« Parfois Dieu fait sortir une personne de ta vie pour te protéger, ne lui cours pas après. »
Malick : A Dieu
Je regarde encore une fois ma montre, il est 21 h et les gens sont toujours là. Je ne sais pas ce qu’ils attendent pour partir. La fatigue commence à me gagner et je ne parle même pas pour Aicha. La dernière fois que je l’avais aperçu, elle semblait pâle. Ma sœur Oumi m’a raconté l’incident qui s’est produit entre Aicha et maman. Je dois dire que je suis fier d’elle, moi qui croyait que s’était une peureuse. Elle vient de me montrer que non seulement elle peut tenir tête à maman la guerrière, mais en plus qu’elle respecte mes directives. Nous avons fait un baptême comme moi je l’ai voulu sans entrer dans le folklore et le m’as-tu vue. Encore une fois, elle gagne beaucoup de point.
Je me lève, pour aller à sa recherche. Quand je passe devant le jardin, je me fige en voyant ma petite sœur Astou rire aux éclats. Ça doit faire des lustres que je ne lui avait pas vu rire, alors je m’approche pour voir l’homme dans l’ombre qui a produit ce miracle.
Moi (surpris) : Menoumbé ? Qu’est-ce que tu fricotes comme ça avec ma petite sœur. Cette dernière, ouvre grand les yeux et recule de deux pas.
Menoumbé (sourire exagéré) : ha c’est toi. Vient ici dit – il en me tirant le bras. Donc, la fille qui se cachait là sur des habits bizarroïde était en fait une princesse. Je me tourne vers ma sœur, c’est vrai qu’aujourd’hui, elle est bien sapée et bien maquillée.
Moi (essayant d’être sérieux) : Serais – tu en train de la draguer.
Astou (paniquée) : Il faut que je vous laisse, heu je je…
Moi (lui retenant la main) : Non non, reste ma belle et amuse toi bien. Quant – à toi, je t’ai à l’œil dis – je à Menoumbé en lui tirant l’oreille. Il me répond par un grand sourire, en tapant les mains comme un enfant. Je les quitte tout heureux, si Menoumbé peut ramener le sourire à Astou, alors je serais le premier à donner mon avale. Depuis cette fâcheuse histoire avec cet homme qui l’avait mis en clop avant de détaler, elle n’a plus jamais été la même. Elle s’est complétement refermée sur elle-même. J’ai tout fait mais c’est comme si elle n’était plus de ce monde. Peut – être la joie pétillante de Menoumbé sera son antidote. En tout cas, je l’espère.
Je cherche Aicha du regard en souriant toutes ses têtes que je ne connais pas. Quand je vois Abi, elle me dit qu’Aicha est dans sa chambre puisqu’elle était fatiguée. Avant d’entrer dans sa chambre, Oumi m’intercepte.
Oumi (sourire) : Maman part avec sa délégation, tu peux venir avec Aicha lui dire au revoir ?
Moi (visage ferme) : Dans l’état ou je suis, j’ai peur de lui dire quelque choses que je vais regretter après. Alors s’il te plaît présente-leur une excuse de notre part. Elle me regarde silencieusement un moment avant d’acquiescer la tête et de partir.
Quand j’ouvre la porte de la chambre et que nos regards se croisent, c’est un sourire partager qu’on se lance. Je ne dis rien et je l’a prend juste dans mes bras quelque seconde.
Moi : Tu vas me manquer, tu sais. Ce sera notre première séparation pour un mois.
Aicha (prenant un grand souffle) : ça va être dur dur.
Moi : J’aurai voulu t’amener avec moi. Ça me déchire le cœur de te laisser ici, en même temps c’est bien puisque tu ne sers pas à grand-chose. Elle me tape sur l’épaule en riant.
Aicha (grimaçant) : Tu penses que les invités vont bientôt partir. J’ai tellement mal à la tête et je suis si fatiguée que j’ai peur de faire une malaise.
Moi (sérieux) : Alors reste ici, ne sort plus et va prendre une douche chaude.
Aicha (hésitant) : Je ne peux pas toi aussi, il faut que….
