Pour avoir révélé des informations qui auraient dû faire les choux gras de la presse depuis belle lurette, l’inspecteur des Impôts, Ousmane SONKO, est en phase d’être extirpé de la fonction publique. La suspension ne suffit pas, autour du bol de Macky Sall, le mot d’ordre semble clair: on se sert en silence ou on reçoit un coup de pied au derrière.
Le régime du président SALL ira-t-il jusqu’au bout de sa logique en radiant de la fonction publique l’inspecteur des Impôts Ousmane SONKO ? La convocation de ce dernier devant le conseil de discipline de la fonction publique tend à renseigner que la messe est déjà dite. Les tenants du pouvoir semblent ne guère vouloir se contenter de la suspension déjà très contestée d’Ousmane SONKO. Pour eux, les «pêchés professionnels», que ce dernier aurait commis et qu’ils sont les seuls à avoir constaté, ne peuvent être absous que sous la guillotine. Un fantomatique conseil de discipline, présidé par Mouhamed Mahmoud Diop que Macky SALL a nommé Directeur général de la Fonction publique mercredi 20 janvier 2016, est mis en branle et va se pencher sur la question ce mercredi 24 août.
Pour Moustapha Diakhaté, la radiation d’Ousmane SONKO ne serait que la suite logique des actes que celui-ci a posés. Comme s’il s’est senti directement visé, le député s’est voulu particulièrement virulent. «Incapable de respecter les principes sacro-saints de dignité, d’impartialité, d’intégrité, de probité, de neutralité devant accompagner les hauts fonctionnaires, toujours à la recherche de la gloire médiatique, Ousmane SONKO doit démissionner ou être démis de la fonction publique pour faire valoir ses droits à la politique politicienne», a déclaré Moustapha DIAKHATE. A lire le député, on aurait dit que l’inspecteur a divulgué, à on ne sait quelle organisation terroriste ou Etat ennemi, des informations top secrètes de défense nationale. Même son de cloche pour le ministre Amadou BA qui de passage à l’Assemblée nationale, le 29 juin, a abondé dans le même sens que le député. «Ces propos, à l’origine de cette affaire, ont des soubassements politiques. Il y aura une réponse politique qui va régler ce problème (…) C’est un débat qui n’aurait jamais dû être soutenu. Nous allons prendre nos responsabilités. Des mesures seront prises, dans les jours à venir, mais dans le respect strict des lois et règlements qui gouvernent la République», avait soutenu l’argentier de l’Etat.
Mais pendant qu’il est question des lois et règlements qui gouvernent la République, est-il besoin de rappeler aux tenants du pouvoir que radier Ousmane SONKO équivaut à les enfreindre. La Constitution dont Macky SALL est le gardien, concède aux citoyens les libertés d’opinion et d’expression. Et s’il est précisé dans la même charte fondamentale que ces libertés «s’exercent dans les conditions prévues par la loi», jusque-là, aucun membre de la mouvance présidentielle n’a indiqué en quoi, Ousmane SONKO a enfreint la loi. «Il a failli à son obligation de réserve», rétorque-t-on, pour justifier la suspension. A la question quel est le dossier dont il avait la charge et qu’il a partagé avec le public, les partisans de Macky SALL donnent leur langue au chat. Pourtant, quelques jours après les déclarations d’Ousmane SONKO, quand les nuages se sont quelque peu dissipés, les députés se sont accusés. Beaucoup d’entre eux ont pointé du doigt le président de l’Assemblée nationale qui n’aurait pas insisté pour que les impôts des députés soient reversés au Trésor. Mais au lieu de décorer l’inspecteur qui a mis à nu un grave manquement préjudiciable au contribuable sénégalais, c’est la chasse à la sorcière. Les hauts fonctionnaires ont beaucoup trop de boulot pour s’adonner à la politique qui est faite pour ceux qui n’ont pas de réel travail ou pour les privés.
Aminata SOW SIDIBE a été démise de ses fonctions de conseiller du président de la République pour avoir mis son grain de sel dans le dossier de Karim Wade. Mais, puisque c’était une fonction politique, beaucoup se sont juste contentés de déplorer la manière. En radiant Ousmane SONKO, qui n’a eu besoin de la signature d’aucun décret pour être inspecteur des Impôts, le régime de Macky SALL, qui peut encore faire machine arrière, va commettre une grave forfaiture et créer un précédent aussi scandaleux que dangereux.
Mame Birame WATHIE