L’électorat est devenu très volatile en Afrique, et même dans les grandes démocraties. Ainsi, de nombreux chefs d’Etat qui ne s’y étaient pas préparés ont été balayés en 2016. A leurs places, des outsiders que personne n’attendait ont pris le pouvoir au Bénin, aux Usa, en Gambie et bientôt en Angola et en France. Un scénario qui doit faire réfléchir plus d’un au Sénégal qui n’est en rien une exception.
Le monde bouge et le Sénégal n’échappera pas à ces changements. L’année 2016 a été cauchemardesque pour plusieurs chefs d’Etat. Nombreux sont, en effet, ceux qui y ont perdu le pouvoir ou annoncé leur retrait définitif de la scène politique, tellement les demandes sont pressantes, le contexte mondial difficile et les peuples impatients. Ainsi, on a assisté à des scénarii ubuesques dans plusieurs pays avec des outsiders qui ont créé la surprise pour arriver au pinacle. Le président béninois, Patrice Talon, n’était pas attendu, l’Américain Donald Trump non plus. Le Ghanéen, John Mahama, a été dégagé au profit de Nana Akufo-Addo malgré d’excellents résultats, le président angolais, Eduardo Dos Santos, au pouvoir depuis 37 ans, a annoncé qu’il ne sera pas candidat à un autre mandat en 2017. François Hollande, le président le plus impopulaire de la Ve République française, a décidé, à la surprise générale, de ne pas se présenter à la présidentielle de 2017. Et Fillon que personne n’attendait est parti pour s’installer à l’Elysée dans quelques mois. Le Néron de Banjul, Yahya Jammeh, qui a voulu se donner une once de crédibilité démocratique, a mordu la poussière et été éjecté après 22 ans de règne sans partage et une dictature féroce.
Les peuples, africains notamment, sont devenus plus exigeants contrairement à ce que beaucoup de dirigeants imaginent. On ne peut plus gagner une élection avec des t-shirts et des 1 000 francs distribués aux militants. L’électorat est devenu très volatile dans nos pays et même dans les grandes démocraties. Si Macky Sall pense que les milliards investis dans les cités religieuses lui permettront d’avoir la voie libre, il se trompe lourdement, puisque les attentes sont encore pressantes et sa gestion «sobre et vertueuse» s’est transformée en gabegie.
Les réalisations ne suffisent plus aux Sénégalais sinon Wade n’aurait jamais perdu le pouvoir.
Le Wax Wakhtet qui a perdu Wade, Macky Sall en a fait un aussi retentissant avec la durée de son mandat désormais passé de 7 ans et non de 5 comme il l’avait clamé urbi et orbi. Ses roueries politiques, avec la complicité d’une bonne partie de la presse au garde-à-vous, indisposent les citoyens plus que ce qu’il semble imaginer. Pourtant, si ces derniers ont été plus que dociles à l’égard de son mentor politique, le réveil de Me Wade s’est révélé cauchemardesque. Estimant avoir affaire à un peuple docile, le président Wade a eu la surprise de sa vie lorsqu’il a aperçu du haut de sa fenêtre les Sénégalais se mobilisaient devant l’Assemblée nationale pour lui barrer la route, au prix de leur vie. Et si ces derniers ont été capables de tenir tête à celui-là qui a presque transformé la figure de Dakar mais qui gouvernait comme un autocrate, ils n’auront aucune gêne à se débarrasser de cet élève dont Idrissa Seck disait qu’il a «tous les défauts de Me Wade et aucune de ses qualités». Comme le parfait outsider qu’il a été en 2012, d’autres jeunes loups aux dents longues tapent à la porte et risquent de l’envoyer chez «Ardo». Abdoul Mbaye, Karim Wade, Ousmane Sonko ou encore Malick Gakou, que personne n’attend, sont à l’affût prêts à lui porter l’estocade.
Seyni DIOP (Walf Quotidien)