Moi (strict) : Il n’y a pas à discuter. Je la force à enlever cette robe bizarroïde qui semble peser des tonnes et la pousse sans ménagement dans la douche.
Dix minutes plus tard, j’étais de retour dans la chambre avec ma chemise de nuit en main. J’ai demandai à Abi si je pouvais passer la nuit avec Aicha. J’ai dû déployer toutes mes charmes pour qu’elle accepte. Normalement d’après la loi islamique, je dois rester avec Abi durant les quarante jours ou Aicha est indisponible. Mais ce soir, je voulais la prendre dans mes bras, sentir son odeur, sa respiration, sa chaleur puisque demain je voyage pour un mois. Il me le fallait avant d’aller en France, c’est une nécessité. Quand elle sortit de la chambre et m’a vu avec une serviette noué au hanche, elle a froncé direct les cils.
Moi (levant la main innocemment) : Abi a donné son accord, alors s’il te plaît chut. Je prends ma douche et j’arrive. Je la déplace sans lui laisser le temps de piaffé et j’entre dans la douche en fermant à clé. Quand je ressors dix minutes plus tard, elle était déjà couchée. Je me dépêche de la rejoindre et de la prendre dans mes bras. Hum comme ça fait du bien. Je la serre encore plus contre moi et je sens déjà monsieur se réveiller.
Aicha (ton sévère) : Malick yémal dé (reste tranquille) shipp. Je ricane.
Moi : Je n’y peux rien mais t’inquiète je vais rester sage, j’ai juste besoin de te sentir contre moi. Un mois c’est beaucoup Aicha, je ne sais même pas si je vais tenir aussi longtemps sans te voire.
Aicha (chuchotant) : Moi aussi.
Moi (caressant son bras) : On est devenu si fusionnelle, je n’arrive pas à m’expliquer cette attachement si fort que j’ai pour toi. Je t’aime tant. Merci de me rendre si heureux. Elle se retourne et je vois ces yeux embués de larmes. Hé pourquoi tu pleures. Je lui donne une bise.
Aicha (hoquetant) : Chaque jour je remercie Dieu de t’avoir mis sur mon chemin. Aujourd’hui, tu es plus que mon mari, tu es toute ma vie. A ces mots, je l’embrasse tendrement et ce qui devait être un simple baiser s’enflamme rapidement. Quand mes mains ont commencé à glisser sur ses hanches, elle recule et me regarde d’une aire désapprobatrice. Je sens que je vais passer la nuit la plus frustrante de ma vie.
Avec le bébé qui n’a pas encore fait ses nuits et le bruit de quelques invités qui tardaient à partir, nous n’avons pratiquement pas dormis de la nuit. Alors nous avons continué à papoter jusqu’au premier appel du muezzin.
C’est Abi qui nous a réveillés en frappant à la porte, heureusement qu’elle était fermé parce que vu comment je tenais Aicha si serré dans mes bras, elle allait à coup sûr mal le prendre. Quand j’ai vu l’heure, j’ai sauté du lit comme un fou. Je me suis préparé à une vitesse éclaire et dix minutes plus tard, j’étais prêt. Heureusement qu’Abi avait déjà fait ma valise. Quand je descends, ils étaient tous là, à prendre le déjeuner. L’image d’une famille parfaite, que demander de plus, Dieu m’a vraiment gâté.
J’ai rapidement pris mon café et j’ai fait la bise à mes enfants. J’ai fait signe à Abi de s’approcher. Elle a froncé les cils avant de se lever hésitante. Je l’ai pris dans les bras et pour la première fois parce que j’en avais vraiment envie.
Moi (chuchotant) : Merci pour tout. Je sais que ça n’a pas été facile pour toi mais tu as accepté Aicha comme ta petite sœur. J’ai toujours douté de ton amour et peut – être c’est ce qui faisait que ça ne collé pas trop. Aujourd’hui je sais que pour me rendre heureux, tu es prêt à tout. Je t’aime même si je ne te le dis pas souvent.
Abi (émue) : Moi aussi je t’aime, je suis si heureuse. Ses larmes menaçaient de couler d’une seconde à l’autre alors je l’ai pris dans les bras et je l’ai tournoyé jusqu’à l’entendre rire.
