Au moment où, dans l’opposition, on ergote sur le profil du chef de l’opposition, des voix s’élèvent dans la majorité pour rappeler que le 3ème mandat est un «coup d’Etat constitutionnel». C’est le cas de Me Moussa Diop dont le fauteuil à Dakar Dem Dikk vacille.
Il y a un an, parler du 3ème mandat était érigé au rang de péché suprême qui ne s’expiait que par l’exclusion des rangs de la majorité de celui qui aurait prononcé le mot banni. Premier à en faire les frais, Sory Kaba. L’ancien Directeur des Sénégalais de l’extérieur avait rappelé à l’émission Grand Jury de la Rfm ce que tout être doué de bon sens savait : le Président actuel en est à son second et donc dernier mandat si tant est que l’on se donne quelque peine à bien lire la Constitution. «Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs», dispose, en effet, la Charte fondamentale. S’y ajoute que, à plusieurs reprises, le président de la République et son «tailleur haute couture», Ismaïla Madior Fall, ont dit et répété que cette disposition sur la limitation des mandats était verrouillée. On n’a pas besoin d’être docteur en droit pour savoir que, en l’état actuel du droit positif sénégalais, «nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs». Un bon élève de cours moyen élémentaire est à même de le comprendre. Sory Kaba apprendra, à ses dépens, que dans la «Mackysie», toute vérité, si évidente soit-elle, n’est pas bonne à dire. Aussi, sans attendre le Conseil des ministres suivant cette déclaration qu’il ne fallait pas, le président de la République l’enverra à Limoges. En cela, le maître du décret dit avoir voulu envoyer un signal fort à tous ceux qui, dans ses rangs, voulaient installer un débat que lui jugeait prématuré. On fut tenté de l’applaudir. Seulement, au même moment, ceux qui théorisaient la possibilité d’un troisième mandat n’étaient nullement inquiétés s’ils n’étaient tout simplement promus.
La même règle sera appliquée à Moustapha Diakhaté. L’ancien Président du Groupe parlementaire Benno à l’Assemblée et ancien chef de cabinet de Macky Sall fut d’abord sommé de se taire ou de dégager. Actif sur les réseaux sociaux, il continuera de plus belle ses diatribes. Lui-même invité à une émission de radio, il confirmera, mot pour mot, Kaba. S’ensuit l’enclenchement d’une procédure d’exclusion qui sera expédiée, vite fait bien fait. Depuis, chez les hauts responsables de la majorité, comme si l’on s’était passé le mot -éléments de langage obligent – tout le monde répète que «l’heure n’est pas à une discussion sur le mandat», que «le Président vient juste d’être réélu», tutti quanti. Mais, dernièrement, une voix s’est fait entendre. Il s’agit de celle de Me Moussa Diop. Invité sur la Sen Tv, le Directeur général de Dakar Dem Dikk dira que le 3ème mandat est un «coup d’Etat constitutionnel». Ce qu’il ne fallait pas dire, dans l’entendement des thuriféraires du pouvoir. Alors, pour ne pas donner de l’épaisseur à cette déclaration qu’on veut voir vite enterrée, la majorité envoie Gaston Mbengue lui porter l’estocade. Faute de combat ni de combattant, le Don King de l’arène a trouvé en Me Moussa Diop le punching-ball idéal. Il fait le tour des plateaux télés pour faire payer au patron de Dem Dikk l’outrecuidance de rappeler ce que tout le monde savait et que le jeune Président bissau-guinéen, Emballo, a eu le toupet de signifier aux chefs d’Etat de la Cedeao réunis en visioconférence, la plupart candidats à une violation de leur Constitution. A partir de là, peu importent ses résultats à la tête de la société de transport public. Sa tête est mise à prix. Tout n’est plus question que de texte, de contexte et de timing.
Ibrahima ANNE