Par Ousseynou GUEYE
Le Sénégal va entrer dans une phase de négociations très difficile avec le Fonds monétaire international (Fmi) et la Banque mondiale dont les équipes sont attendues à Dakar. L’enjeu principal de ces discussions, c’est comment sortir de la situation économique catastrophique dans laquelle le pays est plongé. Le rapport de la Cour des comptes a créé un véritable séisme dans le pays avec des indicateurs plus affectés que ce qui était annoncé au Fmi et aux bailleurs de fonds. La dette qui était prévue à moins de 73 % a été estimée à plus de 99 % alors que le déficit budgétaire annoncé à 3,9 % est ressorti à plus de 11 %. En fait, tous les indicateurs sont au rouge vif : forte hausse des importations, dégradation avancée des grands équilibres et un endettement chronique.
Pour ne rien arranger, les organismes de notation ont maintenant placé le Sénégal dans les pays à risque concernant la dette. Ainsi la dernière note établie juste après la parution du rapport de la Cour des comptes par l’organisme Moody’s en ce qui concerne la dette souveraine du Sénégal est très sévère. Elle est établie à B3 avec une perspective négative. Dans son communiqué publié le 21 février dernier, l’agence Moody’s souligne que «l’ampleur et la nature des écarts limitent considérablement la marge de manœuvre budgétaire du Sénégal et contribuent à des besoins de financement élevés», ajoutant : «en conséquence, le Sénégal est plus exposé aux chocs défavorables que nous ne l’avions estimé précédemment».
C’est un avertissement ferme envoyé au Sénégal pour faire comprendre aux autorités qu’elles doivent s’attendre à un relèvement drastique des taux d’intérêt pour tout emprunt. Autrement dit, il faudra payer beaucoup plus cher les intérêts de la dette, donc bien plus que les taux de 6 à 7 % habituellement fixés sur le marché financier et les eurobonds. Sans compter les commissions des intermédiaires qui vont aussi augmenter.
C’est un autre signe négatif pour les hommes d’affaires, car les taux d’intérêt sur le marché bancaire national étaient revus à la hausse, suite à la décision de la Banque centrale de relever ses taux directeurs pour mieux lutter contre l’inflation, même si cette décision pénalise l’investissement. En effet, la masse monétaire en circulation pourrait baisser. Par ailleurs, on susurre qu’une partie très importante de l’argent est thésaurisée, c’est-à-dire retirée du circuit économique par ceux qui ne veulent pas susciter les curiosités du Pool financier ou des organismes de contrôle.
C’est dans une telle situation que les bailleurs de fonds se montrent pour discuter avec les autorités. Le pays étant dos au mur, ils peuvent lui imposer des solutions draconiennes avant de dénouer les cordons de la bourse. Le Sénégal va-t-il accepter les conditions du Fmi, alors qu’il a mis en place un projet de souveraineté économique à travers sa «Vision 2050». Les premiers projets sur l’eau pour développer l’agriculture et la digitalisation pour faire du Sénégal un pays autonome ont été lancés. Il est prévu dans les jours à venir le lancement d’autres projets allant dans le sens de rendre le Sénégal autosuffisant en matière de produits alimentaires.
Mais bien avant les bailleurs, le Premier ministre, Ousmane Sonko, a esquissé il y a une semaine à l’Assemblée nationale, de manière sommaire, un plan destiné à réduire les dépenses de l’Etat, à travers la fusion ou la suppression d’agences budgétivores et la réduction des salaires des fonctionnaires les plus nantis. Il a aussi fait savoir son intention de revoir les subventions à travers un mécanisme destiné à sortir les riches de ce système ou faire des envois monétaires aux plus pauvres.
Maintenant, il appartient à l’Etat de fixer la ligne rouge pour montrer qu’il n’est pas prêt à accepter toutes les propositions des bailleurs de fonds qui se sentent en position de force. Il y a une ligne qu’il ne peut pas accepter de franchir. Son programme économique et social qu’il a mis en place ne peut pas être remis en cause. La souveraineté économique qui passe par l’autosuffisance alimentaire est la pierre angulaire de cette politique économique et sociale. Ce n’est pas négociable. Tout comme la politique des subventions doit être bien étudiée pour ne pas pénaliser les pauvres et les revenus modestes. Les subventions permettent de lutter contre les différentes formes de pauvreté et participent au soutien à la consommation.
Par ailleurs, le Sénégal doit bien examiner son déficit budgétaire pour trouver des niches d’économie avant de se lancer dans une politique tous azimuts de dettes. L’endettement de l’Etat sera donc au centre des négociations avec le Fmi dont l’avis est déterminant dans la décision des marchés financiers d’octroyer des prêts au Sénégal. En tous cas, le Sénégal doit éviter d’entrer dans un cercle vicieux de l’endettement en supportant une charge d’intérêt supérieure qui aggrave son déficit initial et le pousse à emprunter de nouveau. Si l’Uemoa a fixé le déficit budgétaire d’un pays à 3 % du Pib, c’est justement pour éviter aux pays d’entrer dans ce cercle vicieux de l’endettement qui fausse tous les indicateurs macro-économiques.
Tous ces éléments doivent être mis dans la corbeille des négociations par le Gouvernement qui doit mettre en place un programme de relance de l’économie pour développer des projets porteurs de croissance et d’emplois. Ce n’est que de cette manière qu’il va s’écarter de l’austérité dans laquelle les bailleurs de fonds vont le conduire.
N’est-ce pas que le régime de Abdou Diouf a capitulé face aux bailleurs de fonds qui n’ont pas hésité à supprimer le chemin de fer, les travaux publics, les internats, la Nouvelle Politique Agricole (NPA) la Nouvelle Politique Industrielle (NPI) et bien d’autres sociétés d’encadrement du monde paysan jugés non rentables, sous le prétexte que l’Etat ne se fait pas hara-kiri ?
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