Moi (content) : Je ne veux pas voir de larmes seulement de la joie dis – je en les effaçant. Ensuite je lui ai donné une bise avant de me diriger vers Aicha qui nous lançait un sourire plein de tendresse. Je lui ai juste fais la bise en la serrant. On s’était déjà dit au revoir toute la nuit.
Je suis arrivé un peu en retard à l’aéroport. Heureusement que la société que l’on devait défendre a loué un jet privé spécial pour nous. Comme d’habitude, j’ai amené quelque un de mon équipe.
Dès que l’avion a pris son envol, j’ai ouvert un des dossiers. J’ai travaillé pendant plus d’une heure avant que le sommeil me gagne. Bien calé sur la chaise et c’est parti pour dormir tout le vol. Je ne sais pas combien de temps j’ai dormi mais j’ai été réveillé par des secousses. J’ai mis ma ceinture et j’ai demandé à mon voisin et collègue ce qui se passait.
- Je ne sais pas, peut – être une zone de turbulence. Là on entend la voix de l’hôtesse de l’air sur le haut-parleur.
- Mesdames et Messieurs, veuillez attacher vos ceintures. Suite à un problème technique, nous sommes dans l’obligeance d’atterrir à l’aéroport le plus proche. Nous vous prions de bien vouloir….Un grand secousse projette l’hôtesse à un mètre, nous faisant tous crier. Elle se relève rapidement et cours s’assoir sur la chaise la plus proche en tremblant. Le temps de nous remettre de nos émotions, l’avion fait une autre secousse encore plus violente et s’engage vers une descente vertigineuse. Tout le monde criait. Mon Dieu, que se passe-t-il. Les cris fusaient de partout, c’était la panique totale à bord. J’ai fermé les yeux et j’ai commencé à réciter le Coran. Les images de ma vie ont commencé à se défiler dans ma tête : mes enfants, Abi avec qui je m’entends enfin bien, le bébé qui vient de naitre, ma mère avec qui je me suis mis en froid, Aicha ma raison d’être, mon amour. Mon Dieu pourquoi ? Pourquoi me prendre la vie après m’avoir donné l’espoir. L’image d’Aicha me souriant est la dernière chose que je vois avant que l’avion n’entre en collision. Je dis tout bas : Adieu mon amour.
Abi : crash
Je suis allée me reposer après le départ de Malick. J’ai été très émue par ce qu’il m’avait dit. Qui aurai crue qu’un mal pouvait apporter à la fin du bien. La venue d’Aicha dans notre vie est une vraie bénédiction dans nos vies et dans notre couple. Je sais qu’il l’aime plus que moi, son regard et ses gestes envers elle me l’ont plus que prouver. Mais j’ai appris à maitriser ma jalousie, à accepter d’être la seconde dans son cœur même si, je suis la première dans sa vie. Et au final, je n’en tire que du bénéfice, car quoi qu’on puisse dire, je suis plus heureuse et épanouie dans mon couple que je ne l’ai été en cinq ans. Malick est devenu plus gentil, moins agressif avec moi et nos conversations ont repris. Il me parle de son boulot et moi du mien. Au début, mon cœur se pinçait à chaque fois qu’il partait chez Aicha, pour les deux jours, et plus les jours passaient plus je m’habituais jusqu’à ne plus y penser. Bref aujourd’hui, je me rends compte qu’avoir une coépouse n’est pas aussi dramatique qu’on le dise si on a la chance de tomber sur une femme bien. Car il faut se l’avouer Aicha est plus que bien, elle est gentille, adorable avec mes enfants et surtout elle n’a jamais essayé de me montrer que c’est elle la préférée ou la plus intelligent ou quoi que ce soit au contraire.
Aujourd’hui, j’ai un atelier de couture qui marche bien et un mari aimant et des enfants merveilleux et une coépouse qui est aujourd’hui comme ma petite sœur. Que demandait de plus, la vie est belle.
Je descends les escaliers en chantonnant pour aller retrouver Aicha et sa maman. Il faut que l’on parle de ce conflit entre elle et ma belle – mère. J’ai été bluffé hier de la façon dont Aicha lui a tenue tête, surtout devant tout le monde. Au final, elle n’est pas aussi peureuse qu’on le pensait car il faut avoir vraiment du cran pour tenir à tata Astou.
