Le président de l’Alliance des forces de progrès (AFP) devra batailler ferme lors des prochaines législatives pour espérer siéger à l’Assemblée nationale et renouveler son poste.
Il lui faudra plus que casser la tirelire pour convaincre les habitants de Nioro qui n’ont plus revu l’homme politique depuis le premier tour de la dernière présidentielle.
Après avoir sondé l’opinion et le principal concerné, le président Macky SALL est allé jusqu’au bout de sa logique. Pour être député de la prochaine législature, Moustapha NIASSE devra gagner le département de Nioro où il a été investi tête de liste départementale de la coalition Benno Bokk Yaakaar (BBY). Il a fallu l’y mener subtilement. Acculé et poussé à décliner ses ambitions, NIASS joue à l’allié fidèle totalement désintéressé. C’était le 22 avril 2017. Devant les journalistes, il déclare : «J’ai 77 ans et 5 mois, je ne suis candidat à rien. Si on a besoin de moi pour une mission, je peux essayer. J’appartiens à une coalition. Je soutiendrai Macky SALL (…) tant que je vivrai et tant qu’il n’aura pas fini son deuxième mandat. La citoyenneté ne se repose pas. Mais une fois encore, je demande rien, je n’attends rien, je n’espère rien, je ne me dispute rien avec personne». Suffisant pour que, une semaine plus tard, le 1er mai 2017, quelques responsables de Benno Bokk Yaakaar, qui n’a jamais existé réellement à Nioro, se réunissent et à l’unanimité le désignent comme le leader naturel de BBY dans la localité. Et le tour est joué. Macky SALL le confirme tête de liste à Nioro.
Le temps où Moustapha NIASS se faisait appeler « sa Madiabel » semble révolu. Le leader de l’AFP, qui par le hasard d’un nom de famille bien clinquant dans les oreilles des administrateurs colons, a toujours vu son étoile briller au-dessus de sa tête lui ouvrant toutes les portes de la République. De SENGHOR à SALL en passant par DIOUF et Me WADE, et même bien avant ces chefs de l’Etat, le Sénégal a toujours bien pris soin de lui. Du haut de ses 1m 82, Moustapha NIASS, alors simple étudiant, faisait déjà la fierté de tout Keur Madiabel, heureux d’avoir un fils aussi calé. L’énarque a presque gravi tous les échelons. Directeur de cabinet de SENGHOR, bien avant la naissance d’Emmanuel Macron, ministre puis Premier ministre d’Abdou DIOUF, Premier ministre sous WADE, il atterrit à l’Assemblée nationale douze ans plus tard.
Seulement, les affaires de l’Etat ont fini de rompre le lien affectif entre Moustapha NIASSE et son Keur Madiabel natal. Embourgeoisé, souvent entre quatre avions, Moustapha NIASSE, comme s’il ne pouvait plus supporter la chaleur de Kaolack, tourne le dos au Saloum et ne s’y rend qu’en de très très rares occasions. Contrairement à son ancien camarade de parti, Ousmane Tanor DIENG, qui se réserve toujours le temps d’aller tâter le pouls des populations de Nguéniène, NIASSE, lui, ne se rend à Keur Madiabel que lorsqu’une présidentielle est en ligne mire. Le temps où après avoir quitté le Parti socialiste et fondé l’AFP, il se faisait accueillir par des milliers de populations grandement acquises à sa cause est si lointain. Comme s’ils avaient fini de comprendre que Moustapha NIASSE n’était intéressé que par leurs suffrages, ces dernières, depuis les législatives de 2007, que le leader de l’AFP avait boycottées, se sont trouvés d’autres leaders beaucoup plus accessibles. A la présidentielle de 2007, avec 5,93 % des suffrages exprimés, l’ancien ministre des Affaires étrangères que Me WADE a trouvé des adversaires parmi les plus influents de la localité était tombé de son piédestal. Avec les législatives du 30 juillet prochain, ce n’est pas simplement son avenir politique dans la localité qui est en jeu. Battu à Nioro, comme beaucoup s’y attendent, NIASSE n’aurait plus qu’à anticiper son départ à la retraite.
Toutefois, il ne faut guère vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Et ses adversaires ont grandement intérêt à prendre très au sérieux le vieux routier. Avec 500 millions de nos francs de fonds politiques, pendant 5 ans, NIASSE n’a pas perdu ce qui participait à fonder son leadership dans le landerneau politique sénégalais. Même s’il a déserté le Saloum, il y compte toujours de nombreux souteneurs. La bataille de Nioro est partie plus être des plus épiques.
Mame Birame WATHIE