Irréductibles opposants au régime de Wade, ils n’ont pas su résister à l’appel du Président Macky Sall. Ces leaders de parti ou d’organisations de la société civile ont troqué leur boubou de «défenseurs de la cause du peuple» ou «sentinelles de la démocratie» contre des costumes trois pièces cousus par le pouvoir.
Le Président Macky Sall a réussi un tour de maître : Il a mis dans sa poche toutes les figures emblématiques du Mouvement du 23 juin (M23). En effet, à l’exception du mouvement Y en a marre, les partis politiques et beaucoup de membre de la société civile, qui luttaient pour la bonne gouvernance démocratique et contre le «tripatouillage de la constitution et les dérives monarchiques de Wade» se sont rangés de son côté. Moustapha Niasse, le secrétaire général de l’Afp, qu’on voit dans une vidéo une grosse pierre à la main droite lors de la manifestation contre le ticket Président-vice-Président, trône à la présidence de l’Assemblée nationale. Le Président Macky Sall a fait de lui la deuxième personnalité de l’Etat pour le neutraliser. Il en a fait de même avec le Ps. En effet, pour faire bonne mesure et surtout pour continuer à neutraliser le Ps, Macky Sall a fait de Ousmane Tanor Dieng, le secrétaire général du Ps, ministre d’Etat, dans un premier temps. Maintenant, il s’apprête à le mettre à la tête du futur Haut conseil des collectivités territoriales (Hcct) dont la création a été entérinée lors du référendum. Autre opposant irréductible au régime de Wade, Abdoulaye Bathily a accepté d’être éloigné des affaires du Sénégal avec le poste d’Envoyé spécial des Nations unies pour l’Afrique centrale (Unoca). Last but not least, Amath Dansokho est bombardé ministre d’Etat.
Du côté de la société civile, la plupart des responsables ont troqué leur boubou de société civile, de «défenseurs de la cause du peuple» ou «sentinelles de la démocratie» contre des costumes trois pièces confectionnés par le chef de file de l’Apr. Macky Sall a dompté la figure emblématique et coordonnateur du M23, Alioune Tine en faisant de lui le président du comité sénégalais des Droits de l’Homme (Csdh). Autre figure du mouvement, Abdoul Aziz Diop qui a failli piquer une crise à la place de l’Obélisque, le jour où le Conseil constitutionnel a validé la candidature de Wade, a été bombardé conseiller spécial du chef de l’Etat. Quant à la dame de fer du M 23, Mme Penda Mbow, elle s’est vue offrir le juteux fromage de compagnie de la première Dame Marième Faye Sall. Les journalistes Abdoulatif Coulibaly, Souleymane Jules Diop, Yakham Mbaye, redoutables détracteurs du régime libéral, ont rangé leur plume pour se retrouver avec des postes ministériels, cessant ainsi tout activisme dans la sphère de la société civile. Suffisant pour provoquer la colère de l’ancien Premier ministre Idrissa Seck qui n’a pas manqué de relever le fait : «A longueur d’années, on nous tympanise avec la bonne gouvernance et une gestion sobre alors que son magistère est truffé de scandales… Les plumes les plus affûtées de ce pays ont été transformées en dames de compagnie du couple présidentiel», déclarait Idrissa Seck en marge d’une visite à Touba.
Fer de lance de la contestation contre le Président Abdoulaye Wade, le Mouvement du 23 juin 23 avait réussi à fédérer tous les partis politiques de l’opposition d’alors et les principales organisations de la société civile contre le régime libéral. Ce mouvement a vu le jour un soir de 23 juin 2011, lors de l’examen avorté par l’Assemblée nationale du projet de loi visant à instaurer un ticket président et vice-président pour l’élection présidentielle de 2012.
Aujourd’hui c’est Mamadou Mbodj qui tente de raviver la flamme du M23 à côté de son jeune camarade de lutte Abdourahmane Sow qui a créé la Commission orientations et stratégies/M23. Leurs appels sont loin d’être toujours entendus.
Avec Charles Gaiky DIENE (Walf Quotidien)