Dès que j’entre dans la chambre, Aicha vient précipitamment vers moi.
- Je viens de faire un rêve, non plutôt un cauchemar ou Malick m’appelé en détresse. Depuis je ne sais pas pourquoi, j’ai un mauvais pressentiment. Je regarde sa mère, assisse sur une nappe en train d’apprendre le coran. Elle suit ma direction et dit. Comme je ne peux pas prier, je lui ai demandé de le faire à ma place.
- Ne t’inquiète pas, c’est juste un mauvais rêve, il va bientôt appeler, tu verras.
- Quand ? Aicha est très agitée et se mange les ongles. Je regarde ma montre et calcul dans ma tête. D’habitude le trajet Dakar – Paris se fait en cinq heures et son avion a décollé vers 10 h je crois. Donc il appellera surement vers 17 ou 18h, le temps d’arriver à l’hôtel. Elle balaie d’un revers de main une larme qui venait de couler avant d’aller s’assoir sur le lit, découragée. Son désarroi me fit peur.
Je monte dans ma chambre et récite Yacine avant de redescendre m’occuper de la maison qui était dans un désordre total. L’après-midi s’est passé comme une éclaire. J’étais très occupée avec les cinq personnes que j’avais fait venir spécialement pour remettre en ordre la maison. Thièy les gens manquent vraiment de civisme. Des peaux de bananes et d’oranges jonchent un peu partout dans la maison, des pépettes de riz sont collés sur les carreaux, des cannettes versés à même sur les canapés et jeté çà et là. Un vrai dépotoir d’ordure malgré le fait que j’avais déposé des seaux d’ordures dans chaque recoin de la maison. Heureusement que cette fois, je n’ai pas eu de vol. Normal, je commence à m’habituer. Mieux vaut prévenir que guérir. Deux jours avant le baptême, j’ai fait entasser toutes mes ustensiles de cuisine dans le pantré que j’ai pris le soin de bien cadenasser. J’ai fait de même avec mes bijoux, parfum de classes, bref tout objet de valeur. Avec le baptême de mon premier enfant, les voleurs m’ont beaucoup saigné. Surtout avec mes bols et autres, chaque femme qui rentraient chez elle demandait à partir avec sa part. Le lendemain, j’ai constaté qu’il ne me restait plus rien dans la cuisine, même les assiettes avaient été emportées.
Tout le temps que dura le nettoyage, Aicha était aux aguets, dès qu’un des téléphones sonnaient, elle sursautait. Nous avons essayé tant bien que mal de la raisonner mais rien. Elle disait qu’elle ne pourrait rester tranquille que quand elle aurait Malick au téléphone. Durant le déjeuner, je lui ai parlé de ma belle – mère et comment on pourrait faire pour apaiser sa colère. Elle m’a à peine écouté et a pris un autre sujet. Sa mère a essayé de la raisonner à son tour et elle nous a presque crié dessus. Je n’ai pas voulu insisté me disant qu’elle est toujours anxieuse à cause de son rêve.
Quand le nettoyage du salon fut terminé, je demande à la bonne d’appeler Aicha et sa mère à venir prendre le thé avec moi. Elles m’ont rejoint cinq minutes plus tard.
Aicha (toujours inquiète) : Il a appelé ?
Moi (souriant) : C’est encore tôt, toi aussi nobaté nga torop (tu es trop amoureuse).
Aicha (sourire forcé) : J’ai appelé Suzanne et elle m’a dit qu’effectivement l’avion atterrit à 15 h et que Malick a l’habitude d’appeler dès sa descente, étant donné qu’il a un rowming. Il est presque 16 h Abi fini t – elle presque en pleurant.
Sa maman (énervée) : Yawe hanaa gueumo Yalla (est – ce que tu crois en Dieu). Arrête de te comporter comme une gamine et laisse les gens tranquilles ish.
Moi (réconfortant) : Plus amoureuse qu’elle, tu meurs taquinais – je.
Et à ma grande surprise, elle fond larme. Le temps que je me lève pour la rejoindre, elle commence à ouvrir la bouche, à respirer très fort comme si elle perdait de l’air. Je reste debout, complétement dépassé par la situation.
