Les policiers se rassemblent à nouveau devant l’Assemblée alors que les syndicats sont reçus par François Hollande ce soir. Après dix jours de manifestations, cette rencontre suffira-t-elle à calmer une mobilisation qui déborde du cadre syndical ?
Les syndicats de police seront reçus par François Hollande à l’Elysée ce mercredi 25 octobre à 18h, suite au vaste mouvement de mobilisation des policiers qui se poursuit depuis dix jours consécutifs. De nombreux policiers ont d’ores et déjà appelé au rassemblement dès 14h face à l’Assemblée nationale.
De son côté, le syndicat Unité-SGP police FO a préféré appeler à une «marche de la colère policière et citoyenne» à partir de midi, place de la République à Paris. Des rassemblements sont également annoncés dans 80 autres villes de France.
Alors que la popularité du mouvement des policiers auprès des Français est très forte, les policiers semblent, eux, vouloir prendre leurs distances avec les organisations syndicales. Ces dernières espèrent de leur côté, lors de leur rencontre avec le chef de l’Etat, obtenir des avancées concrètes pour reprendre la main et satisfaire aux demandes des manifestants.
Parmi les attentes que formuleront les syndicats, la «révision du cadre juridique d’emploi des armes» ou encore «l’alignement de la répression des outrages à personne dépositaire de l’autorité publique sur celle des outrages à magistrats, dont les peines sont doubles».
La rencontre entre François Hollande et des syndicats en perte de vitesse auprès des policiers convaincra-t-elle ces derniers ? Quoi qu’il en soit, l’Elysée aurait déjà prévu un plan d’investissement conséquent.
Une grogne généralisée, plusieurs revendications
Suite à la très violente agression de quatre policiers à Viry-Châtillon le 8 octobre dernier, les policiers ont entamé un large mouvement de protestation qui a rapidement gagné toute la France. Après une première manifestation spontanée sur les Champs-Elysées dans la nuit du 17 au 18 octobre dernier, les policiers franciliens ont ainsi été suivis par leurs collègues de province, notamment à Toulouse, Nantes, Bordeaux ou encore à Nancy.
Le premier mot d’ordre de ces manifestations semble bel et bien être la dénonciation des violences policières dont les membres des forces de l’ordre s’estiment être trop souvent victimes. Le 20 octobre dernier, les manifestants parisiens ont entonné une Marseillaise sous les fenêtres de l’hôpital Saint-Louis, où ont été hospitalisés leurs collègues de Viry-Châtillon.
Néanmoins, les revendications exprimées sont diverses. Certains policiers affichent très clairement le souhait de voir révisées les conditions auxquelles la loi limite la légitime défense. Selon eux, les dispositions actuelles, trop restrictives, ne leur permettent plus de se défendre convenablement en cas de danger imminent. Pour d’autres, c’est davantage le «laxisme judiciaire» qui est en cause. Arguant que les délinquants seraient relâchés sitôt arrêtés, certains réclament la restauration des peines planchers.
Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, a ainsi demandé à ce que soient organisées des réunions de concertation à l’échelle des différents départements, afin de recueillir les revendications des policiers sur le terrain et de les faire remonter de la manière la plus efficace. «Vous demandez des moyens, nous vous les donnons. Vous demandez du soutien, il vous est acquis», a-t-il déclaré.
Le dialogue piétine alors que la mobilisation essaime partout en France
Malgré les signaux du gouvernement, la mobilisation des policiers, loin de se cantonner à la capitale, semble avoir pris une réelle ampleur jusqu’en province. Lundi 24 octobre dernier, on dénombrait encore 300 membres des forces de l’ordre à Toulouse. Le même soir, ils étaient tout aussi nombreux à Béthune, dans le Pas-de-Calais.
A chacun de ces rassemblements, ce sont plusieurs centaines de fonctionnaires de police qui défilent, la plupart du temps à visage couvert afin d’éviter d’éventuelles sanctions de leur hiérarchie. En effet, une lettre de Jean-Marc Falcone, directeur général de la police nationale, dénonçait, dès le lendemain du premier rassemblement parisien, des «comportements inadmissibles [qui] fragilisent la police nationale et fragilisent aussi chaque policier».
La réponse de la direction générale de la police nationale a été reçue avec perplexité par les syndicats, qui l’ont jugée «maladroite». Chez les policiers, la réaction semble avoir été bien plus vive, entre indignation et colère. Dans leurs témoignages, ceux-ci affirment en outre se sentir «lâchés» par leur ministère de tutelle et leur direction.
Ce climat de tension entre les policiers et leur hiérarchie est bien palpable. A chaque rassemblement, les manifestants ne manquent d’ailleurs pas de demander la démission de Jean-Marc Falcone. Celle du ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, a également été réclamée à plusieurs reprises.
Une mobilisation qui semble échapper aux syndicats
Si les manifestants se réunissent parfois à l’appel d’organisations syndicales, la plupart des rassemblements de ces derniers jours ont eu lieu de manière spontanée. Les informations circulent ainsi sur Twitter ou par SMS, efficacement relayées de commissariats en commissariats.
Le fait que le mouvement puise son énergie en dehors des cadres syndicaux habituels semble pleinement assumé. Si le slogan «Syndicats complices !» a été entendu à plusieurs reprises lors des manifestations, c’est surtout le sentiment de méfiance ressenti par «la base» à l’égard d’éventuelles tentatives de récupérations politiques qui s’exprime.
Mardi 25 octobre dernier, l’intersyndicale des policiers avait appelé à un rassemblement devant le palais de Justice de Paris. L’appel à la mobilisation, quoique très officiel, semble s’être soldé par un véritable échec, puisque à peine plus de 100 manifestants se sont déplacés.
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