C’est la traite pour certains Sénégalais durant cette campagne pour les législatives. Etant partout et nulle part à la fois, des militants gonflent les caravanes des candidats pour espérer glaner quelques billets. A Kolda, ces types de personnages sont nombreux dans les meetings et dans la rue.
Depuis deux heures, Demba, 30 ans environ, est à bord de sa motocylindrée. Il est à la tête du cortège de Cheikh Tidiane Gadio, qui a sillonné, en début de semaine, les rues de Kolda. Mécanicien de profession, il participe à la campagne pour les législatives d’une manière bien particulière. «Je me mêle rarement à des activités politiques. Mais, aujourd’hui, j’accompagne Cheikh Tidiane Gadio parce que mon ami, un responsable politique de son parti, m’a invité à faire partie de sa caravane». Quelle est la contrepartie de la présence de Demba à la caravane de l’ancien ministre des Affaires étrangères ? «Mon ami s’est présenté à mon atelier pour me remettre dix mille francs Cfa. Il nous a dit, mes deux camarades et moi, de mettre du carburant et de venir faire le tour de la ville en compagnie de Cheikh Tidiane Gadio. Nous avons acheté 4 mille francs de carburant. Puis, on s’est partagé le reste de l’argent. Cela fait le compte car je ne pouvais pas gagner autant d’argent, à attendre pour le reste de la soirée à ce qu’une personne vienne me demander de réparer sa moto», explique, tout sourire, le jeune, vêtu de sa tenue de mécano. Le coût de la réparation d’une moto varie entre 500 francs et 2 500 Fcfa, en fonction de la gravité de la panne. Demba estime que les candidats à la députation défendent leur cause. Et lui, aussi, a sa cause à défendre. «C’est comment faire pour avoir de l’argent à rapporter chez ma famille», lance-t-il, avant de remettre en marche le moteur de sa moto poursuivant ainsi le chemin de la caravane. Entre ceux qui votent et ceux pour qui les électeurs votent, c’est le trompe-qui-peut.
Avec le nombre de candidats qui traversent les villes, des Sénégalais ont eu le malin plaisir de se remplir les poches. «Je cherche 100 mille francs Cfa avant la fin de la campagne. Donc, chaque candidat qui arrive, je l’accompagne. Je ne suis là que pour mon ventre. D’ici le 29 juillet, j’aurais ce que je cherche», lance une dame qui a requis l’anonymat. Vêtue d’un tee-shirt rouge, portant des colliers autour des reins, avec ses chaussures rougies par l’asphalte, la dame déborde d’énergie. Elle applaudit, chante, saute, danse. Tout ça pour espérer glaner quelques billets chez son candidat du jour. En attendant la fin de la campagne, elle affirme avoir reçu de l’argent dont elle refuse de révéler le montant.
Dialiba, lui aussi, fait partie des gens qui sucent les candidats à la députation. Lundi, il faisait partie de la caravane de Gadio dans les rues de Kolda. Mardi au stade régional de Kolda, vêtu de son grand boubou vert, il était au centre du meeting de Benno Bokk Yaakaar. «Mon seul souci, c’est comment faire pour soutirer de l’argent à ces candidats qui roulent dans ces belles voitures», lance-t-il, précisant qu’il vient de prendre femme. Et que, pour lui, la campagne est une belle occasion pour se remplir les poches. «Tu peux m’aider à les rencontrer?», taquine-t-il le reporter de Walf Quotidien. Jusqu’à présent, il n’a pas eu de réponse. Ces types de Sénégalais sont sans doute nombreux dans les caravanes des candidats à la députation. Le jour du scrutin sera révélateur de la sincérité de ces militants occasionnels.
Walf Quotidien