Sa maman (paniquée) : Elle fait une crise de nerf dit – elle en s’approchant rapidement d’elle. Toudeul Yalla Aicha (évoque Dieu) Onzoubillahi mina cheytane razim.
Aicha : Maman, je te jure que j’ai un mauvais pressentiment, il lui est arrivé quelque chose, j’en suis sure, je le sens au plus profond de mon être…. Quelqu’un sonne. Je regarde l’entrée de la maison. Qui peut bien nous rendre visite à cette heure. Un vent froid m’envahi soudain, j’ai les mains moites et mes jambes refusent de bouger là où je suis debout. Quand la bonne ouvre la porte et que je vois entrer Mouhamed avec sa tête de déterré, j’ai regardé de suite Aicha. Ce pourrait – il qu’elle ait raison. J’ai plongé mon regard dans celui de Mouha qui s’avancer vers nous d’un pas incertain, les yeux embués de larmes. J’ai pris ma bouche des deux mains pour m’empêcher de crier et j’ai fait non de la tête. Aicha quant – à elle s’est figée direct, aucun muscle de son corps ne bougeait plus.
Mouhamed (hoquetant) : L’avion s’est écrasé…. Il a commencé à pleurer en me prenant dans ses bras. J’ai vu aicha tomber comme une statue de pierres sous le tapis alors que la douleur commençait à submerger comme un ouragan dévastant tout sur son passage. Non pas lui chuchotais – je avant de sombrer moi aussi dans le noir.
Dibor mère d’Aicha : deuil
La perte d’un être cher est l’une des choses les plus tragiques et dévastatrices qu’une personne puisse supporter. ‘ Le deuil, état de non vie, au sein de la vie’. Mon Dieu, pourquoi lui infliger encore une fois une telle douleur, la vraie douleur. Qu’est – ce qu’elle a fait pour mériter une telle souffrance. Ho Malick, j’aurai voulu mourir à ta place. Je donnerais tout l’or, pour prendre la souffrance de ma fille à cet instant.
Cela fait trois heures maintenant depuis l’annonce et depuis son réveil, rien. Elle s’est emmurée dans un silence presque effrayant. J’aurai voulu qu’elle crie, qu’elle pleure comme le fait en ce moment Abi, mais pas qu’elle reste comme ça, comme un statut, sans aucune émotion. Pourrait- elle se relever de cette perte ?
Mon mari et Menoumbé sont arrivés en même temps que Suzanne. Cette dernière a appelé un médecin qui est en ce moment même avec ma fille. Comme moi, il lui parle mais elle ne dit rien, elle fixe juste un point. Il lui a pris sa tension et tout, avant de se lever et de remuer sa tête tristement.
Le docteur : Votre fille est en état de choc. Si jusqu’à demain, elle ne réagit pas, je serais obligé de lui faire une perfusion.
Moi en pleur : Qu’est – ce que je peux faire Docteur, c’est la première fois de ma vie que je me sens si incapable. J’éclate en sanglot, n’y tenant plus.
Le docteur : Il faut que vous soyez forte pour elle. Votre fille est en train de passer les plus mauvaises heures, voire jours de sa vie alors soyer réconfortante et surtout, soyer présente.
Ngoor (inquiet) : C’est sure que vous ne pouvez rien faire, regarder là Docteur dit – il en le pointant du doigt.
Docteur : Pour l’instant, elle est à la phase du déni. Le choc est trop grand pour qu’elle reconnaisse et accepte la fatalité de la mort de son mari. Donc, elle se sert du déni pour protéger son psychisme de cette surcharge émotionnelle.
Ngoor (criant) : Epargnez moi vos charabia et dites-nous juste ce qu’on doit faire.
Docteur (toujours serein) : Rien. Je suis désolé mais je n’ai pas de médicament face à la douleur de la perte d’un être cher. Elle ne se guéri qu’avec le temps.
Ngoor (dépassé) : Vous voulez dire que l’on doit la laisser ainsi, je ne peux pas, je….mon mari craque et commence à pleurer. Moi qui m’étais calmé, je reprends de plus belle. Si nous les parents somment si dévasté, je ne m’imagine pas ce qu’elle ressent en ce moment. Elle a raison de se couper de la réalité pour fuir la douleur.
