Abdoulaye Daouda Diallo était en tournée dans le Fouta. Mais, le ministre de l’Intérieur a eu le don de répandre la colère partout où il est passé. A Bocké Dialloubé, il a donné son nom au stade, ce qui a eu le don d’exaspérer les populations.
Le ministre de l’Intérieur a fait un long périple ce week-end dans le Fouta pour diverses activités. Accompagné du ministre des Sports, il a d’abord procédé au lancement de la pose de la première pierre du stade municipal, et de l’hôtel de la ville de Fanaye. Après, la délégation fera cap sur Bocké Dialloubé fief du ministre de l’Intérieur Abdoulaye Daouda Diallo. Accompagné de la directrice générale de la case des tout-petits et du directeur général de l’Agetip, le ministre de l’Intérieur a procédé à l’inauguration de la case des tout-petits, ensuite à la pose de la première pierre de l’hôtel de ville. Ainsi, après la pose de la première pierre du poste de santé de sa localité, Abdoulaye Daouda Diallo procédera à la cérémonie d’inauguration du stade municipal de sa ville. Mais ce qui a le plus retenu l’attention, c’est la colère des populations. Ici à Bokké Dialloubé, c’est à la surprise générale que les populations ont vu sur la plaque d’inauguration, que le stade était baptisé au nom du ministre de l’Intérieur. Car selon certains conseillers municipaux, le choix du nom du stade devrait non seulement être porté à la connaissance du conseil municipal, mais il revenait à ce même conseil municipal, de passer par la délibération pour le nom du parrain de l’infrastructure. Ce qui n’a pas été le cas, selon certains conseillers. Et un président de commission de ce conseil municipal de signaler qu’il était beaucoup plus judicieux, de baptiser le stade au nom d’un natif de la localité qui n’est plus de ce monde et qui a beaucoup œuvré pour le développement de la localité. Précisant que ces personnes ne manquent pas dans cette zone.
Certains conseillers qui ont préféré gardé l’anonymat, ont aussi dénoncé le fait que malgré la disparition d’un de leurs collègues du nom de Demba Ndiaye qui a rendu l’âme le même jour et enterré dans son village natal de Boké Mbaybé, vers les coups de 13 h, les gens aient disputé la finale de la coupe du maire quelques heures après. En effet, selon notre interlocuteur, Demba Ndiaye qui jusqu’à sa mort était le président de la commission agriculture au niveau du conseil municipal, était aussi le président de l’union de la cuvette rizicole de la zone. Pour ses collègues, ne serait-ce que le rôle important que ce défunt a joué malgré son âge, il méritait une journée de deuil et que cette finale soit reportée. Ce qui n’a pas été le cas, regrette certains conseillers qui ont mal apprécié que la finale soit jouée le même jour.
La colère s’est poursuivi jusqu’à l’île-à-Morphil. Attendu au village de Saldé, pour installer officiellement le centre secondaire d’état civil, le ministre de l’Intérieur a tout simplement zappé ces populations de l’île. Le chef du village intérimaire Ibrahima Rassoulou Ly souligne que lui et le chef de village sont restés sur les lieux de 16 h à 22h sans voir l’ombre du ministre, encore moins quelqu’un qui aurait pu leur expliquer les raisons de ce faux bond. Très en colère, Mr Ly de faire savoir que les autorités n’ont aucune considération pour les populations de cette partie enclavée du pays. La preuve par Saldé, chef-lieu d’arrondissement, ayant 120 ans d’existence qui n’a qu’un centre secondaire. Selon lui, ce centre n’a pas beaucoup d’importance pour les populations compte tenu du rôle moins important qu’il va jouer au niveau de l’île… «Car dans ce centre, il n’y a que des déclarations de naissance à faire. Et ceux qui voudront avoir des extraits de naissance seront obligés de se rendre jusqu’à Boké Dialloubé», se désole le chef de village adjoint. Il souligne que compte tenu de son enclavement, Saldé aurait pu au moins abriter un centre d’état civil digne de nom comme il l’a toujours été auparavant. «Mais aujourd’hui les populations qui sont confrontées à un isolement total, sont obligées de se rendre jusqu’à Boké Dialloubé pour chercher une pièce d’état civil. Pourtant nous avons tout fait pour Macky Sall. Nous avons gagné toutes les élections en faveur de l’Apr, mais nous n’avons rien reçu en retour. Au contraire ceux-là que nous avons aidé continuent aujourd’hui à nous combattre», explique Mr Ly.
Dans l’île, il n’y a pas que les populations de Saldé qui sont très remontrées contre leur ministre de l’Intérieur. Au village de Ngouye, une localité située à cinq kilomètres de Saldé, ce sont des étudiants et élèves qui attendaient le ministre, munis de brassards rouges, et qui sont dispersés un peu partout dans l’île. Souleymane Samba Diop, coordonnateur de l’Apr qui nous a joints par téléphone, est catégorique. Selon le patron de l’Apr de Ngouye, c’est parce que le ministre n’a jamais tenu ses promesses à leurs égards, que élèves, étudiants et militants du parti de la localité ont décidé de se faire entendre à travers ces brassards rouges. Poursuivant notre interlocuteur explique avoir soumis depuis Août 2015 leurs doléances au ministre dans son bureau. Mais rien n’a été fait depuis lors. Des doléances qui tournent au tour de la construction d’un forage, d’une case de santé, d’un matériel agricole pour exploiter les terres, l’octroi de financements pour les femmes, ainsi que qu’un logement pour les élèves et étudiants du village à Dakar. «Nous avions décidé de nous faire entendre, puisqu’on a tout fait pour ce parti et en retour nous sommes humiliés», se désole notre interlocuteur.
Abou KANE (Correspondance)