Arrive, regarde et puis s’en va. Tel pourrait être le résumé du passage de certains ministres à la tête de leur département.
Le temps de prendre leur marque leur ayant à peine été donné, ils n’ont pu se targuer de réalisations concrètes. Une instabilité qui n’épargne pas la Communication qui, en plus de changer régulièrement de patron, est trimbalée de ministère en ministère.
Entre communication et télécommunication, il n’y a pas qu’une analogie phonétique. Le Président Sall semble avoir tardé à s’en rendre compte. Après les avoir associées dans un même ministère au début de son magistère avec la nomination d’Abou Lô, le président de la République a jugé utile de les dissocier. En effet, le premier gouvernement, dirigé par Abdoul Mbaye, avait un ministère de la Communication, des Télécommunications et des Tic. Celui que beaucoup présentent comme un «Allemand» à l’intérieur du système sénégalais ne fait pas long feu et est remplacé par Cheikh Bamba Dièye. Entretemps, la dénomination du ministère avait changé. Il n’était plus question des Tic, mais d’Economie numérique. Seulement, le départ du gouvernement de l’ancien maire de Saint-Louis a inspiré une curieuse idée au chef de l’Etat : associer la Culture à la Communication dans un même ministère. Pour bien faire digérer cette sauce gombo, Macky Sall fait appel à Mbagnick Ndiaye et lui confie les clefs du département.
Avec la nomination de Mbagnick Ndiaye à la tête du ministère de la Culture et de la Communication, Macky Sall signe l’arrêt de mort du département de la Communication et laisse place à la confusion. Durant les trois ans qu’il a passés à la tête dudit ministère, Mbagnick Ndiaye s’est plus occupé de la Culture que de la Communication. Président de l’Union nationale des associations de langue (Unal), président de l’Union des associations culturelles sérères «Ndef Leng», vice-président de l’association «Aguène et Diambogne», Mbagnick Ndiaye a mis à fond la musique au point d’étouffer la Communication qui s’en est retrouvée inaudible. Heureusement qu’il y avait le code de la presse en gestation. Un projet qu’il a trouvé en place et qui empêche de dire qu’il a multiplié la Communication par zéro.
Une coquille vidée
Mais que pouvait bien faire Mbagnick Ndiaye ? Homme de culture, il a hérité d’un département dont l’une des composantes est sans contenu réel. Dans le site du gouvernement, il n’y a qu’une seule direction rattachée à la Communication (Direction des Technologies de l’Information et de la Communication). Un service qui ne donne guère d’informations quant à ses domaines de compétences et dont aucun des contacts n’est opérationnel. En fait, avec la mise en place des secrétaires d’Etat, surtout celui en charge de la Communication, le Président Sall a vidé ce département de sa substance. Ce qu’il y avait de consistant a été confié au secrétaire d’Etat en charge de la Communication. Un collaborateur, logé à la Présidence de la République, qui s’occupe plus de la communication du maître des lieux que de la Communication tout court. Et, sous la responsabilité de ce dernier sont placés la Radiodiffusion télévision sénégalaise, le quotidien national Le Soleil, l’Agence de presse sénégalaise… Et Mbagnick Ndiaye qui voulut se rebiffer et mettre la main sur ces directions s’est heurté à la volonté de Yakham Mbaye très à cheval sur ses prérogatives. Il va s’en suivre une opposition que le premier nommé a voulu minimiser. «Je profiterai de cette tribune, vous prenant tous à témoin, pour dire qu’il n’y a jamais eu de problèmes entre nous deux. Ce sont des vues de l’esprit. En tout cas, s’il est avéré qu’il y aurait quelques mésententes entre ministres et Secrétaires d’Etat, entre ministres et ministres Délégués, sachez que Mbagnick Ndiaye et Yakham Mbaye ne sont pas concernés», a expliqué l’homme de «Ndef Leng» qui, du reste, a peu convaincu.
Ce pilotage à vue n’est pas sans conséquence. A force de trimbaler la Communication, le département s’en est retrouvé sans archives. Au mois de mars dernier, quand l’Autorité de régulation des télécommunications et des postes (Artp) a mis sur la table la question des factures que le groupe Wal Fadjri lui devrait pour avoir demandé et obtenu des fréquences, le ministère de Mbagnick Ndiaye a été incapable d’en fournir les preuves. Pis, ses services ont demandé 24 heures pour mettre la main sur une demande que le Pdg de Wal Fadjri leur aurait adressée. Vingt-quatre heures durant lesquelles, le ministère est mis sens dessus dessous, sans que la moindre trace d’une facture ne soit trouvée. La recherche de cette facture inexistante a été d’autant plus difficile qu’entre temps, la communication avait été dissociée des Télécommunications.
Après avoir mis fin aux fonctions de Yakham Mbaye et déplacé Mbagnick Ndiaye, Macky Sall a remis en place le ministre de la Communication, des Télécommunications, des Postes et de l’Economie numérique. Ce, après trois ans d’errements.
Mame Birame WATHIE