Les dirigeants du monde sont unanimes sur la question. Seul, aucun pays ne peut combattre efficacement le terrorisme. Dans la sous-région ouest-africaine déjà ensanglantée par de nombreux attentats, le Sénégal semble loin de cette logique collaborative. Le président Macky Sall a raté une véritable occasion en fêtant l’indépendance sans la présence d’aucun de ses voisins.
Après la cérémonie officielle de la fête de l’indépendance, des opposants ont relevé pour s’en désoler que le président Sall n’a convié aucun de ses adversaires politiques à la tribune officielle. «Je crois qu’une République digne de ce nom doit se comporter avec les principes de cette même république. Je crois que ceux qui nous gouvernement aujourd’hui, foulent au pied les règles de cette République. Si je prends mon cas personnel, je suis ancien président de l’Assemblée nationale, ancien président du Sénat, ancien maire de Dakar, à ces trois titres, je crois que je dois être invité», avait martelé le leader de Bokk Guis Guis. Seulement, Pape Diop et Cie semblent avoir oublié qu’ils n’ont pas été les seuls à être zappés par Macky Sall. La célébration du 56ème anniversaire de l’indépendance du Sénégal s’est également déroulée en l’absence remarquable de tous les pays voisins du Sénégal. De la Gambie à la Mauritanie en passant par les Guinées et le Mali, aucune délégation étrangère venant de ces pays frontaliers n’a été aperçue à la tribune officielle, encore moins parmi ceux qui défilaient. Et pour une cérémonie que le chef de l’Etat voulait grandiose, le Sénégal a probablement manqué une occasion de raffermir les relations déjà alambiquées avec ses voisins. Contrairement à ses prédécesseurs qui profitaient d’occasions aussi solennelles qu’une fête d’indépendance pour inviter leurs homologues autour d’un banquet, Macky Sall s’accommode des hommes qu’il a nommés. Son statut de président en exercice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest n’y a rien changé.
Pourtant, dans un rapport intitulé : «S’unir contre le terrorisme : recommandations pour une stratégie antiterroriste mondiale», l’Onu trouvait que «Les initiatives régionales et sous-régionales ont favorisé les échanges relatifs aux pratiques optimales et aux enseignements tirés en matière de renforcement des capacités, ainsi que les contributions régionales à l’action de la communauté internationale». Et dans ce sens, Ban Ki-Moon, secrétaire général de l’organisation, engageait «les États qui doivent relever des défis similaires à coopérer pour renforcer leurs capacités, notamment en tirant parti des avantages de la coopération Sud-Sud».
En effet, dans un contexte de lutte contre le terrorisme nécessitant une collaboration entre Etats, le Sénégal semble se détourner des règles de base en matière de prévention, malgré ses frontières aussi poreuses qu’une passoire. Prônant, depuis l’avènement de Macky Sall, une diplomatie économique, il se particularise dans l’autarcie. Abandonnant le statut de leader que lui confère sa stabilité politique, le Sénégal se marginalise au moment où les pays qui l’entourent se singularisent dans des alliances économico-sécuritaires. Au mois de novembre dernier, à l’occasion du 2e sommet ordinaire des chefs d’Etat et de gouvernement du G5 du Sahel, Ibrahim Boubacar Keïta, Mahamane Issoufou, Michel Kafando, Mohamed Ould Abdel Aziz et Idriss Déby Itno s’étaient retrouvé à N’Djamena pour échanger sur la lancinante question du terrorisme en vue de mutualiser leurs efforts. Pendant ce temps, le Sénégal peine toujours à assurer une libre circulation de ses citoyens dans leur propre territoire. A défaut d’avoir la patience que nécessite l’acquisition d’un billet d’embarquement du bateau Aline Sitoé Diatta, rallier les régions sud du Sénégal relève du parcours suicidaire. Pour cause, entre Yaya Jammeh et Macky Sall, c’est du «je t’aime, moi non plus». La Guinée Conakry et le Mali ne sont pas positionnés comme la Gambie par rapport au Sénégal, mais les relations entre les présidents de ces pays et celui du Sénégal sont pratiquement du même acabit.
Le Sénégal, qui est également sur le qui-vive, cherche ses partenaires du côté de la France et des Etats-Unis qui, au moindre coup de pétard, alertent leurs ressortissants leur demandant de ne point mettre le nez dehors.
Mame Birame WATHIE