Les autorités mauritaniennes partent en croisade contre les réseaux sociaux, présentés comme des outils représentant un danger pour l’unité nationale et la cohabitation des communautés.
Et ce, à quelques semaines de la tenue d’un référendum pour l’adoption d’un projet de révision constitutionnelle.
Facebook, Whatsapp, Twitter, Instagram, autant de réseaux sociaux dont se méfient grandement les autorités mauritaniennes qui les considèrent comme des outils «de subversion» contre l’unité nationale, la tranquillité et la vie privée des musulmans.
Une position qui a été exprimée samedi soir, sans nuance et même avec une belle certitude par le ministre des Affaires islamiques, Ahmed Ould Ehel Daoud, devant une brochette de personnalités parmi lesquelles figurait le président de la République, Mohamed Ould Abdel Aziz.
«La Charia interdit d’user de ces médias (réseaux sociaux) pour porter atteinte à l’unité nationale, à l’harmonie de la société, ou la vie privée des musulmans», a-t-il expliqué.
Une thèse appuyée également par l’imam de la plus grande mosquée de Nouakchott, Lemrabott Ould Habibou Rahmane. En outre, plusieurs autres imams, proches du pouvoir, ont fait de ce thème un sujet de prêche pour la grande prière musulmane du vendredi.
Cette présentation orientée des réseaux sociaux, car complètement à charge, intervient dans un contexte de précampagne pour un référendum en vue de l’adoption d’une révision constitutionnelle, prévu le 15 juillet prochain.
En arrière-fond de ces réformes, plusieurs hauts responsables gouvernementaux évoquent également la possibilité d’un troisième mandat pour Mohamed Ould Abdel Aziz, ou tout au moins «le maintien du système actuel au pouvoir».
Cette dernière formule plutôt vague a été employée par le Premier ministre, Yahya Ould Hademine, qui était en tournée à l’intérieur du pays la semaine dernière.
Elle a suscité des réactions vives au niveau des réseaux sociaux. Peut-être une raison pour les autorités de tenter de museler ces réseaux à la veille de cette échéance électorale cruciale pour l’avenir du président Mohamed Ould Abdel Aziz.Il faut souligner qu’ailleurs dans le monde, les réseaux sociaux ont souvent servi à la mobilisation des populations contre les régimes autoritaires.
Dans le cas de la Mauritanie, ces outils véhiculent également de nombreux messages de protestations contre «l’exclusion des populations originaires de la vallée du fleuve et des Haratines».
Interpellé au sujet du nouveau discours des autorités contre ce phénomène, Sneiba Ould Kowry, journaliste, chargé de communication de l’ONG SOS Esclaves, explique «depuis quelques semaines, les Mauritaniens constatent avec surprise et désolation l’existence d’un discours dangereux, véhiculé à travers des messages publiés sur les réseaux, appelant à la haine communautaire et raciale.
«De mon point de vue, il s’agit d’une tentative de certains groupes extrémistes, issus principalement des communautés maures blanches et haratines. Toutefois, d’autres hypothèses attribuent ces enregistrements aux services spéciaux, tentant de détourner la population de ses difficultés quotidiennes».
De là à vouloir museler les réseaux sociaux, il n’y a qu’un pas que le gouvernement n’hésitera pas à franchir dans le contexte actuel si cela l’arrange.
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