Plus de 6200 tonnes de riz entier blanc peinent à trouver preneur dans les rizeries de la vallée.
Impuissants, les commerçants sénégalais ne savent plus quoi faire du stock entre leurs mains et craignent de perdre leur crédibilité auprès des banques qui commencent à s’impatienter.
C’est le désarroi chez des producteurs de riz de la vallée du fleuve Sénégal. Les efforts entrepris, pour la réalisation de l’autosuffisance en riz en 2017 commencent à donner des fruits. Seulement les riziculteurs, peinent à écouler leur récolte. Ainsi, les protestations se multiplient, puisqu’ils ne savent plus où donner de la tête devant leurs importantes quantités de riz, pourtant de qualité supérieure. Chez eux, trouver un acheteur régulier relève d’un véritable parcours du combattant. Cette situation constitue un obstacle pour eux et pourrait les décourager à s’engager dans la culture en contre-saison pour cause d’insolvabilité auprès des banques.
Mamadou Mbodj alias le Vieux, producteur et commerçant à Richard Toll a du mal à cacher son inquiétude devant l’attitude des sénégalais qui, dit-il, «préfèrent consommer le riz brisé importé, de mauvaise qualité, et délaissent le riz entier de bien meilleure qualité». Ce sentiment, Mamadou Mbodj le partage avec madame Korka Diaw, gérante du GIE Malal Poulo Diaw, elle aussi productrice de riz dans la vallée du fleuve Sénégal. Dans sa famille, on est agriculteur de père en fils.
“Au moment où nous parlons, nous disposons de 500 tonnes de riz blanc dans notre unité de transformation et presque la même quantité de riz paddy. Le problème, c’est que les commerçants n’osent plus acheter à cause des difficultés liées à l’écoulement”, a-t-elle expliqué. Malheureusement, regrette-t-elle, “c’est le cas de tous les grands producteurs de riz dans le Walo”.
Culturellement, la majeure partie des familles sénégalaises préfèrent le riz brisé au riz entier. Dans une boutique de la place, Pape Diop, un jeune père de famille habitant au quartier Hersent, dans la région de Thiès le confirme. «Tous les mois, j’achète un sac de riz brisé de 50 kg pour la famille parce qu’il a meilleur goût», dit-il avec assurance.
S’exprimant à l’occasion de l’atelier de consolidation du Comité interprofessionnel du riz (Ciriz), Mame Birame Ndiaye, un producteur, a soutenu que «nos braves femmes préfèrent le riz brisé». Cette situation est anecdotique selon Charles Large, secrétaire général du Comité inter-professionel du riz (Ciriz), d’autant plus que, “dans tous les pays du monde, les populations consomment le riz entier qui est meilleur que celui brisé qui n’est qu’un sous-produit”. Les professionnels de la filière rizicole ont donc un véritable travail de sensibilisation à faire auprès des consommateurs qui gagneraient à changer leurs habitudes alimentaires.
Toutefois, Alioune Sarr, ministre du Commerce, avait annoncé, lors d’une réunion avec le comité de commercialisation du riz, la suspension de l’importation du riz entier. En prenant ces mesures, le gouvernement sénégalais cherche à permettre aux producteurs d’écouler plus de 6212 tonnes de riz blanc stockés dans les rizeries et le 3000 tonnes dont disposent les commerçants.
Afin d’accompagner les producteur dans cette bataille qui n’est pas gagnée d’avance et inciter les consommateurs à adopter le riz entier local, le gouvernement devrait imposer une norme de qualité de riz. «C’est une norme qui doit être partagée par l’ensemble des acteurs pour satisfaire les préoccupations des consommateurs», selon toujours Mame Birame Diouf. Néanmoins, l’espoir est tout de même permis car, «le riz entier est en train d’entrer dans les habitudes alimentaires sénégalaises au détriment des autres qualités de riz qui sont des sous-produits», a rassuré Charles Large.
Le 360