C’est au cœur de l’Afrique, dans un de ses territoires enclavés, au sein d’un des pays les plus pauvres de la planète, que démarre une ère nouvelle, une nouvelle page de l’histoire des peuples d’Afrique. Et si ce n’est l’histoire qui se fait, c’est au moins un espoir de lendemains meilleurs qui est né pour les pauvres populations africaines.
Après les affres de la colonisation, après les indépendances trompeuses, après les démocraties dévoyées, des générations africaines se sont succédé sans véritablement connaître ce qu’était la liberté. Les dictatures, affichées ou
déguisées, ont été une règle et une triste continuité. Souvent venues à la suite de coups d’Etat militaires, les uniformes ont ensuite cédé la place aux vêtements civils pour se donner respectabilité et nouveau souffle. Dans ces cas et ailleurs, des processus électoraux plus ou moins transparents, malgré bien des efforts faits tournant souvent à la mascarade, n’ont pu prouver qu’un homme élu sans discontinuité pendant 20 années, ou davantage, n’était pas un dictateur s’imposant à la volonté populaire. Acceptons toutefois que tout cela fut possible par manque de maturité politique de nos populations, parfois provoquée et entretenue.
Fort heureusement, le contexte a désormais changé sous la pression de la population la plus jeune du globe. La jeunesse africaine, désespérant de l’amélioration de ses conditions de vie, fait l’amer constat de la tromperie dont leurs aïeuls, parents et aînés ont été victimes. Jugeant cette démocratie représentative vantée comme solution de tous leurs maux, elle n’en retient que le rapide et considérable enrichissement de ceux auxquels ils ont confié la charge de les diriger. Elle n’est non plus dupe du souci de ces derniers de systématiquement chercher à prolonger le temps de ce pourtant sacerdoce, transformé en ripaille pour toujours plus amasser, sans oublier famille, proches et complices. Ils organisent même parfois leur mort naturelle au pouvoir pour n’avoir point de compte à rendre sur terre. Certes, nul n’ose plus se faire élire «Président à vie». Mais nul non plus n’ignore les fréquentes volontés de l’être dans les faits par son propre maintien en fonction, ou par le choix de son successeur.
La jeunesse africaine avait déjà dit non une première fois. C’était au Sénégal, un jour de 23 juin 2011. Cette jeunesse avait su dire «non» à des politiciens manœuvriers. Les événements récents vécus au Burkina Faso révèlent que cette jeunesse sait également dire «non» aux fusils pointés sur sa poitrine. Que cette leçon serve. Et qu’ailleurs, en Afrique, on comprenne bien que le désespoir ôte à la vie son sens. Que l’on retienne que ce désespoir devient total lorsque, au-delà de l’espoir d’une vie meilleure pour au moins un demi-siècle qui vous reste à vivre, on vous prive de votre liberté de choisir librement en qui placer un peu d’espoir.
Demain, l’histoire retiendra qu’en Afrique, les débuts d’un changement vers le progrès politique, social et économique, commencèrent par le refus de sa jeunesse, et la construction d’espoirs crédibles. Cette conviction est mienne, mais facile à bâtir car toutes les grandes révolutions sont caractérisées par du refus, une jeunesse vigoureuse soucieuse de justice, et la recherche d’espoirs en une vie meilleure.
Jeunesse du «pays des hommes intègres», votre refus ne fut pas vain. Votre victoire augure d’une Afrique d’espoir.