Les lieux de culte deviennent la cible du pouvoir, dans sa croisade contre la menace terroriste. C’est ainsi que la mosquée de l’aéroport a reçu un ordre de fermeture. Et d’autres institutions religieuses sont sur la liste rouge de l’Etat.
La mosquée de l’aéroport international Léopold Sédar Senghor va plier ses nattes, ranger ses haut-parleurs et couper la voix de ses muezzins. Elle a reçu l’ordre de fermer, depuis quelques jours. Cette décision prise au sommet de l’Etat a été notifiée aux responsables de ce lieu de culte implanté au cœur de la capitale. Selon une source religieuse contactée par Walf Quotidien, le motif apparent invoqué par l’autorité compétente est la «menace terroriste». Interrogé par nos confrères du site d’informations Slate.fr, le porte-parole de la Police nationale, Henri Boum Ciss, confirme et confie : «Si la construction de la mosquée de l’aéroport de Dakar a été interrompue, c’est parce que les autorités sénégalaises ont eu de forts soupçons sur la provenance de l’argent ayant financé ce projet qui avait tout l’air d’une œuvre de bonnes volontés».
La même source rapporte que des liens avec des ramifications de réseaux djihadistes ont été découverts dans la construction de cette mosquée. C’est pourquoi nos confrères de Slate.fr considèrent que ce sont des mosquées financées par des fonds étrangers, ont abrité ou abritent toujours des imams aux prêches radicaux. Mais l’Etat sénégalais qui était peu regardant, il y a encore quelques années sur les origines de l’argent dédié aux constructions de mosquées, est aujourd’hui plus sourcilleux sur la question. Cela ressort des confidences faites par le porte-parole de la direction de la police nationale à Slate.fr.
Auteur de l’article intitulé «la menace djihadiste au Sénégal», la journaliste Camille Belsoeur rappelle que le Sénégal, allié de la France et des États-Unis, est une cible pour les groupes djihadistes et s’inquiète de l’avenir après les attentats à Bamako et Ouagadougou. «Certaines mosquées qui ont des connotations salafistes sont très surveillées. D’après mon expérience, on a senti à partir des années 1990 une montée du fondamentalisme sur le terrain. L’un des principaux problèmes est le financement de mosquées par des pays ou autorités étrangères, notamment à Touba ou Dakar. On surveille désormais les financements des lieux de culte. L’Arabie saoudite finance de nombreux projets», confie Mamadou Lamine Niang, le commissaire spécial de la zone de l’aéroport à Dakar interrogé par Slate.
À l’heure actuelle, indique Slate, peu de Sénégalais ont été repérés dans les rangs de l’État islamique (Ei). «Deux ressortissants, Hassane Diène et Seydou Bâ, ont été tués en Syrie», selon Slate qui rappelle que «fondamentalisme religieux ne signifie pas terrorisme». Mais il semble que des passerelles existent parfois entre des milieux radicaux et des mouvances djihadistes. Pour les autorités sénégalaises, le scénario noir serait celui de la création d’une cellule terroriste sur le sol national, selon toujours nos confrères. «Notre plus grosse crainte est d’avoir une cellule de dix à vingt djihadistes sur notre sol», acquiesce Henri Ciss, porte-parole de la police dans SLate.fr.
Le site note aussi qu’au Sénégal, la menace se nomme également Boko Haram et rappelle l’arrestation, en décembre 2015, de quatre Sénégalais âgés de 20 à 30 ans, stoppés à la frontière entre le Nigeria et le Niger et qui ont combattu pour la secte Boko Haram. Sous les ordres d’un compatriote dénommé Makhtar Diokhané, ils envisageaient de créer un réseau djihadiste au Sénégal. Slate avertit que pour ne pas tomber dans le piège dressé par l’idéologie djihadiste, le Sénégal ne doit pas verser dans une répression exagérée à l’encontre des milieux fondamentalistes. Car souligne le site, «si l’État sévit trop fort contre les milieux religieux, des musulmans qui n’adhéraient pas à l’idéologie djihadiste peuvent basculer dans le terrorisme par révolte contre la répression ou l’exclusion dont ils sont victimes».