Crise économique, contestation sociale, succession. Alors que le régime est fragilisé, le président a placé sa fille Isabel à la tête de la Sonangol. Un choix risqué mais calculé à un an de l’échéance présidentielle. À 43 ans, Isabel dos Santos jette le masque. Jusqu’à présent, la fille aînée du président angolais prétendait ne pas se mêler de politique. « Oui, l’industrie pétrolière est menée par la politique, disait-elle au Financial Times en mars 2013, mais mes propres affaires ne le sont pas ». Aujourd’hui, volte-face. Depuis le 2 juin, la « princesse » comme l’appellent les Angolais préside la Sonangol, la compagnie pétrolière publique, qui n’est autre que la machine à cash du régime. Et devient la reine du pétrole. Fini les articles dans la presse people sur la jolie métisse sa mère est une ex-championne d’échecs russe qui a réussi dans le business. La femme d’affaires la plus riche du continent est à présent une femme d’État et l’un des cinq piliers du régime angolais. Isabel a-t-elle hésité à se jeter dans le grand bain ? De bonne source, non. « Quand son père lui a proposé le job, elle s’est sentie flattée et y a vu une forme de reconnaissance, confie un proche. Depuis la chute des prix du pétrole, les réserves de change ont fondu, elle a le sentiment qu’il faut sauver l’Angola. Comme son père, c’est quelqu’un de fier ». Bref, elle assume ce revirement.
Une solution politique dans un contexte social tendu
Officiellement, elle est censée remettre de l’ordre dans les finances d’une société mal gérée. De fait, la Sonangol a fait des investissements hasardeux et doit revenir à son cœur de métier. Mais, en réalité, la mission d’Isabel est d’abord politique. L’heure n’est plus à la fête et aux « happy birthday » de Stevie Wonder, le maître du swing américain, lors du quarantième anniversaire de l’indépendance, le 11 novembre 2015 à Luanda. Depuis avril 2016, le deuxième producteur africain d’or noir (1,7 million de barils par jour) est obligé de demander l’assistance financière du FMI. C’est humiliant. Et, face à une opposition revigorée, le régime se durcit. Le problème de l’Angola, c’est sa société ultra-inégalitaire. À côté des golden boys qui roulent en Porsche, 37 % des 24 millions d’habitants vivent avec moins de 1 dollar par jour. Comme il n’a pas su diversifier son économie, le pays est frappé de plein fouet par l’effondrement des cours du pétrole. Depuis un an, la société civile s’enhardit.
Jeuneafrique (titre WALFNET)