Elle existerait depuis la fin des années 1960. Mais depuis lors, l’existence de la presse écrite régionale se limite à Ziguinchor à la lutte pour la survie. Un combat qui a très peu réussi pour l’essentiel de ces journaux, condamnés à une mort prématurée.
(Correspondance)- Pendant les premières années de l’indépendance du Sénégal, la Casamance s’est contentée de consommer des informations nationales distillées à travers le quotidien national Le Soleil. Une situation qui a certainement contribué à mal faire connaître cette partie sud du pays. Il a fallu attendre les années 1970 pour assister à la naissance d’une presse écrite régionale. Cette révolution, la Casamance la doit à feu Emile Badiane, auteur du premier journal d’informations régionales baptisé Moorom. Sauf que ce journal, dirigé à l’époque par un certain Ousmane Bâ, répondait plutôt à des préoccupations politiques. Basé à la maison du parti à l’époque Ups avant de devenir le Parti socialiste (Ps) à Bignona, Moorom passait le plus gros du temps à faire un focus sur la vie du parti. Dans ces moments d’intenses combats politiques entre l’Ups et le Pra, il était important d’avoir un journal pour relater les actions, les réalisations et les ambitions du parti au pouvoir, notamment en Casamance, se souvient un ancien collaborateur de ce journal, devenu plus tard chef de station Rts Tambacounda. A en croire Ibrahima Soly Mandang, Moorom ne saurait entrer dans le cercle d’application d’un vrai journal d’informations générales. Il s’agissait plutôt d’un journal propagandiste. L’un dans l’autre, Moorom ne survivra hélas pas à la disparition de son créateur Emile Badiane, décédé en 1972.
A côté, un autre journal tentait de combler le vide. La vie du Diocèse devant être connue par les fidèles catholiques, Kamano, qui signifie «Riz» en langue Diola prenait en charge cette préoccupation. Comme Moorom, ce journal édité loin du Diocèse avait une cible particulière. Ainsi se déclinait le destin de la presse écrite locale. Un par un, ces journaux qui intéressaient pourtant beaucoup la diaspora Casamançaise ont disparu, touchés de pleins fouets par les rigueurs de la réalité sur le terrain, notamment le manque de moyens matériels et financiers. Toutes les autres velléités de mise en place d’une presse écrite régionale se heurteront hélas aux mêmes réalités. Si bien que certains journaux n’ont pas survécu à leurs premières parutions.
L’Aurore du Sud «réfugié» à Dakar résiste
Il a fallu attendre 1996 pour assister à la naissance d’un journal qui va réussir à résister au temps, mais aussi aux difficultés. Son nom : L’Aurore du Sud. Jusque-là, ce journal continue de paraître et de «vendre» l’image de la Casamance. Cette mission est d’ailleurs à l’origine de la volonté de mise en place de L’Aurore du Sud. «La plupart des journaux de notre pays ne parlent de la Casamance que quand elle s’illustre de manière négative à travers des braquages, des accrochages des accidents de mines etc.», regrette Malamine Fernandez. Présenter une autre Casamance, celle-là qui rit, chante, danse, avec des potentialités économiques énormes, des variétés culturelles sans commune mesure et un peuple accueillant etc. C’est cette mission que ce jeune promoteur a confié à son journal. Si cet objectif semble bien pris en charge, il reste que L’Aurore du Sud, comme ceux qui l’ont précédé doit se rendre à l’évidence. Manque de ressources publicitaires, difficultés d’impression, manque de papiers sont autant de situations que Malamine Fernandez et son équipe doivent gérer. Pour minimiser les contraintes qui font planer le spectre d’un dépôt de bilan, le journal s’est «réfugié» à Dakar. «La rédaction est à Ziguinchor, mais, le travail technique et commercial se fait à Dakar», renseigne le directeur de publication qui regrette l’indifférence des autorités politiques de la région face à cette situation. «Non seulement elles ne nous aident pas, mais plus grave, elles nous combattent», se désole Malamine Fernandez. Et comme si le sort avait décidé de s’acharner sur la presse écrite régionale, la presse en ligne est en train de porter l’estocade finale. Ce qui assombrit davantage l’avenir de ces journaux qui se créent pour mourir très vite dans les régions.