Docteur : Heu, comment vous l’expliquer. C’est comme si, ses émotions avaient été anesthésiées et donc elle agit de manière mécanique. Face à la violence des émotions, il s’est produit au sein du psychisme comme une rupture du disjoncteur. Quand l’anesthésie va commencer à s’estomper, il faudra que vous soyez là pour recevoir cette douleur émotionnelle trop forte pour elle. Laisser la submerger doucement, ne la brusquer pas, sois juste prêt que ça ne sera pas facile.
Avec mon mari, nous avons accompagné le docteur jusqu’à la porte. Avant d’aller rejoindre Aicha, je passe voir d’abord Abi. La maison commençait déjà à se remplir et les cris de détresse fusaient de partout. Je l’ai retrouvé dans sa chambre et son visage était déformé par la douleur. On lui avait déjà enlevé son tissage et ces fausses cils, là sa mère s’atteler à enlever ces faux ongles ce qui n’était pas aisé vu qu’elle ne les avait fait qu’hier. Dès qu’elle m’a vue, elle s’est précipité dans mes bras et a repris les pleurs. J’ai surpris le regard noir que sa mère m’a lancé avant de se ressaisir.
Moi (lui caressant le dos) : S’il te plaît, calme toi un peu. Les enfants ne doivent pas te voir dans cet état.
Abi (hoquetant) : On les a amené chez maman, je ne sais pas quoi leur dire. Aicha l’avait senti ma tante, elle l’avait vue…elle reprend à pleurer de plus belle. Je ne savais plus quoi dire, ni comment la réconforter, juste la tenir serré dans mes bras. Sa mère s’est approché et la retiré doucement de mes étreintes.
Yaye Fatou (mère d’Abi) : Il faut que l’on finisse de te démaquiller et aussi tu dois prendre ta douche, t’habiller en circonstance et descendre jouer ton rôle.
Abi (criant) : Je ne veux pas, je ne peux pas, c’est trop tôt, je ne veux pas être veuve. Nnnnnoooonnnn cria t – elle avec tellement de désarroi que je me remis à pleurer.
A cet instant, des cris de douleur nous parviennent du salon et s’intensifie chaque seconde un peu plus. Nous nous regardons en silence.
Abi murmurant : C’est ma belle-mère. Elle se prend la bouche, fait un pas, recule de deux pas encore. Sa mère sort une grande colle de son armoire et recouvre sa tête. Nous descendons doucement comme si nous avions peur de ce qui nous attendait en bas. L’image de cette femme aux allures royales avait disparue pour laisser place à une femme désemparée, dépouiller, presque éteinte. Couché à même le sol, se prenant la tête, ces cris me faisaient droits au dos. On aurait dit un animal féroce agonisant. La mort d’un enfant va contre le sens même de la vie. Ces deux filles qui étaient à côté d’elles essayaient tant bien que mal de la soulever, réconforter mais c’est comme si elles augmentaient sa douleur. A un moment, ne s’y attendant plus, elle se lève et commence à marcher tout au longue salon en parlant à tous ce qui était dans le salon.
Sokhna criant : Mon fils n’est pas mort, vous mentez tous, il n’est pas mort. Je l’aurai senti, une mère sent toujours le danger pour son fils. Hé Allah, tu aurais dû me prendre, pourquoi lui, pourquoi, han, ahhhh. Abi s’approche d’elle et cette dernière la bouscule violemment, la faisant tomber. Tout le monde recule. Il fallait qu’on la laisse se défouler, sortir sa peine. La douleur d’une mère face à la perte de son enfant est indescriptible ; c’est comme si on t’avait amputé une partie de soie. Personne ne peux la consoler, juste donner le temps aux temps.
Dibor crie mon mari avec désarroi Ngoor. Nos regards se croisent et avant même qu’il ne dise un mot je m’étais déjà élancé dans sa direction. Hé Allah, venez nous en aider. La situation me dépasse.
A lire chaque lundi…
Par Madame Ndèye Marème DIOP