Le changement de climat fait varier les ports vestimentaires. Pour s’adapter au froid qui se fait de plus en plus ressentir, les Sénégalais prennent d’assaut les friperies.
Il est 13 heures au marché Dior des Parcelles assainies. A cette heure de la mi-journée, le lieu grouille de monde. De par sa position géographique, ledit marché est un véritable carrefour. Le bruit des voitures exacerbe la pollution sonore. A quelques mètres de la station d’essence, sont bien visibles les vendeurs de friperie qui accueillent les visiteurs comme le miel ferait avec les mouches. A l’aide de haut-parleur, les vendeurs rivalisent, en tentant d’attirer les clients. Les articles présentés aux acheteurs restent pratiquement les mêmes. Partout, c’est des jaquettes, blousons, sans oublier les pull-overs ou body longs, les jeans, les vestes et collants. Selon la qualité, les prix vont de 300 à 5 000 francs Cfa. Bara, comme l’appellent familièrement les gens du marché, attire notre attention. Taille moyenne, teint clair, vêtu d’un caftan multicolore, son bonnet trop petit pour sa grosse tête lui donne un air comique. Pour Bara, les Sénégalais n’ont plus le complexe de porter des friperies parce que ce sont des marques de haut de gamme. Notre interlocuteur prétend qu’il est l’ami des jeunes filles. «Faites le constat par vous-même, la majeure partie de nos client est constituée de filles parce qu’ici elles trouvent des habits de marque très rares à des prix abordables», lance Bara. Encore un autre étal de friperies géré par deux jeunes garçons. Ici, l’ambiance est beaucoup plus dense. Pape et Sadibou sont très dynamiques et n’hésitent pas à esquisser quelques pas de danse pour amadouer les clients, avec d’autres gestes amusants.
Un peu plus loin, les jeunes filles se bousculent. Un ressortissant de Kaolack bazarde des vestes à 1 500 francs Cfa l’unité. «Je n’achète que des friperies en période de froid et quand je les porte pour aller travailler mes collègues pensent que j’ai dépensé plus de 25 mille francs Cfa pour m’habiller. En tout cas, moi c’est mon secret», témoigne Khady, la trentaine. Avant de poursuivre: «Souvent, c’est avec les friperies que l’on déniche de bons habits. Et ce n’est pas cher». Bator et ses amies abondent dans le même sens : «Ce que l’on nous propose dans les vitrines est cher. C’est pourquoi, ajoutent-elles, nous venons ici pour faire nos achats pour mieux nous protéger de la fraîcheur».
Teint clair, la quarantaine et vêtue d’un grand boubou jaune, mère Fama révèle qu’en cette période de froid, les habits lourds sont très prisés. «Je vendais des draps et torchons. Mais depuis que le climat a changé, je me suis rabattu sur les pull-overs et blousons pour enfant», soutient la dame. Cette dernière confie qu’elle s’en sort bien car des fois, elle fait 100 % de bénéfices. «Comme les temps sont durs, c’est ici seulement que les pères de familles peuvent s’approvisionner à moindre coût. Mon salaire ne me permet pas d’aller dans des boutiques chic. Donc les friperies sont les plus indiquées pour les pauvres comme moi», confesse un monsieur trouver sur place en train de marchander quelques pulls.
Quid des chaussures
Il n’y a pas que les vêtements lourds qui sont vendus comme des petits pains. Il y a aussi les chaussures. «Venez acheter mes chaussures, je ne les vends plus, je les offre gratuitement, car je veux rentrer. Des chaussures de ville à 3 500 franc CFA, c’est du jamais vu. Venez prendre votre part avant que ça ne finisse, sinon vous risquez de le regretter» chantonne un jeune homme. Ce dernier n’hésite pas à lister ses chaussures. «Des Air-max, Vans, All, Timberland, tout y est. Et cela va de soi», indique-t-il. D’après le jeune homme, ce sont ces marques de chaussures qui sont les plus convoitées. «Nos chaussures sont beaucoup moins chères. Mieux on les retrouve aussi dans les grandes boutiques», soutient-il. Avant d’être conforté dans ses propos par une cliente : «C’est normal parce que les ‘balles’ (sacs contenant la friperie) viennent des pays européens et là-bas, la qualité est privilégiée». Entouré par des clients, un vendeur informe qu’il n’y a pas de prix fixe pour les chaussures. Interpellé sur les chaussures les mieux vendues, il affirme : «Les gens préfèrent les chaussures fermées (chaussures de ville) pour s’adapter».
Hindou TOURE
(Stagiaire Walf Quotidien)