Que cela suffise ou pas à le maintenir au poste, Dionne aura été un Premier ministre de rêve pour Macky Sall. Sans vagues, sans ambitions démesurées mais avec un égo dimensionné aux désirs de son patron, le troisième Premier ministre de Macky aura été l’homme qu’il fallait.
Il aura passé trois ans à la Primature. Un record sous le règne de Macky qui, jusqu’à la nomination de Mahammed Dionne, le 6 juillet 2014, en aura «bouffé» deux. Soit, en moyenne, un Premier ministre tous les douze mois. Cette longévité, cet homme né à Gossas, le 22 septembre 1959, le doit, outre ses diplômes et autres parchemins académiques, à ce petit plus qui séduit dans le curriculum vitae caché de tout postulant à l’emploi. Mahammed Boun Abdallah Dionne -ou Dionne pour faire court- a les qualités de ses prédécesseurs sans avoir leurs défauts. Il a le parcours qu’il faut, les diplômes, l’expérience de banquier central -il était cadre informaticien à la Bceao- de la haute administration publique où il a été directeur de l’industrie. Cerise sur le gâteau, il connaît les rouages des cabinets pour avoir roulé sa bosse comme directeur de cabinet du Pm ainsi que du Président de l’Assemblée nationale, Macky Sall.
Les postes internationaux, il les connaît pour avoir, lors de la traversée du désert de Macky, monnayé ses talents à Vienne, au siège de l’Onudi.
Tout ça fait beau dans un pedigree. Mais, ne suffit pas. Dionne, c’est le gendre idéal, que dis-je le Pm idéal, celui à qui on donnerait le poste sans confession. Il est effacé. Les présidents de la République aiment trouver cette qualité chez leur Pm. Une qualité qui fait que vous pouvez lui confier les clés de votre bureau sans craindre un coup derrière. Il ne fait pas de vagues. Depuis son arrivée à l’ex-Maison militaire, son nom n’a été mêlé dans aucun coup tordu en direction du Palais. Autre qualité, il n’est pas ombrageux. C’est le genre de Pm que le président de la République peut piétiner sans s’en rendre compte. S’y ajoute que, sauf à cacher son jeu, Dionne ne nourrit aucune ambition pour le fauteuil présidentiel. En somme, les défauts de ses prédécesseurs. Si Abdoul, illustre inconnu au bataillon, avait séduit le Président nouvellement élu, Mbaye, le Pm, avait irrité Macky et ses collaborateurs au plan psychologique, en ce sens qu’on était en plein dans une guerre des égos. L’ancien Dg de la Bhs, à 30 ans, de la Bst, de la Cbao, fils du légendaire Kéba Mbaye, ne pouvait se mettre dans le petit costume du «collaborateur». Ce qui devait arriver arriva. Prenant prétexte d’un «pays bloqué» par un tandem de banquiers (Abdoul Mbaye-Amadou Kane) qui pédalent dans la choucroute, Macky rompt le contrat.
Puis, arrive Aminata Touré. Comme pour dire que le rythme d’exécution des directives présidentielles était lent, Mimi, comme on l’appelle familièrement, se donne pour mission d’«accélérer la cadence». Le refrain fait mouche. L’humoriste Kouthia s’en donne à cœur-joie et lui dédie une danse. Seulement, à l’œuvre, Mimi démontre qu’elle n’est peut-être pas le Pm qu’il faut à Macky. Sa forte personnalité crée une épaisse fumée dans ses relations avec le Palais. Légitime parce que présente dans l’équipe de départ de l’Apr, directrice de campagne du candidat Macky Sall, elle s’oublie dans les initiatives et s’offre une grosse marge de manœuvre. Les faucons du Palais décèlent les germes d’une dualité au sommet qui prit fin quand Macky décide de la faire remplacer par Dionne. Parce que, avec lui, c’est comme dans l’armée : les ordres, on les exécute sans murmures. Il s’y attèle et prend même le risque de conduire la campagne victorieuse de Benno aux législatives. Que cela suffise ou pas à le maintenir au poste, Dionne aura été un Premier ministre de rêve pour Macky Sall.
Ibrahima ANNE (Walf Quotidien)