Du roupillon, les députés en sont maintenant à masquer les carences en français d’un ministre en charge d’un secteur stratégique : l’Industrie.
Dans ce contexte de désindustrialisation où le Sénégal est devenu un souk, de nombreux industriels attendaient de Moustapha Diop des assurances et une stratégie de sauvegarde d’un tissu en état d’urgence. Mais pour lui éviter de massacrer encore la syntaxe, comme lors des discussions en commission technique, des députés ont adopté son budget sans débat.
Bonneteau budgétaire à l’Assemblée nationale. Si incroyable que cela puisse paraître dans ce contexte de déclin industriel, les députés ont adopté sans débat le budget 2018 du ministère de l’Industrie et de la Petite et moyenne industrie. Alors que le département change de mains à chaque remaniement ministériel, la représentation nationale n’a même pas jugé nécessaire de discuter du budget alloué au ministère de Moustapha Diop à qui on semble vouloir éviter tout débat pour masquer ses carences dans la langue officielle du Sénégal. Cela, comme on a, jadis, voulu humilier, à la Place Soweto, un certain Karim Wade dans la langue de Kocc Barma (le wolof), en le convoquant devant la représentation nationale. Tout le monde connaît la suite qui a été fatale au président de l’institution. Lequel avait nié cette tentative d’humiliation en bloc.
Pour éviter un débat vociférant au ministre de l’Industrie et de la Petite et moyenne industrie dont la presse a récemment fait échos des difficultés pour s’exprimer dans la langue de Molière, l’Assemblée nationale a décidé de faire passer comme lettre à la poste son projet de budget. Sans débat, on a ainsi fait passer le budget dudit ministère de 4 milliards 366 millions 128 mille 460 francs Cfa en 2017 à 6 milliards 402 millions 673 mille 160 francs Cfa en 2018. Par ce geste maladroit, les députés de la majorité tentent de masquer les erreurs de casting de leur «Patron» et donnent raison à tous ceux qui avaient soutenu qu’il s’était mal exprimé en français en commission technique, avant que le député Cheikh Seck ne le tire d’affaire. Ce qui n’était pas surprenant pour les journalistes qui ont cherché à lui arracher quelques mots lors des différentes manifestations de son ancien département, la Microfinance et l’Economie solidaire. Il a toujours renvoyé ces empêcheurs de tourner en rond vers son bras droit El Hadji Djily Mbaye Lô qui a toujours sauvé la face en évitant aux reporters de rentrer bredouille avec juste un discours officiel maladroitement lu lors de la cérémonie d’ouverture des travaux.
Traités aux petits oignons, avec les taxes payées pour la plupart par ces créateurs de richesses, les députés devraient au moins discuter des freins qui grippent la machine productive et faire des piqûres de rappel si nécessaire au secteur productif sénégalais dans ce monde de compétitivité. Ce qui leur permettrait d’envoyer un signal fort en leur montrant que leur sort les intéresse au moins. Mais, malgré les appels au respect du règlement intérieur de l’Assemblée nationale de l’honorable député Ousmane Sonko pour contrecarrer cette proposition de la 2ème vice-présidente de l’Assemblée, Awa Guèye, les élus de la majorité n’ont même pas voulu jouer les utilités. Pourtant l’industrie est en panne et l’activité en berne. Une récente étude de la Direction de la prévision et des études économiques (Dpee) révélait que la concurrence déloyale préoccupe plus de la moitié des industriels sénégalais face à un lot de mauvaises nouvelles.
De nombreux industriels auraient sans doute aimé entendre de la bouche de leur ministre dont ils attendent tant la stratégie, les mesures de sauvegarde de ce tissu affaibli.
Les Petites et moyennes industries également s’attendaient également à entendre les solutions du ministre pour sauver celles qui n’ont pas encore déposer le bilan. Car, malgré la mise en place d’instruments de financement comme la Banque nationale de développement économique (Bnde), du Fongip et du Fonsis, le taux de mortalité précoce de ces entités reste encore élevé. Personne n’a encore vu le début de la queue du commencement de leurs actions, si ce ne sont les efforts de la banque que dirige Thierno Seydou Nourou Sy qui a même tenté de ressusciter les minoteries du Baol du défunt marabout Khadim Bousso à Touba. Hormis cette lueur, beaucoup de ces petites industries vivotent si elles ne sont pas au bord de la faillite. Elles espéraient que le ministre leur dise comment il compte s’y prendre pour mettre de l’ordre dans les affaires, presque toutes carabinées.
Seyni DIOP