CONTRIBUTION
A l’heure où le monde entier est secoué par une pandémie sans précédent depuis un siècle, qui fait vaciller l’Occident, le Sénégal vient d’adopter pour la troisième fois de son histoire, l’état d’urgence. La consigne est claire : chacun chez soi de 20 heures à six heures.
Outre cette nouvelle conduite à tenir, il y a les gestes sanitaires barrières à adopter et le confinement. Il faut se faire à cette triple exigence : avoir une hygiène irréprochable, être à l’heure (agir avant le couvre feu), rester chez soi.
Toute une batterie de mesures qui constituent un véritable corset pour le Sénégalais habitué à la souplesse, l’indolence de la vie dans la rue, le laxisme et, il faut bien le dire, une certaine tolérance du manque d’hygiène (gargottes à proximité de poubelles, crachats, verres d’ataya que l’on se passe les uns les autres, déjeuner à proximité d’eaux usées etc.). Ces mesures sonnent le glas d’un penchant certain pour la promiscuité et pour une tendance à l’indiscipline.
Nous sommes priés de nous réinventer.
Plus d’attroupements inutiles dans les rues. L’anarchie dans les commerces et autres lieux publics a cédé la place à des files d’attentes rectilignes. Dans les maisons, les employés arrivent avant l’heure, travaillent sans traîner pour rentrer au pas de course.
Et surtout, nous opérons un véritable retour à l’essentiel laissant plus de place à la prière, à la méditation, à l’introspection. Nous prenons le temps de ranger, de lire, d’apprendre, d’écouter, de voir et surtout d’aimer nos proches.
Chacun s’occupe de ses affaires.
Finie la frénésie. Nous ralentissons et réalisons combien notre course folle de tous les jours est inutile.
Où courions nous donc ?
Désormais les Sénégalais font l’apprentissage d’un bonheur tranquille qui rompt avec les cérémonies et autres festivités chronophages et budgétivores. L’heure est à la sobriété, au minimalisme.
Comme à chaque grand défi, la Nation est unie. Les politiques ont fait preuve d’un bel unanimisme et d’une véritable capacité à se fédérer autour de l’essentiel, suite à l’appel du chef de l’Etat contre l’ennemi commun.
Les Chrétiens ne célèbreront pas Pâques en masse et les musulmans ne vont plus dans les Mosquées en foule. Mais nous sommes unis en prière, à implorer l’Infiniment grand afin qu’il nous débarrasse de l’infiniment petit.
Croire de toutes nos forces que cette terre du Sénégal où se sont succédé des Saints d’exception résistera à cette pandémie ravageuse. Elle le fera par la grâce de Dieu, par nos prières ardentes, mais aussi par notre discipline, notre résilience et notre inventivité. Et si nous inventions un nouveau type de Sénégalais, bonifié par l’épreuve ?
Yacine BA SALL
Directrice Générale de l’Institut BDA