Chronique de Abdourahmane
Tant qu’Abdoulaye Wade sera en vie et en pleine possession de ses moyens, le Parti démocratique sénégalais (Pds) ne roulera jamais pour Idrissa Seck. Le président de Rewmi doit s’y faire. Et il ne se nourrit pas d’illusions.
En attestent ses sorties au vitriol contre son ancien père spirituel accusé d’avoir passé un deal avec Macky Sall pour faire sortir son fils, Karim, de prison. Ce faisant, il s’aliène le peu de soutien auquel il aurait pu s’attendre de la part de certaines franges du Pds après qu’il a plaidé récemment le dossier Karim Wade devant l’Internationale libérale. Il le sait. Tout comme il n’ignore pas qu’il n’a pas grand-chose à attendre de ce parti qui est toujours sous la coupe réglée des wadistes. Ce sont eux qui continuent d’y dicter leur loi et ont poussé successivement à la porte Aliou Sow, Souleymane Ndéné et Modou Diagne Fada ainsi que leurs partisans, dont le seul tort sera d’avoir réclamé un grand «Sopi» dans le fonctionnement et dans les prises de décision d’un parti qui leur a tout donné et auquel ils ont beaucoup rendu.
Toute cour assidue au Pds est d’autant perdue d’avance pour Idrissa Seck que les libéraux ne l’ont jamais senti à leurs côtés tout au long des quatre années de chasse aux sorcières à laquelle ils ont dû faire face. Pas une manifestation de protestation à laquelle il a pris part. Ni même une prise de contact officielle avec le Pape du Sopi en vue de manifester avec bruit son soutien aux libéraux dans ces moments difficiles. Au contraire, il leur a donné l’impression d’avoir été si indifférent à leur sort durant ces années de harcèlement. Pour faire face à un régime qui les aura traqués comme jamais aucun parti n’en avait été l’objet au Sénégal sous l’ère de la démocratie multipartite, ils n’ont dû compter que sur eux-mêmes d’abord, et ensuite sur leurs alliés du Fpdr. Idrissa Seck n’a pas su profiter de ces circonstances pour se rapprocher d’un Abdoulaye Wade qui n’attendait que cela pour enterrer à jamais leur différend. Obsédé qu’il a été de fuir comme d’une peste son ancien père spirituel, il s’est coupé des franges les plus significatives du Pds, perdant définitivement ses chances de pouvoir se prévaloir à nouveau de son ancien statut d’actionnaire de ce parti.
Ses «actions» au Pds ne valant plus un clou, il ne reste dès lors au président de Rewmi qu’à se positionner comme la principale tête de pont de l’opposition radicale. Seulement, sur ce terrain, il se retrouve face à deux sérieux concurrents, notamment le premier Premier ministre du gouvernement de la deuxième alternance, Abdoul Mbaye, et Malick Gakou du Grand Parti. Si le fils de Kéba Mbaye n’en est qu’à ses débuts dans l’arène politique en tant que responsable de parti, il reste que son intransigeance sur les principes de gouvernance et son style d’opposant très critique sans être excessif sont tellement bien accueillis par l’opinion publique qu’ils inquiètent plus les fédayins de Macky Sall que les attaques bille en tête provenant d’Idrissa Seck. Alors que l’ancien fils putatif de Moustapha Niasse, Malick Gakou, se particularise, aux yeux de l’opinion, par son refus de toute compromission, hier comme aujourd’hui. Tout le contraire d’un Idrissa Seck auquel les «apéristes» rappellent, après chacune de ses sorties, le protocole de Rebeuss qu’ils n’ont jamais pu rendre public et que le président de Rewmi continue de traîner comme un boulet.
Quel dividende Idrissa Seck est-il en droit de récolter de son positionnement à la tête de l’opposition radicale au régime de Macky Sall ? Aucun, en cette période de reconfiguration de l’arène politique marquée par l’éclatement de l’Alliance des forces de progrès (Afp), la dislocation du Parti démocratique sénégalais (Pds) et la guerre des tranchées que se livrent Ousmane Tanor Dieng et Khalifa Ababacar Sall à la tête du Parti socialiste (Ps) et qui ne sera pas sans conséquence sur le devenir de ce parti. Des soubresauts dont le président de Rewmi ne pourra pas tirer profit, contrairement à Macky Sall qui doit bien se frotter les mains pour n’avoir plus besoin de diviser ses alliés et ses plus farouches adversaires du Pds pour régner en toute tranquillité.
Par Abdourahmane CAMARA*
Directeur de publication de Walf Quotidien
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