Un troisième procès s’ouvre dans l’affaire Lamantin Beach, ce mardi, à la Cour d’appel de Saint-Louis.
Dans cette histoire de drogue sur fond de chantage, au préjudice de Bertrand Touly, tous les prévenus (Luc Nicolaï et Cie) comparaissent libres. Un renvoi du jugement est dans l’ordre du possible.
Après une longue péripétie, l’affaire Lamantin Beach refait surface. Cette fois, ça va se jouer à la Cour d’appel de Saint-Louis, sur ordre de la Cour suprême qui décide qu’un troisième procès va avoir lieu. Elle a auparavant cassé la décision de la Cour d’appel de Dakar, au motif que l’un des juges ayant participé aux débats n’a pas été présent au moment du délibéré. «En matière de cassation suivie de renvoi, la loi fait obligation à la Cour suprême, juridiction de dernier ressort dont les décisions sont insusceptibles de recours, de renvoyer à une autre Cour d’appel autrement composée», informe-t-on. Seulement, la perspective d’un renvoi du jugement est le sentiment le mieux partagé par les différentes parties prenantes au procès, aussi bien du côté de la défense (Luc Nicolaï et Cie), de la partie civile (Bertrand Touly) et sans doute même du ministère public. «Le dossier n’est pas encore en état d’être jugé», avance-t-on. Reste à savoir si la demande de renvoi qui sera formulée à l’audience de ce matin va connaître un écho favorable auprès des juges d’appel de Saint-Louis.
«Ils n’auront pas le choix si toutes les conditions ne sont pas réunies», déclame un autre camp, confiant que la requête va enregistrer satisfaction. En tout état de cause, il est de tradition qu’une «affaire nouvelle» fasse l’objet de renvoi pour diverses raisons, mais il y a eu des exceptions à la règle, dans plusieurs cas. A l’audience de ce mardi, tous les prévenus vont comparaître libre. Il s’agit de Luc Nicolaï, poursuivi pour «détention de drogue, association de malfaiteurs et complicité de tentative d’extorsion de fonds», au préjudice de Bertrand Touly, patron de l’hôtel Lamantin Beach. Le promoteur de la Petite côte a été élargi en faveur d’une libération conditionnelle controverse, après 15 mois de détention, à la Maison d’arrêt et de correction de Thiès, malgré l’appel interjeté par toutes les parties y compris le Parquet. Dernier détenu à recouvrer la liberté, Abdou Khadre Kébé a vu sa «demande de mise en liberté provisoire» accordée par les sages de la Cour d’appel de Dakar, après avis favorable de l’avocat général. Les employés de l’hôtel Lamantin Beach de même qu’un douanier sont aussi incriminés.
Pourquoi le dossier n’est pas allé en instruction
On s’achemine vers un troisième procès. Jugés par le Tribunal correctionnel de Dakar lors d’une audience spéciale, les trois prévenus ont été déclarés coupables «d’association de malfaiteurs, détention de drogue et de complicité de tentative d’extorsion de fonds». En première instance, Luc a été condamné à 5 ans de prison dont 3 ans avec sursis. Reconnu coupable de «tentative d’extorsion de fonds et d’atteinte à l’administration de la Justice», le douanier Abdou Khadre Kébé a été condamné à la même peine, en plus d’une amende de 100 000 FCfa. Quant à Djibrine Diop, employé de l’hôtel suspecté d’avoir participé au coup contre Touly, il a pris 1 an et 6 mois ferme avec une amende de 6 millions. Jugé à nouveau par la Cour d’appel, en janvier 2016, Luc Nicolaï, reconnu coupable, a écopé la même peine assortie d’une amende de 500 millions. Mais il n’est jamais retourné en prison, ce qui a étonné nombre d’observateurs qui se sont demandé qui protège Luc. Une situation que ses avocats ont inscrite sur le compte d’un «recours suspensif». Si ce dossier n’a pas atterri devant la Chambre criminelle (ex-Cour d’assises), c’est parce que la quantité de drogue trouvée dans le bureau de Touly est 50 grammes de cocaïne. Or, celle-ci doit être égale ou supérieure à un kilogramme, comme le prévoit la «loi Latif Guèye portant criminalisation du trafic de drogue». Pourtant, le dossier était bien parti pour être criminalisé, car il a auparavant été confié au doyen des juges de Thiès. Mais celui-ci sera dessaisi par la Cour suprême, au profit de son collègue de Dakar, suite à une «requête en règlement des juges» introduite par Me Ciré Clédor Ly, avocat de Touly. Motivation de ce recours : «Lorsque la Cour suprême est saisie, ne serait-ce que pour une bonne administration de la Justice, le Tribunal des flagrants délits de Thiès devait se garder de rendre une décision et attendre celle de la juridiction supérieure». Au final, les charges seront amoindries et le crime de trafic disqualifié en délit de simple détention.
En résumé, il s’agit, dans ce dossier, d’une histoire de drogue sur fond de chantage au préjudice de Bertrand Touly, patron de l’hôtel Lamantin Beach qui a fait un éphémère séjour en prison.
Pape NDIAYE (Walf Quotidien)