Au moment où tous les cadres de l’Administration pénitentiaire se la coulent douce à Saly, dans le cadre d’un séminaire de trois jours, Rebeuss est secouée par une histoire de grève de la faim en passe de prendre des proportions inquiétantes. Des détenus-mineurs refusent de s’alimenter, depuis lundi, en protestation contre leurs longues détentions sans procès.
Le feu couve à la prison de Rebeuss. Depuis lundi dernier, quatre détenus, tous mineurs au moment de leur arrestation, sont en grève de la faim. Selon les informations de Walf Quotidien, ces pensionnaires de la prison centrale de Dakar protestent contre leurs longues détentions et les dossiers perdus de plusieurs d’entre eux. Incarcéré depuis le 18 mars 2009, Cheikh Abdou Mbacké (21 ans) en est à sa septième année de détention avant jugement. Poursuivi pour le crime de «meurtre», son dossier instruit par le juge d’instruction du septième cabinet a été bouclé depuis 2011.Mais son jugement, devant la Chambre criminelle, tarde encore à avoir lieu. Aujourd’hui, ce pensionnaire de la chambre 17 n’attend que son procès pour connaitre son sort.
La bande à Pape Thiam, composée de trois détenus, sont aussi dans ce mouvement d’humeur, avec notamment Aliou Bâ (chambre 2) et Babacar Sène, pensionnaire de la cellule 3.Ils sont poursuivis dans une histoire d’agression. Concernant le cas de Pape Thiam, pensionnaire de la chambre 31, des rumeurs persistantes font état de ce qu’il traîne des séquelles de la démence. Il en est à sa huitième année de détention. Il a été placé sous mandat de dépôt le 2 avril 2008. Mineur au moment de son arrestation, il a, par deux fois, été renvoyé devant les tribunaux, mais ces derniers se déclarent incompétents à le juger. Il l’a été dans ce sens en décembre 2011, lorsque la Chambre criminelle a décrété son inaptitude à le juger, avec ses complices (Aliou Bâ et Babacar Pène), tous renvoyés au tribunal des mineurs et transférés à la Mac de Hann. Coup de théâtre : 20 jours plus tard, ilsserontretournés à Rebeuss, le 12 janvier 2015. Et depuis cette date, «aucune information ne leur est parvenue sur leur dossier», confie-t-on.
Nos informations font état de ce que d’autres détenus pensionnaires de Rebeuss s’apprêtent aussi à se joindre à la diète entamée par leurs codétenus, depuis le début de la semaine.«Ils ne comptent pas suspendre la grève tant qu’ils n’auront pas obtenu gain de cause», indique une source pénitentiaire proche des grévistes de la faim.
Cette situation survient au moment où tous les cadres de l’Administration pénitentiaire sont en séminaire de trois jours, à Saly.Un conclave qui regroupe les inspecteurs de l’Administration pénitentiaire, les chefs de division, les directeurs de prison, entre autres. Une rencontre qui entre dans le cadre du Plan stratégique de l’Administration pénitentiaire, pour les trois prochaines années.D’ailleurs, telle est la raison invoquée par les collaborateurs du colonel Daouda Diop pour différer leur version des faits par rapport à la situation qui prévaut à Rebeuss. Autrefois appelée«prison civile de Dakar», Rebeuss est souvent en proie à des cas de grève de la faim. Plus de 30 mineurs y sont incarcérés car la prison spéciale réservée aux mineurs (Mac de Hann, ex-Fort-B) est frappée par le phénomène du surpeuplement carcéral qui touche 20 des 37 établissements pénitentiaires du pays.
Pape NDIAYE