La cité du rail a abrité samedi dernier le premier congrès du parti Visa. Un congrès d’orientation et d’investiture en marge duquel le président de ladite formation politique a jeté un regard critique sur la politique menée par le régime de la seconde alternance.
En effet, face à la presse, Déthié Diouf a vertement déploré le non respect des engagements que le pouvoir en place avait pris avec le coalition Manko Wattu Senegaal quant à la mise en place d’un nombre suffisant de commission pour faciliter les inscriptions sur les listes électorales. «Les Sénégalais éprouvent d’énormes difficultés pour s’inscrire sur ces listes. Trois personnes ont déjà perdu la vie pour simplement se faire inscrire. Une situation dramatique qui n’est que la résultante de l’insuffisance des commissions. Car en lieu et place des trente commissions que Thiès attendait, seules 19 sont en place», affirme Déthié Diouf qui invite le chef de l’Etat à revoir à la hausse le nombre de commissions pour passer de 500 à 700 voire 1 000 conformément aux engagements qui avaient été pris avec la coalition Manko.
Quid de la décision unilatérale de reporter la date des élections législatives au 30 juillet prochain ? Déthié Diouf dit comprendre ce report comme une volonté manifeste du régime d’empêcher les élèves de terminale et les enseignants impliqués dans l’examen du Bac de prendre part au scrutin. Car à cette date, les élèves seront en pleine période d’examen. «Nous ne pouvons pas comprendre qu’on puisse déjà, dans un premier temps, exclure des jeunes qui sont en âge de voter. Surtout que, suite à l’audience avec Mankoo Wattu Senegaal, un décret avait été modifié pour intégrer les jeunes qui n’avaient pas encore de carte d’identité».
Le responsable en chef de Visa s’est aussi penché sur la lancinante question de l’emploi des jeunes. Une question qui, selon lui, n’est pas prête de connaître une solution. En effet, dit-il, ce problème d’emploi des jeunes ne se résoudra jamais tant qu’on fixera des objectifs de 600 à 700 milliards de francs Cfa de recettes douanières. «Le rôle de la douane c’est de prélever une petite portion des produits de l’extérieur qui entrent dans le pays. Et donc pour atteindre un tel objectif, elle est obligée de laisser passer autant de produits possibles. Ce qui se traduit par une transformation du marché intérieur en bazar avec comme conséquence une difficulté réelle d’écoulement de la production locale», souligne le leader de Visa. Toutes raisons qui l’amènent à demander que l’on change de paradigme pour regarder un peu ce qui fait dans les pays développés. Car aux Etats Unis, le taux fixé est inférieur à 1 %, en France ce taux se situe aux environs de 2 %. Alors se pose la question de savoir pourquoi au Sénégal la barre est allé jusqu’à 30 %. Et Déthié Diouf d’estimer qu’au lieu de cet objectif sur les recettes douanières, l’Etat gagnerait à aller dans le sens d’un transition fiscale en promouvant la Taxe sur la valeur ajoutée (Tva). Pour ce faire, il suffira tout simplement de renforcer les entreprises nationales et leur permettre de créer de la valeur ajoutée. Ce qui permettra de créer des emplois pour les jeunes. Car, dit-il, avec cet objectif de 700 milliards de francs de recettes douaniers l’Etat perd plus qu’il ne gagne.
Le dernier point soulevé est relatif à la récente démission de ce magistrat qui dénonce une situation de dépendance de la justice loin d’honorer ce pays. Une dénonciation que lui, Déthié Diouf, juge fondée. «Nous pensons que c’est la réalité. La politique commande tout dans ce pays». Or, poursuit-il, «nul doute que le fait d’accepter d’être toujours à la traine de la politique politicienne ne peut qu’être nuisible à la bonne marche de la société.» Par conséquent, dit-il, «il est grand temps d’aller vers une introspection tant au niveau de la magistrature, l’Etat que des citoyens pour que cette démission puisse servir de déclic et permettre d’amorcer un élan de redressement de la barre pendant qu’il est encore temps.»
Sidy DIENG