accise sur le tabac, les vins, les liqueurs et les boissons gazeuses. «C’est vrai qu’aujourd’hui la consommation du jus est exponentielle. Vous allez faire entrer beaucoup de recettes. Je pense qu’il faut qu’on aille vers d’autres niches. Taxer l’alcool, le petit vin. Allez à la Médina, tous les jeunes achètent du whisky à 100 francs Cf», a-t-il déclaré. Tout en assurant que la libre concurrence sur laquelle se base l’Etat pour atténuer le prix n’aura que des effets négatifs.
Se voulant plus précis, l’un des deux Grands Serigne de Dakar rappelle que depuis 1994, le pays a adopté une loi sur la libre concurrence qui n’a eu que des effets négatifs. «Nous sommes dans une année préélectorale. Je ne ferais pas partie de ceux qui défendront l’augmentation du prix au nom de la prévention sanitaire. On a d’autres moyens», clame-t-il.
Adama COULIBALY