Un tour dans certaines boutiques de la capitale permet de constater une raréfaction du sucre. Une situation qui se fait plus ressentir dans certaines régions de l’intérieur comme Fatick, Kaolack, Saint-Louis…
La hausse des cours, qui a provoqué la réticence des commerçants, et des problèmes de manutention au Port autonome de Dakar sont à l’origine des tensions sur l’approvisionnement en sucre constatées dans le pays depuis quelque temps. En effet, plusieurs sources concordantes à la Direction du commerce intérieur, à la Compagnie sucrière sénégalaise et chez les commerçants confirment la hausse des cours du sucre au niveau international. Laquelle a rendu le produit «intouchable» pour les commerçants qui ne veulent point «vendre à perte».
Joint par Walf Quotidien, le Directeur du commerce intérieur, Ousmane Mbaye, assure qu’il n’y a pas pénurie sur le marché contrairement à ce que beaucoup pensent. Selon lui, c’est un problème de distribution qui est en passe d’être résolu. «Le sucre local est épuisé depuis le mois de juillet. Et avec la cherté du sucre sur le marché international, certains commerçants n’ont pas voulu importer. Donc, nous avons réalloué leurs quotas d’importation à la Css. Nous avons besoin de 13 à 15 mille tonnes de sucre par mois, mais aujourd’hui on frôle 18 mille tonnes. Aujourd’hui, même des régions frontalières de certains pays voisins qui ne consommaient pas le sucre local ruent vers la production nationale», explique M. Mbaye. Non sans indiquer des problèmes de manutention au port de Dakar où des difficultés ont été notées au niveau de la Sdv qui traite le sucre importé par la Css. Mais, selon lui, avec les mesures prises par ladite société de manutention, la situation va se stabiliser.
Du côté de la sucrerie de Richarf Toll, on refuse aussi de parler de pénurie. Louis Lamotte, conseiller du Groupe Mimran, soutient qu’il est très difficile de trouver du sucre sur le marché international avec la montée des cours. Et, estime-t-il, tout ce que la Css amène est automatiquement pris par les commerçants. Il signale qu’il y a actuellement 25 mille tonnes sur le marché mais qu’avec la forte demande, il est difficile, pour certains commerçants, d’en disposer. «Là où on vendait 400 tonnes par jour, on est aujourd’hui 800, voire mille tonnes, écoulées quotidiennement», dit M. Lamotte. Qui signale que cette année, la sucrerie a déjà vendu près de 200 mille tonnes en cette période de l’année alors que leur projet KT150 (150 mille tonnes) visait à satisfaire les besoins du Sénégal. «On a produit 130 mille tonnes et on est à près de 60 mille tonnes d’importées. Maintenant, on a des cotations officielles venant de la Gambie et de la Mauritanie pour acheter du sucre car ceux qui importaient dans ces pays n’ont plus les moyens de le faire avec la hausse des cours», observe-t-il. Avant d’ajouter : «L’Etat a donné des quotas d’importation aux commerçants sénégalais mais aucun n’en a été exécuté. Il a fallu que la Css réagisse vite pour les remplacer afin d’éviter une pénurie. Ils ne peuvent pas importer pour le vendre à perte au prix homologué. Mais la responsabilité de la Css est d’éviter qu’il n’y ait jamais de pénurie. Et c’est ce que nous faisons depuis 40 ans. Aujourd’hui, nous achetons à perte mais c’est normal puisque nous devons assurer la disponibilité du produit quel que soit le coût», note le Conseiller du groupe Mimran.
L’importateur Moustapha Tall, quant à lui, estime que l’Etat ne peut pas demander aux commerçants d’approvisionner le pays en relevant le niveau du prix de dédouanement qui était de 325 mille francs la tonne à 399 990 francs, de baser la péréquation fixe de 10 % de ce montant, qui fait 40 mille francs la tonne comme Taxe conjoncturelle à l’importation (Tci), et d’appliquer des droits de douane de 180 mille francs par tonne. Ce qui fait un montant total à payer de 220 mille francs, en sus d’autres frais. Pour lui, tout cela, fait que l’importateur ne peut pas vendre la tonne de sucre à 540 mille francs, prix homologué. Surtout dans ce contexte où le prix du sucre sur le marché international est de plus de 400 mille francs la tonne. «Comment voulez-vous que les importateurs puissent approvisionner le marché dans ces conditions?», s’interroge le commerçant.
Seyni DIOP (Walf Quotidien)