Ça craint pour Suneor. Alors que beaucoup d’observateurs se réjouissent de sa reprise des mains de l’homme d’affaires Abbas Jaber, la situation de l’entreprise devient de plus en plus critique, surtout pour cette présente campagne de commercialisation de l’arachide où elle doit acheter pas moins de 300 mille tonnes d’arachide. Pour ce faire, la Suneor avait besoin d’un financement de près de 80 milliards de francs Cfa. Ce que l’Etat a tenté de décrocher auprès de la Banque européenne d’investissement et de la Banque islamique de développement (Bid), après le divorce d’avec Jaber.
Mais, jusqu’ici les choses traînent toujours, et l’horizon s’assombrit davantage pour ce plus gros acheteur de l’arachide au Sénégal. Car, sur ces 80 milliards attendus par la Suneor pour entrer en campagne, l’Etat n’a pu trouver qu’un accord à hauteur de 40 milliards auprès de la Bid. Mais, l’argent n’est toujours pas décaissé à cause des procédures longues au niveau de ladite banque. Et le temps joue en défaveur de la Suneor. Laquelle est même, selon certaines sources, menacée par les acheteurs chinois qui risquent de collecter plus que les 150 mille tonnes autorisées à l’export. Cette situation d’handicap, confient certaines sources du milieu bancaire, est due à un manque d’esprit de prévision de l’Etat qui aurait dû régler la situation de la Suneor, six mois avant le démarrage de la campagne de commercialisation de l’arachide pour pouvoir boucler le financement. Ces sources soulignent, en outre, que le flou qui entoure le départ de Jaber ne sécurise pas les banquiers appelés à libérer l’argent. Car, selon elles, même si l’Etat a dit que Jaber est parti, il n’a pas offert la garantie dont la Suneor a besoin pour lever les fonds auprès des banques, notamment le fonds de commercialisation qui est de l’ordre de 25 milliards dû aux subventions de l’année dernière. Ce qui fait qu’aujourd’hui, la Suneor est débitrice par rapport aux banques et ne dispose pas de la garantie de l’Etat pour pouvoir lever des fonds. Ainsi, elle n’est pas en mesure d’entrer en compétition avec les autres opérateurs, notamment avec les Chinois. Pis, ce budget pour triturer 300 mille tonnes, au prix de 200 francs le kilogramme, risque d’être insuffisant quand on sait que les étrangers, qui disposent de cash, achètent jusqu’à 275 francs le kilogramme dans certains coins du pays. Les dégâts collatéraux risquent aussi, selon toujours nos sources, d’être plus graves quand on sait que si la Suneor n’entre pas dans la campagne, il n’y a pas d’acteurs capables de la remplacer. Et, si on laisse les Chinois face aux paysans, on risque de se retrouver sans semences lors de la prochaine campagne. Rappelons que les autres opérateurs sont en train, timidement, de mettre en place leurs financements pour enlever les quantités projetées. La Compagnie agroindustrielle de Touba (Cait) va lever au niveau de la Caisse nationale de crédit agricole (Cncas) 6,5 milliards et trois milliards de francs à la Banque nationale de développement économique (Bnde). Quant à l’opérateur Copeol (ex-Novasen), il va trouver un financement, via Bnp Paribas, pour se procurer 50 mille tonnes d’arachide.
Seyni DIOP